Je connais ces tableaux depuis mon enfance. Mais, enfant, je ne les regardais pas, et donc, pendant longtemps, je ne les ai pas vus. Ils faisaient pour moi partie du décor, sans plus. Samedi dernier, 12 janvier 2019, jour de la bénédiction de la nouvelle cloche de l'église d'Arvigna, j'ai voulu en revanche regarder de près ces trois tableaux. Mais l'apparat de la cérémonie les masquait en partie, et la base du grand tableau d'autel se trouve rendue difficile à voir par l'étroitesse de l'espace de circulation ménagé derrière cet autel. J'ai pris quelques photos vaille que vaille, et je reviendrai à l'occasion pour tenter de mieux voir.
Après avoir assisté à Paris aux événements de l'été 1789, Saint-Just, âgé alors de vingt-deux ans, retourne à Blérancourt (Aisne), dans sa famille, au cours de l'automne de la même année.
Ci-dessus : vue actuelle de la maison familiale de Saint-Just à Blérancourt.
Enthousiasmé par l'exemple parisien, Saint-Just brûle de participer aux premiers actes de la Révolution à Blérancourt. Mais comme, né le 25 août 1767, il n'est pas encore éligible, — le mandat électif se trouvant réservé aux citoyens âgés d'au moins 25 ans —, Saint-Just fomente en sous-main diverses actions disruptives, dont, les 30 et 31 janvier 1790, le rassemblement de quatre vingts électeurs, suivi de l'élection d'un nouveau maire et de celle d'un nouveau conseil municipal, puis de la mise en place d'une milice bourgeoise encadrée par des sympathisants. L'illégalité d'une telle action se trouve dénoncée par Antoine Gellé, notaire, marchand de bois, régisseur de la seigneurie, procureur fiscal de cette dernière, père par ailleurs d'une jeune fille que Saint-Just a courtisée, dont on lui a refusé la main, et qu'on a mariée en toute hâte à un autre.
L'éclat de l'action fomentée les 30 et 31 janvier 1790 vaut à Saint-Just de participer, du 17 au 20 mai 1790 à Chauny, toujours sans mandat, au choix du chef-lieu du département de l'Aisne. Suite à quoi, le 6 juin 1790, le jeune homme devient colonel de la garde nationale de Blérancourt.
Saint-Just sera élu député à la Convention le 5 septembre 1792, et il exercera ce mandat jusqu'à son exécution, le 28 juillet 1794. Il assurera en outre la Présidence de l'Assemblée nationale, du 16 février 1794 au 6 mars 1794.
Publié en 1787, Organt est la première œuvre que nous connaissions de l'écrivain Louis Antoine Léon de Saint-Just. Il s'agit d'un poème composé de 22 chants, écrit dans le style du Roland furieux de l'Arioste, i.e. de la parodie du roman chevaleresque.
L'histoire commence quand « lui [le bon Roi de France], l'armée et tout le peuple franc / devinrent fous... ». Le bon Roi de France, c'est dans le récit Charlemagne, ou le Magne, ou Charlot. Mais Charlemagne sert en l'occurrence de prétexte à un portrait-charge de Louis XVI, souverain dont nous savons, à la différence du Saint-Just de 1787, qu'il a tout justement fini sur « la bascule à Charlot » (1).
Ci-dessus : 21 janvier 1793. Exécution de Louis XVI.
En 1787, l'ouvrage ne fait guère de bruit. En 1789, l'éditeur procède à une seconde publication. Comme le poème comporte divers passages pornographiques, afin d'aider au succès de cette édition, le même éditeur ajoute au titre de l'ouvrage la mention « Poème lubrique ».
« J'ai vingt ans ; j'ai mal fait ; je pourrai faire mieux », dit l'auteur quant à lui, en guise de préface à chacune des deux éditions.
En Arvigna, la restauration du clocher de l'église Saint Martial et Saint Vincent touche à sa fin. La baie du clocher était vide. Un don a permis au village de faire fondre à Annecy une nouvelle cloche. Monseigneur Eychenne, évêque de l'Ariège, est venu aujourd'hui, samedi 12 janvier 2019, bénir cette cloche. L'événement s'est voulu républicain autant que catholique. L'église était pleine, de croyants et de non-croyants, réunis dans le cadre chaleureux d'un événement commun.
Cette cloche, comme l'a fait remarquer le Père Capelle, curé de Rieucros, desservant de l'église d'Arvigna, sonnera désormais, pour tout un chacun, à la fois l'heure de la vie ordinaire, celle des travaux et des jours, et celle des baptêmes, des mariages et des sépultures.
Monseigneur Eychenne et le Père Capelle, visiblement heureux de se trouver réunis dans cette petite église qui n'avait pas reçu d'évêque depuis bien longtemps, ont prononcé à cette occasion des paroles d'amitié, de bienveillance et de solidarité. Celles-ci nous ont tous émus.
Le Père Capelle, qui a vu partir tant de ses paroissiens, a rappelé le souvenir d'Auguste Sinaud, dernier sonneur de cloche du village, celui de Madeleine Naudy aussi, qui a vécu près de cent ans ans et qui a donné son prénom à la cloche, ainsi que celui de la famille Naudy toute entière, dont les hommes ont été assassinés, et la ferme brûlée, à la fin de l'Occupation.
Après avoir béni la cloche, fait entendre la voix de la cloche et invité un enfant à faire entendre à son tour cette même voix, Monseigneur Eychenne a rappelé qu'indépendamment de toute croyance, il importe à chacun de nous, d'abord et avant tout, d'aimer son prochain.
La nouvelle cloche sera dans quelques jours installée sur le clocher, et cette installation donnera lieu à une inauguration le dimanche 27 janvier 2019.
Ci-dessus : Saint Martial, l'un des deux saints patrons de l'église d'Arvigna.
En 1789, dans le même temps qu'il écrit La raison à la morne (1), Louis Antoine Léon de Saint-Just broche une courte pièce intitulée Arlequin Diogène. L'original autographe a été recopié et édité pour la première fois en 1907 dans La Revue bleue.
La scène représente le bord d'un bois ; Arlequin est dans un tonneau.
Seul, la tête hors du tonneau, Arlequin se plaint de ce que « depuis six mois Perette le promène par les langueurs d'une flamme incertaine. « De ce travers, dit-il, je puis la corriger, et pour venir à bout de l'entreprise, dans ce tonneau je m'en vais me loger. Là, d'un cynique arborant la sottise, je foule aux pieds l'amour et les plaisirs. Je jouirai de sa fierté trahie. »
«N'allez pas penser, remarque Saint-Just in fine, que tout ici n'est que pour s'amuser. » (2)