Né le 24 août 1712 à Marseille, mort le 15 juin 1784 à Paris, Michel Barthélémy Ollivier(1) a été le peintre ordinaire de Louis François de Bourbon (13 août 1717-2 août 1776), comte de la Marche, duc de Mercœur, puis prince de Conti (1727), maréchal de camp en 1734, lieutenant-général en 1735, grand prieur de l'ordre de Saint Jean de Jérusalem du 16 avril 1749 au 2 août 1776.
Portrait de Louis François de Bourbon, gravé par Antoine Louis Romanet, d'après une peinture de Jean Baptiste Le Tellier.
À partir de 1770, après une brillante carrière militaire, puis une charge de ministre sans portefeuille, « Conti entre en opposition ouverte avec la politique du roi. Conseillé par sa maîtresse, la Comtesse de Boufflers, il protège les philosophes et tient dans son palais du Temple un salon souvent critique à l’égard de la Cour de Versailles. Il protège Jean Jacques Rousseau qu'il loge dans son château de Trie. Il verse une pension viagère de 2000 livres à Beaumarchais. Il est lui-même bon écrivain, bon orateur et habile musicien.
Dans le cadre de sa vie de prince opposant, il donne de grandes réceptions au Temple où est reçu le jeune Mozart, emploie un des orchestres les plus réputés de Paris, prend à son service le claveciniste Johann Schobert. Tous les lundis, il donne des soupers fameux, représentés par le peintre Michel Barthélemy Ollivier. Il donne également de magnifiques fêtes dans son château de L'Isle-Adam. » (2)
Michel Barthélémy Ollivier. Souper du prince de Conti au Temple. 1766.
Michel Barthélémy Ollivier. Le Thé à l’anglaise dans le salon des quatre glaces au Temple, avec toute la cour du prince de Conti, écoutant le jeune Mozart. 1766. À gauche sur l'image, le petit Mozart ; au fond à gauche, la maréchale de Mirepoix, qui verse du thé à madame de Vierville ; à droite du joueur de guitare, le prince de Conti, vu de dos.
Michel Barthélémy Ollivier. Fête donnée par le prince de Conti au prince héréditaire Charles Guillaume Ferdinand de Brunswick-Lunebourg, sous la tente, en forêt de Cassan, à l'Isle-Adam en 1766.
Michel Barthélémy Ollivier. Le cerf pris dans l’eau devant le château de L'Isle-Adam. 1766.
Michel Barthélémy Ollivier. Le jeu de dames ; sans date.
Michel Barthélémy Ollivier. Réunion galante ; sans date.
Grand organisateur de fêtes galantes, grand collectionneur de tableaux, passionné de chasse à courre, Louis François de Bourbon, qui faisait profession d'athéisme, refusera de recevoir avant de mourir les sacrements de la religion.
Ci-dessus : vue générale de l'Enclos du Temple, comprenant l'hôtel du grand prieur du Temple. Extrait du plan dit « de Turgot », réalisé entre 1734 et 1739 à la demande du prévôt des marchands, Michel Étienne Turgot, par Louis Bretez, membre de l'Académie de peinture et de sculpture et professeur de perspective.
Construit en 1665-1666 par Pierre Delisle-Mansart, l'hôtel du grand prieur du Temple, celui dans lequel Louis François de Bourbon donnait ses fameux soupers tous les lundis, a été démoli au XIXe siècle (3). Le château de l'Isle-Adam, quant à lui, l'a été en 1813.
Louis Gabriel Moreau l'Aîné (1740-1806). Le château des princes de Conti à L'Isle-Adam entre 1777 et 1798.
Jean avait un vêtement de poils de chameau, et une ceinture de cuir autour des reins. Il se nourrissait de sauterelles et de miel sauvage.
Tiré des évangiles de Matthieu en 3:4 et de Marc en 1:6, ce verset a inspiré le Saint Jean Baptiste dans le désert de Jérôme Bosch.
Jérôme Bosch. Saint Jean Baptiste dans le désert (~1489). Volet supérieur d’un retable d’autel. Musée Lázaro Galdiano, Madrid. Poésie de la méditation et mémoire de l'histoire des enfants de Dieu. Pour voir le tableau en grande résolution, cliquez ici, puis cliquez encore sur l'image ainsi obtenue.
I. Matthieu, chapitre 3, et Marc, chapitre 6
Jean avait un vêtement de poils de chameau, et une ceinture de cuir autour des reins. Il se nourrissait de sauterelles et de miel sauvage.
Tiré du Nouveau Testament, le verset reproduit ci-dessus fait écho à ceux des chapitres 10, 12 et 16 du livre de l'Exode, dans l'Ancien Testament.
II. Exode, chapitre 10
12 Le Seigneur dit à Moïse : « Étends la main sur le pays d’Égypte pour que viennent les sauterelles ; qu’elles montent sur le pays d’Égypte et qu’elles dévorent toute l’herbe du pays, tout ce qu’a laissé la grêle. »
13 Moïse étendit son bâton sur le pays d’Égypte, et le Seigneur fit lever sur le pays un vent d’est qui souffla tout ce jour-là et toute la nuit. Au matin, le vent d’est avait amené les sauterelles.
14 Des nuées de sauterelles montèrent sur tout le pays d’Égypte et se posèrent sur l’ensemble du territoire. Jamais auparavant et jamais depuis lors, il n’y eut une telle masse de sauterelles.
15 Elles recouvrirent tout le pays, qui en fut obscurci. Elles dévorèrent toute l’herbe du pays et tous les fruits des arbres épargnés par la grêle ; il ne resta rien de vert ni sur les arbres ni dans les prairies, par tout le pays d’Égypte.
16 Pharaon se hâta d’appeler Moïse et Aaron, et leur dit : « J’ai péché contre le Seigneur votre Dieu, et contre vous.
17 Et maintenant, je t’en prie : une fois encore, enlève ma faute. Priez le Seigneur votre Dieu, pour qu’il écarte de moi cette mort. »
18 Moïse sortit de chez Pharaon et pria le Seigneur.
19 Le Seigneur changea le vent d’est en un très fort vent d’ouest qui emporta les sauterelles et les précipita dans la mer des Roseaux. Il ne resta plus une seule sauterelle sur tout le territoire d’Égypte.
III. Exode, chapitre 12
1 Dans le pays d’Égypte, le Seigneur dit à Moïse et à son frère Aaron :
11 Vous mangerez ainsi : la ceinture aux reins, les sandales aux pieds, le bâton à la main. Vous mangerez en toute hâte : c’est la Pâque du Seigneur.
Exode, chapitre 16
13 Le soir même, surgit un vol de cailles qui recouvrirent le camp ; et, le lendemain matin, il y avait une couche de rosée autour du camp.
14 Lorsque la couche de rosée s’évapora, il y avait, à la surface du désert, une fine croûte, quelque chose de fin comme du givre, sur le sol.
15 Quand ils virent cela, les fils d’Israël se dirent l’un à l’autre : « Mann hou ? » Qu’est-ce que c’est ? car ils ne savaient pas ce que c’était. Moïse leur dit : « C’est le pain que le Seigneur vous donne à manger.
31 La maison d’Israël donna à ce pain le nom de « manne ». C’était comme de la graine de coriandre, de couleur blanche, au goût de beignet au miel.
En guise de commentaire
On a les sauterelles qu'on mérite.
Il y a du miel dans la Création.
Chacun reste libre de se figurer ici à quoi pense ou rêve, dans le désert, le Saint Jean de Jérôme Bosch.
Ce désert-là n'est point, au vrai, aussi désert que l'on s'y attendrait. Dans un paysage peuplé d'animaux qui pourrait être celui du matin du monde, tel qu'au cinquième jour de la Création, le doigt du saint pointe vers l'agneau qui voisine au premier plan du tableau avec une racine, de forme vaguement humaine, dont on voit qu'après avoir forcé son chemin dans la pierre, elle a donné naissance à une plante de grande taille, porteuse de fortes épines et de fruits étranges.
Profondeur de l'espace, allégorie de la profondeur du temps. Il y a eu, dans ce paysage du matin du monde, un sixième jour déjà, puisque, figuré en aval des animaux, Jean le Baptiste l'habite là maintenant sous nos yeux. Et il y a eu, au terme de l'histoire de la Création, l'avénement de l'Agneau déjà, l'Agneau qui vient sauver le péché du monde.
Chacun reste libre de se demander ici s'il y a un rapport, et lequel ? entre le mode de vie qui est celui de Jean le Baptiste au désert, et les préconisations issues de l'école de pensée qui aiguise aujourd'hui la critique de l'anthropocène.
« Le génie n’est que l’enfance retrouvée à volonté, l’enfance douée maintenant, pour s’exprimer, d’organes virils et de l’esprit analytique qui lui permet d’ordonner la somme de matériaux involontairement amassée. » (1)
Dans le secret de l'atelier, dernier état du Passage de l’Aquator avant son exposition à la Galerie 113, chez Philippe Guicheney, 36, avenue Frédéric Mistral, à Castelnaudary, jusqu'au 16 novembre 2019.
Dans la lumière plus froide de la galerie, nouvel état du Passage de l’Aquator, dans lequel on voit qu'il ne s'agit pas là d'une pièce faite, à l'ancienne, d'une charpenterie de bois, mais d'un assemblage de lames de métal, augmenté de quelques pièces de hasard, tête de poupée ancienne à la poupe, cache-sexe africains et revolver à la proue, plaques récupérées d'une vieille machine à coudre à la poupe et à la proue, hache en guise de gouvernail et de quille. Sur les bancs du navire, nul rameur. Seul à bord, le poupon, c'est le bosco, — le bosco de personne. Immobile, le navire demeure toutefois libre de virer sur l'axe qui le supporte.
Pierre Sidoine, quand il travaillait à son Passage de l’Aquator, a-t-il songé à cette promesse de l’enfance dont Baudelaire dit quelque part que seul l’art rend possible de jamais n’en démériter. Il saisit en tout cas dans cette pièce l’instant au regard duquel l’enfance apparaît comme marchant, sans se laisser elle-même derrière soi, à la rencontre du passage dont elle nourrit le rêve. L’immobilité de l’instant, qui est ici celle de la nef solidement ancrée, comprend, de façon sous-jacente au fond, la promesse de tous les voyages, de tous les futurs.
Pierre Sidoine semble s’être souvenu, là d'abord, du passage d’Albator, célèbre corsaire de l’espace créé par le mangaka Leiji Matsumoto en 1969, puis rendu célèbre par la série télévisée diffusée en Europe dans les années 1980. Inspiré par Musashi Miyamoto, le légendaire guerrier samouraï, Albator œuvre à la défense de la liberté et à celle des causes perdues.
De façon plus originaire, Pierre Sidoine semble s’être souvenu là surtout du passage de l’Équateur, qu’il a vécu enfant au fil de ses expatriations familiales. Du souvenir de son passage africain, il a tiré l’idée de faire des deux cache-sexe métalliques Kirdi (Cameroun) le matériau hautement suggestif — mais secret, en tout cas à peine visible — de la proue de son Aquator.
Considéré chez Pierre Sidoine dans la perspective du futur que lui fait la nef, l’enfant roi, ou plutôt le poupon qui trône sous son ombrelle au-dessus du château arrière dont une pièce de machine à coudre ancienne, richement ouvragée, protège la dunette, tient dans son regard, encore vide ou dormant, le fil des heures, l’ordre des années et des mondes. La quille et le gouvernail de l’Aquator sont faits d’une hache de bûcheron démanchée ; la figure de proue, elle, d’un revolver renversé. Point de Vengeur donc ni de Vainqueur ici ; mais, entée sur une nef solidement ferronnée, une sorte d’assentiment sans objet, de nue exposition à ce qui vient depuis toujours, sans prévision possible, à partir de la fin initiale.
À la fois superbement sobre et chargé du poids métaphysique que lui confère l’aménagement de la proue et de la poupe, le Passage de l’Aquator atteint de la sorte au pouvoir de montrer que l’artiste n’est pas l’Autre, mais le Même de l’enfant.
Derrière le Passage de l’Aquator, le Couple oblique, autre œuvre de Pierre Sidoine.
1. Charles Baudelaire. Le Peintre de la vie moderne, III, « L’artiste, homme du monde, homme des foules et enfant ». In Œuvres complètes de Charles Baudelaire, tome III (p. 58-68). Calmann Lévy. Paris. 1885.
Ci-dessus : sans date ni signature ni aucune autre information, objet trouvé entre les pages du plan du consulat de Lapenne en 1753. Ce plan est conservé au château de Roques.
Ci-dessus : au-dessus du village de Sainte-Foy, la chapelle romane.
La petite commune de Sainte-Foy abrite une chapelle datant du XIIe siècle. Le toit de cette chapelle, qui a résisté aux siècles, a permis à l"édifice de subsister jusqu'à nos jours. Dans les années 1950, le plâtre dont se trouvent enduits les murs et la voûte du chœur, tombe par parties, découvrant des restes de fresques. Trés altérés, ces restes semblent alors impossibles à sauver. Deux municipalités successives ont cru plus tard à la possibilité d'un tel sauvetage.