Ci-dessus : moulon du Capitoul, font del Bastié ou Bourdette et partie de la Croix del Bastié et encore partie de Ramondé (ou Ramoundé) ; plan 20 du compoix mirapicien de 1766.
1Jean Pierre Escarguel, géomètre et féodiste originaire de Limoux, auteur du compoix mirapicien de 1766 et du plan aquarellé qui accompagne ce dernier, hésite entre la graphie Ramondé et, plus proche de l'occitan tel qu'on le parle, la graphie Ramoundé. La graphie Ramoundé est celle dont usent les plans de Mirepoix publiés aujourd'hui. ; à l'ouest par une partie de la promenade de la porte d'Aval (aujourd'hui cours du Maréchal de Mirepoix), puis par le chemin del Bastié (aujourd'hui partie de la rue du 19 mars 1962, puis, au-delà de la D119, chemin du Bastié).
Capitoul, font del Bastié ou Bourdette, Croix del Bastié, Ramoundé… J’aime bien ces vieux toponymes. Mais qui à Mirepoix, hormis les Anciens, en connaît encore l’origine ? Les toponymes d’antan et les choses qu’ils racontent font partie de notre patrimoine pourtant. Dommage qu’on ne fasse rien pour entretenir leur mémoire. Il est vrai qu’on ne se soucie plus guère aujourd’hui des croix ni des fonts.
Ci-dessus : D119.
Le paysage dans lequel on s’orientait par rapport aux fonts et aux croix, de toute façon s’est perdu. On ne se déplace plus dans le paysage actuel qu’en voiture ; on s’oriente par rapport aux panneaux de signalisations, ou alors on se fie aux indications fournies par le GPS. Sûr qu’il n’a que faire des fonts ni des croix, celui là : il est aveugle ! La toponymie moderne a cessé en outre, bien souvent – trop souvent à mon goût -, de se rapporter au terrain. La route s’appelle ici D119. Les rues alentour empruntent leurs noms à la grande histoire ou aux héros, grands ou petits, parfois oubliés, de la dite histoire : rue du 11 novembre, rue du 19 mars 1962, avenue Maréchal Foch, rue Pierre Poisson (qui est-ce ?)… D’autres rues, plus récemment aménagées, portent des noms de plantes ou de fleurs : rue des Ajoncs, rue des Orchidées. La toponymie revient ici au terrain, mais de façon moins sûre, en tout cas moins utile qu’autrefois. Allez vous repérer aux orchidées depuis une voiture en marche ! Surtout lorsque la saison des orchidées est passée… Le paysage, ainsi renommé, a perdu de son immédiate lisibilité.
Ci-dessus : carrefour, rue des Orchidées, sur le chemin du Bastié.
Alors que j’allais à pied, j’ai cherché à vérifier l’existence de l’ancienne croix del Bastié, plusieurs fois mentionnée dans le compoix de 1766. En vain. Il n’y a pas ici de croix del Bastié, ou bien elle a disparu. Rien n’indique nulle part que la dite croix ait même existé. C’est dommage pour le piéton, qui marche lui aussi dans un univers de signes, et qui s’attache de préférence aux signes anciens, témoins de la la longue tradition pédestre dont il se veut le moderne continuateur. Certes le piéton devient rare. Je le sais. On devrait s’intéresser davantage aux pratiques de cette drôle d’espèce, qui tente de cultiver encore la connaissance du terrain par les yeux et par les pieds.
A propos de connaissance par les yeux et par les pieds, alors que, sur le chemin du Bastié, je passais ce matin à la hauteur de la croix dite « de Béon », située à l’angle du cimetière éponyme, lequel cimetière ne figure évidemment pas sur le plan de 1766 puisqu’il est bien postérieur au XVIIIe siècle, je me suis demandé si l’on n’avait pas remployé ici sous le nom de croix de Béon l’ancienne croix del Bastié dont personne ne sait plus rien et qu’on ne trouve plus nulle part, ni dans le moulon considéré, ni dans le moulon 28 circonvoisin, pourtant dénommé « moulon de la Croix del Bastié, Cariou et Bellemaire ». « Les croix, quand même », observait ce matin le fermier du Bastié, « en principe on ne les jette pas ».
Le moulon du Capitoul, font del Bastié ou Bourdette et partie de la Croix del Bastié et encore partie de Ramoundé, comme on peut voir sur le plan 20 du compoix de 1766, ne comprenait jadis dans son entier que quatre parcelles bâties (n°11, 12, 14, 18). Les parcelles n°12, 14, 18 se trouvent comprises dans le périmètre de l’ancienne bastide. La parcelle n°11 se trouve située en revanche sur le bord extérieur de l’ancienne escoussière 2Escoussière, ou escossière : chemin de ronde qui courait jadis au bord des remparts de la ville. de la ville, aujourd’hui transformée en Promenade des Soupirs.
Ci-dessus : vue de l’ancienne ferme Deloun à l’entrée de la promenade des Soupirs.
Ci-dessus : une fenêtre de la même ferme.
Ci-dessus : vue de l’ancienne ferme Deloun depuis la D119.
Sur la dite parcelle n°11 se trouve sise aujourd’hui encore la ferme de feu Jean Deloun, avocat au parlement, qui tenait ici en 1766 « maison et autres couverts, aire, et terrain alentour de la métairie, jardin, champ et pré, le tout joignant le lieu dit de la Bourdette ou font del Bastié ».
Ci-dessus : la façade actuellement peinte en rose est celle de la maison qui appartenait en 1766 à Jean Pierre Gibelot (parcelle n°18), docteur en médecine.
Ci-dessus : depuis la rue Maréchal Foch (autrefois rue de la porte de la Roque à Capitoul), autre vue de l’ancienne maison de Jean Pierre Gibelot (parcelle n°18).
Ci-dessus : depuis le cours du Maréchal de Mirepoix, essai de localisation de l’ancienne maison de Louise Cabanié (parcelle n°14) : il faut imaginer cette maison comme constituant la partie arrière ou jouxtant la dite partie arrière de la bâtisse ruinée, actuellement en cours de restauration, qui s’élève au bord du cours.
Ci-dessus : rue du 11 novembre, surmonté d’une élévation en briques, mur ancien, vestige de l’ancien « couvert » tenu ici par le Chapitre (parcelle n°12).
Des trois autres parcelles bâties, situées en deçà de l’ancienne escoussière, au lieu dit « Capitoul », deux seulement comprennent une maison : Jean Pierre Gibelot, docteur en médecine, tient une maison sur la parcelle n°18 ; Louise Cabanié, supérieure des Nouvelles Catholiques, en tient une autre sur la parcelle n°14. Ces Messieurs du Vénérable Chapitre, qui tiennent la parcelle n°12, ne possèdent là, en matière de bâti, qu’un simple couvert, point fait pour l’habitation, mais seulement pour le stockage ou pour le rangement.
Ci-dessus : ancien four de potier, reconstruit par Sébastien Jesset, archéologue de l’INRAP, à Saran.
Outre ces quatre parcelles bâties, le moulon abrite encore au lieu dit « Capitoul », sur la parcelle n°16, qui jouxte un jardin de François Vidal (parcelle n°17) et le champ de l’Evêché (parcelle n°15), un four de potier, appartenant à Marie Rigail, veuve de Jean Garros.
Ci-dessus : rue Pierre Poisson (qui est-ce ?), sur le chemin du Bastié.
Ci-dessus : sur le chemin du Bastié.
Au-delà des cinq parcelles susdites, le moulon du Capitoul, font del Bastié ou Bourdette et partie de la Croix del Bastié et encore partie de Ramoundé ne comprend plus en 1766 que des champs, accessibles à l’est par le chemin de Ramoundé, et à l’ouest par le chemin del Bastié. C’étaient là des chemins de longue habitude pour ceux qui allaient chaque jour travailler les champs en question. D’où l’heureuse fonction des anciens repères : arrivé à la croix del Bastié, on savait qu’on avait ici parcouru déjà une partie du chemin qui menait aux champs de Marianne Bataille (parcelles n°5, 7, 9), veuve et héritière de feu Guillaume Malroc, marchand, consul de Mirepoix en 1726.
Ci-dessus : vue du clocher de la cathédrale depuis le chemin du Bastié.
Ci-dessus : vue des deux pins de l’ancienne maison de François Rouvairollis 3Cf. Compoix de 1766, plan 1 n°6 ; La dormeuse blogue 2 : Maison, décharge et jardin de Maître Rouvairollis, rue du Coin de Cambajou. depuis le chemin du Bastié.
Et lorsque, faisant halte en chemin, l’on se retournait vers la ville, on voyait, surgi de la terre, le clocher d’une cathédrale aux champs. Le spectacle n’a rien perdu de son étrangeté aujourd’hui.
Le plan aquarellé de 1766, qui est en soi une oeuvre superbe, présente toutefois un inconvénient : il ne représente qu’un moulon par page, de telle sorte qu’on peine à saisir l’extension globale des propriétés. Ce plan ne permet pas de voir, par exemple, que la plupart des parcelles sises au lieu dit Capitoul font partie d’un ensemble plus vaste dont le pôle se situe à l’intérieur de la bastide et dont les dites parcelles constituent au sud une marge utile.
La parcelle n°14, qui appartient à Louise Cabanié, demeure voisine du domaine foncier que celle-ci administre dans le quartier de la Mestrise 4Cf. La dormeuse blogue 3 : A Mirepoix – Moulon de partie de la porte d’Aval, la Mestrise, font de Rousset, Croix del Bastié, Carriou et partie de Bellemayre., depuis la maison des Nouvelles Catholiques, installée à l’angle de la rue Courlanel et de la promenade de la porte d’Aval.
Les parcelles n°12 et 13 constituent, au lieu dénommé Capitoul (propriété du chapitre), un pan du vaste ensemble foncier dont le chapitre dispose dans la bastide ainsi qu’aux abords immédiats de cette dernière, sachant que le chapitre tient encore d’autres biens importants, dont deux métairies, dans des moulons plus distants du centre de Mirepoix.
Pour mémoire, voici dans la bastide et dans les moulons circonvoisins de cette dernière ou lointains la liste et le descriptif des parcelles qui sont en 1766 propriété du Chapitre :
- Plan 3 (moulon de partie du faubourg d’Amont, le grand faubourg St Jammes, rue de la Trinité, partie de celle des Houstalets, rue de la porte d’Aval, rue Courlanel, le grand Couvert, place St Maurice et grande Place), n°179 : maison servant de cave et grenier, couvert, le tout appelé Capitoul au couvert de midi la place 5Cf. A Mirepoix – Moulon de… la porte d’Aval, rue Courlanel, le Grand Couvert, place Saint Maurice et grande place – n°167 à 184. ; n°220 : maison et ciel ouvert à la rue allant au collège 6Cf. A Mirepoix – Moulon de… la porte d’Aval, rue Courlanel, le Grand Couvert, place Saint Maurice et grande place – n°215 à 231..
- Plan 11 (moulon de la Migeanne), n°1 : breil à la Migeanne ; n°4 : champ, pré, breil, paissieu 7Paissieu, en occitan : pâturage. à la Migeanne ; n°5 : champ au dit lieu.
Ci-dessus ; plan 13, n°1 : Chapitre ; n°2 : Jacques Arnaud, herm 8Herm : terre inculte ou aride. avec arbres.
- Plan 13 (moulon de la métairie de Grateloup et Saint Jean de l’Herm), n°1 : métairie ou autres couverts, aire, jardin, vigne, champ, pré, bois, brugue 9Brugue : champ de bruyères, de buissons, de fougères et de ronces. et herm, le tout joignant au lieu dit Grateloup et Saint Jean de l’Herm, dans laquelle pièce se trouvent enclavés l’église et le cimetière de Saint Jean de l’Herm.
Ci-dessus : plan 18 ; n°1 : Chapitre.
- Plan 18 (moulon de la métairie de Paraulettes et partie de Saint Jean de l’Herm), n°1 : maison et autres couverts, aire, paissieu, pré autour de la maison, champs, vigne, breil, bois et herm, le tout joignant au lieu dit Paraulettes.
- Plan 19 (moulon appelé le Bascou, Planol de Brau, font de Plainefage et Countirou), n°12 : champ et breil.
- Plan 20 (moulon du Capitoul, font del Bastié ou Bourdette et partie de la Croix del Bastié et encore partie de Ramoundé), n°12 : aire et champ appelé Capitoul ; n°13 : champ.
- Plan 30 (moulon de partie de la porte d’Aval, la Mestrise, font de Rousset, Croix del Bastié, Cariou et partie de Bellemaire), n°7 bis : ferratjat à la porte d’Aval 10Cf. A Mirepoix – Moulon de partie de la porte d’Aval, la Mestrise, font de Rousset, Croix del Bastié, Carriou et partie de Bellemayre..
- Plan 31 (moulon de partie de la porte d’Aval et condamine del Ministre), n°3 : champ à la porte d’Aval 11Cf. A Mirepoix – Moulon de partie de la porte d’Aval et Condamine del Ministre..
- Plan 33 (moulon de la plaine de Carrairix), n°2 : champ, paissieu et breil.
Ci-dessus : d’après le compoix de 1766, vue partielle du plan général de la commune de Mirepoix, divisée au total en 116 moulons. Les points rouges signalent la présence du Chapitre dans chacun des moulons concernés.
Les autres propriétaires des parcelles comprises dans le moulon du Capitoul, font del Bastié ou Bourdette et partie de la Croix del Bastié et encore partie de Ramoundé appartiennent tous, sans exception, à la bourgeoisie mirapicienne, constituée de marchands et de robins 12Robins : gens de robe.. Le monopole exercé conjointement sur les campagnes environnantes par le clergé et par la bourgeoisie urbaine a été observé de longue date par les historiens de l’Ancien Régime. Il se trouve confirmé ici. Les petits propriétaires, qui sont majoritaires en nombre à l’échelle du compoix, doivent se contenter de terres éloignées des dehors immédiats de la bastide, d’où cheminer longuement, par des chemins de fortune, pour gagner au bout de l’horizon leurs lopins reculés.
Ci-dessus : vue de Mirepoix depuis le Bastié.
Les noms des lieux-dits auxquels joint aujourd’hui le moulon 20 ne parlent plus guère. Quid du Bastié, qui se situe au-delà du moulon 20 dans le moulon 25 (moulon del Bastié, Coume del Bourdassié, Clot del Fieulet et Peyrade), et quid de Ramoundé, dont le nom s’applique ici au chemin qui court à travers champs jusqu’aux moulons 21 et 22, respectivement dénommés « moulon de Sibra, Ramondé et partie de Laibret de Paichels » (moulon 21) et « moulon de Mérouli et partie de Ramondé » (moulon 22) ?
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Le Bastié doit probablement son nom à l’activité bastière qui s’exerçait autrefois ici, dans un cadre propice à l’accueil des chevaux, mulets et ânes, et qui s’est perpétuée en ce même lieu jusqu’aux années 1950, semble-t-il, puisqu’au dire des Anciens de Mirepoix, il y avait au Bastié, dans leur jeunesse, encore « beaucoup de chevaux ».
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Ramoundé, comme Ramondé à Pamiers, Ramondens dans la Forêt Noire, Ramondenc en Dordogne, etc. dénomme sans doute, à partir de l’occitan « ramoundenc », un lieu qui a pu appartenir à un Raymond, partant, à l’un ou l’autre des comtes de Toulouse ; d’où, par extension, un lieu qui se situe dans l’axe directionnel de Toulouse.
Ci-dessus : moulon du Capitoul, font del Bastié ou Bourdette et partie de la Croix del Bastié et encore partie de Ramoundé ; plan 20 du compoix mirapicien de 1766.
Ci-dessus : moulon de partie de la porte d’Aval, la Mestrise, font de Rousset, Croix del Bastié, Carriou et partie de Bellemaire ; plan 30 du compoix mirapicien de 1766.
Le moulon du Capitoul, font del Bastié ou Bourdette et partie de la Croix del Bastié et encore partie de Ramoundé est au tournant du XVIIIe et du XIXe siècle, dans sa partie urbaine, siège d’une fontaine importante, aujourd’hui oubliée. Le compoix de 1766 assigne à cette fontaine deux noms différents, qui différent probablement en fonction du caprice de l’usage, font del Bastié sur le plan 20, font del Rousset sur le plan 30. Constatant que cette fontaine fournit la seule eau de source disponible dans la cité et qu’elle fait à ce titre l’objet d’une fréquentation nombreuse, le gouvernement révolutionnaire entreprend en 1790 d’en canaliser les eaux, via la parcelle de Me Jean Deloun, que, venant de Plennefage, elle traverse ; puis de l’aménager afin d’en rendre l’accès plus commode. Il donne à cet aménagement le nom de fontaine de la Nation 13Cf. La dormeuse blogue : Fontaines de Mirepoix – Fontaine de Rousset, fontaine de la Nation.. Il semble que, faute de moyens, la réalisation de l’aménagement prévu, en particulier celle de la voûte en forme de grotte, n’ait pas abouti. La canalisation elle-même a dû connaître des avaries, car le 23 novembre 1830, Antoine Benoit Vigarozy, maire de Mirepoix, constate que « la fontaine dite de la Nation a été abandonnée depuis plus de vingt ans, au point qu’elle est inutilisable ». Il est vrai que la ville a préféré, durant les années 1800-1815, consacrer les maigres ressources dont elle disposait, à l’aménagement de la fontaine Cambacérès, située au levant de la place, devant le couvert Servant, et alimentée par l’eau du Countirou via la canalisation qui partait de la tour des filtres, installée à l’endroit de la prise d’eau qui assure la dérivation du canal du moulin, aujourd’hui appelé Béal, à partir du ruisseau Countirou. La fontaine de la Nation, comme indiqué sur le fronton de cette dernière, a été restaurée en 1830. Aujourd’hui définitivement abandonnée, de même que la fontaine Cambacérès, elle ne sert plus.
Frédéric Soulié, dans Le sire de Terrides 14Frédéric Soulié, Le sire de Terrides, in Le Port de Créteil, tome 2, p. 154., disait, célébrant sa « chère ville » d’enfance, qu’elle était « dotée de fontaines et de réverbères ». Grand prestige ! C’était en 1834. Mirepoix n’est plus aujourd’hui que la ville des fontaines mortes. Qui s’en soucie ? Cette indifférence m’attriste et me choque. Passons.
Ci-dessus : vue de la ferme Deloun et de la fontaine de la Nation dans les années 1900.
Ci-dessus : vue de de qui reste de la fontaine de la Nation, toute petite derrière le monument aux Morts.
Ci-dessus : vue de la même fontaine de plus près.
Ci-dessus : plus de canalisation, plus d’eau. Reste le petit décor de pierre.
Ci-dessus : médaillon indiquant que la fontaine a été restaurée en 1830.
On peut voir sur les photos ci-dessus que la fontaine de la Nation est morte : l’arrivée d’eau a même été supprimée. Sur la place, la fontaine de Cambacérès a connu le même sort. Elle supporte, entre les parasols et les tables de café, un pot de fleurs rachitique. Il n’y a plus aucun point d’eau sur cette place. Est-ce normal, l’été, dans une ville du Midi ? Passons.
Après avoir cheminé jusqu’au Bastié, je suis revenue en ville à Capitoul, i. e. sur le bord sud du cours Chabaud (autrefois promenade de la Roque), afin de photographier le front de belles maisons qu’on a élevé ici, à partir du XIXe siècle, sur l’ancienne parcelle n°15, qui était en 1766 encore propriété de Monseigneur l’Evêque et qui n’avait alors que le statut de « champ ». L’évêché tenait ses écuries de l’autre côté de la promenade de la Roque, à l’emplacement de l’actuel hôtel du Commerce. Le champ situé sur la parcelle n°15, derrière la double rangée d’ormeaux de la promenade, servait probablement de pâture aux chevaux. Il s’étendait jusqu’à la promenade de la porte d’Aval. Il faut imaginer cette vaste étendue, libre de toute construction, pour mesurer l’effet de l’avancée urbaine qui s’est opérée ici. Le champ de Monseigneur l’Evêque a fait, au bénéfice de la bourgeoisie montante, le lit du nouveau « beau-quartier ».
Ci-dessus : inaugurée en 1869, maison créée par Melchior Casimir Gorguos, contrôleur des contributions, arrière-petit-fils de Me Géraud Baillé et neveu de Frédéric Soulié. La maison fait face à l’ancienne demeure de la famille Baillé, située de l’autre côté du cours et dotée d’une entrée principale rue Maréchal Clauzel. Cf. La dormeuse blogue 3 : A Mirepoix – Moulon de… la porte d’Aval, rue Courlanel, le Grand Couvert, place Saint Maurice et grande place – n°215 à 231.
Ci-dessus : initiales de Melchior Casimir Gorguos et date d’inauguration de la maison.
Ci-dessus : peu avant le débouché du cours Chabaud sur le cours Maréchal de Mirepoix, maison d’architecte, datant, dirait-on, des années 1930.
Concentrées à la hauteur du petit Couvert et de la cathédrale, les belles maisons bourgeoises se font plus rares à l’approche du cours du Maréchal de Mirepoix. Le beau-quartier se termine ici. Ses jardins, très clos, donnent sur la rue du 11 novembre. On peut là, comme les baladins, déambuler au long des jardins. Mais on ne verra dans cette rue discrète rien d’autre que des haies, des hauts murs, des portails, des grilles, et, revanche du promeneur impénitent, le clocher de la cathédrale par-dessus le tout.
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Liste des propriétaires des parcelles du moulon 20 du compoix mirapicien de 1766
1. Jacques Rivel, dit le Romain, teinturier : champ à Ramoundé
2. Me Jean Deloun, avocat au parlement : champ à Ramoundé
3. Jean Pierre Rivel, marchand : champ à Ramoundé
4. Jeanne Saurel, femme de Pierre Taillefer, dit Couzy, et veuve de François Arnaud : champ à Ramoundé
5. Marianne Bataille : champ à Ramoundé
6. Jacques Denat, bourgeois : champ à Ramoundé
7. Marianne Bataille : champ à Ramoundé
8. Me Jean Deloun, avocat au parlement : champ à Ramoundé
9. Marianne Bataille : champ à Ramoundé
10. Paul Combes, boulanger : champ à la Croix del Bastié
11. Me Jean Deloun, avocat au parlement : maison et autres couverts, aire, et terrain alentour de la métairie, jardin, champ et pré, le tout joignant le lieu dit de la Bourdette ou font del Bastié
12. Les Messieurs du Vénérable Chapitre de Mirepoix : couvert, aire et champ appelé Capitoul
13. Les Messieurs du Vénérable Chapitre de Mirepoix : champ au dit Capitoul
14. Dlle Louise Cabanié, supérieure de la maison des Nouvelles Catholiques : maison, jardin et champ à Capitoul
15. Monseigneur l’Evêque, l’Evêché : champ à Capitoul
16. Marie Rigail, veuve de Jean Garros : four de potier et jardin à Capitoul
17. François Vidal, cordonnier : jardin à Capitoul
18. Jean Pierre Gibelot, docteur en médecine : maison et 1 rusquet 1/8 jardin à Capitoul.
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Moulons de Mirepoix 1
Moulons de Mirepoix 2
Notes