Christine Belcikowski

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Aratos de Soles et la poésie des constellations

Rédigé par Belcikowski Christine Aucun commentaire

Le poète grec Ἄρατος ὁ Σολεύς, Aratus ou Aratos de Soles (ca -315, ca -245) a laissé dans le texte intitulé α' Φαινόμενα (Les phénomènes) une description des constellations qui est restée célèbre et qui continue d'inspirer le regard des astronomes et autres rêveurs célestes.

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Αὐτὸς γὰρ τά γε σήματ' ἐν οὐρανῶι ἐστήριξεν... « J'entreprends de décrire les astres, et de marquer les signes qu'ils nous présentent.

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Ci-dessus : hémisphère boréal avec représentation des constellations. Illustration tirée du Firmamemtum sobiescianum, sive uranographia de Johannes Hevelius, ou Jan Heweliusz 1611-1687), ouvrage imprimé en 1690 par Johannis Zachariae Stollii. Toutes les illustrations reproduites ci-dessous proviennent de cet ouvrage.

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Cette multitude d'étoiles semées çà et là dans la voûte céleste, est emportée avec elle chaque jour sans intermission par la révolution perpétuelle du ciel, sans que l'axe de ce mouvement change de place, pendant que la sphère étoilée tourne autour de la terre immobile au centre de l'univers. Des deux pôles qui sont les extrémités de l'axe, l'un est toujours invisible, l'autre qui lui est opposé, et du côté de borée, se tient toujours élevé au-dessus de l'océan. Autour de lui tournent ensemble les deux Ourses, qui pour cela ont été nommées Chariots, et dans le mouvement qui les entraîne, leurs têtes répondant réciproquement à leurs lombes, elles demeurent constamment renversées relativement l'une à l'autre, par l'opposition de leurs dos. S'il faut en croire la fable, elles ont été transportées de l'île de Crète au ciel par le grand Jupiter, qui voulut par cette faveur les récompenser de l'avoir nourri de leur lait une année entière pendant son enfance, sur l'odorant Dicta, près du mont Ida, dans la grotte où tes curètes l'avaient caché quand ils trompèrent Saturne qui le cherchait. L'une est la Cynosure, l'autre se nomme Hélice. Les Grecs observent l'Hélice dans leurs navigations, et les Phéniciens se dirigent par la Cynosure dans leurs voyages sur mer. L'Hélice est claire et paraît en plein dès le commencement de la nuit. L'autre est moins apparente ; mais les navigateurs la préfèrent, parce qu'elle décrit un cercle plus petit, et c'est pour cela que les Sidoniens la prennent pour guide. Le grand et monstrueux Dragon, comme un torrent sinueux, passe entre ces deux ourses, qui de chaque côté de ses replis, se tiennent au-dessus de l'océan azuré. Il les sépare en étendant sa queue sur l'une, et en se courbant sur l'autre : sa queue se termine à la tête de l'Hélice, et reçoit dans sa circonvolution la tête de la Cynosure, jusqu'aux pieds de laquelle il s'avance pour s'en détourner encore. L'étoile de sa tête n'est pas la seule brillante, car il en a deux aux tempes, deux aux yeux, et une autre est placée à l'extrémité de la mâchoire inférieure de ce serpent affreux. Sa tête penchée paraît se baisser vers le bout de la queue de l'Hélice. Les étoiles de sa gueule et de sa tempe droite, sont en ligne droite avec celle de sa queue, et sa tête s'incline vers le point où les levers et les couchers se touchent presque les uns les autres.

Près de là tourne aussi une figure qui ressemble à un homme en peine. On ne sait ni à quel sujet ni ce qu'il fait ; mais on l'appelle l'homme à genoux, parce qu'il a l'air d'être agenouillé pour son travail ; ses mains sont élevées jusqu'à ses deux épaules, et sont étendues et séparées par un intervalle de six palmes, et l'extrémité de son pied droit est au-dessus de la tête du Dragon tortueux.

Là est aussi la couronne dont Bacchus a fait le signe d'Ariane mourante. Elle tourne avec le ciel, placée au dos de l'homme représenté à genoux.

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Voyez, tout près de la tête de celui-ci, celle du Serpentaire Ophiuchus. Vous le distinguerez à l'éclat de ses épaules et de sa tête, qui paraissent même pendant que la lune est dans son plein. Ses mains ne sont pourtant pas aussi apparentes, car elles ne rendent qu'une faible lueur ; elles sont néanmoins visibles, parce qu'elles ne sont pas trop petites.

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Elles sont fatiguées de porter le Serpent, qui croise le Serpentaire. Celui-ci, debout sur le grand Scorpion, le foule sous ses pieds qu'il appuie sur son œil et sa poitrine, en tenant dans ses mains le Serpent, dont la moindre partie est dans sa droite, et la plus grande dans sa gauche, et dont la mâchoire supérieure atteint la couronne. Sous cette circonvolution cherchez les grandes Serres : elles sont sans éclat et sans lustre. Derrière l'Hélice marche Arctophylax, le conducteur de l'ourse, semblable à un cocher. On l'appelle Boôtes, Bouvier, on le voit toucher le char de l'Ourse. Il est tout entier fort apparent. Au-dessous de sa ceinture brille l'étoile Arcturus, de plus d'éclat que toutes les autres de cette constellation. Voyez sous les deux pieds du Bouvier, la Vierge qui porte dans ses mains l'épi resplendissant, soit qu'elle fût fille d'Astrée, que l'on dit avoir été le père des astres, soit qu'elle ait eu un autre père, nous la laisserions sans en parler davantage ; mais une autre tradition répandue parfois la fait regarder comme ayant autrefois vécu familièrement sur la terre dans la société des hommes et des femmes, quoiqu'elle fût immortelle. On la nommait Justice ; elle rassemblait les vieillards, ou sur une place publique ou dans tout autre endroit en plein air, et leur enseignait avec soin les lois de l'équité. On ne connaissait pas encore les procès ruineux ni les aigres disputes, non plus que les dissensions. On vivait simplement ; on ne se hasardait pas sur la mer, et des navires n'allaient pas au loin chercher des aliments pour les rapporter. Les bœufs et les charrues suffisaient pour la nourriture des hommes, et la Justice qui régnait sur eux leur distribuait avec abondance tous les biens dont ils avaient un véritable besoin. Elle resta parmi eux aussi longtemps que l'âge d'or dura sur la terre. Elle ne s'y montra plus que rarement dans l'âge d'argent, et encore n'allait-elle pas en tout lieu ; elle ne s'arrêtait qu'où elle retrouvait les mœurs antiques. Elle ne quitta pas encore la terre pendant tout ce siècle ; mais au coucher du soleil elle descendait seule des montagnes, séjours des échos, et ne s'adressait à personne par des discours flatteurs ; mais dans les populeuses habitations des hommes, elle leur reprochait leur méchanceté : je ne viendrai plus, leur disait-elle, quand vous m'appellerez. Ah ! Combien est corrompue cette génération, que vos pères de l'âge d'or ont laissée après eux ! Vous en laisserez une qui sera pire encore que vous-mêmes. Alors naîtront les guerres, le sang des humains coulera, les peines et les chagrins se joindront à ces maux. En parlant ainsi, elle retournait à ses montagnes. Cependant en s'éloignant, elle attirait encore les regards des peuples qu'elle quittait. A ceux-ci après leur mort succédèrent ceux de l'âge d'airain, plus méchants que leurs devanciers. Ils furent les premiers qui forgèrent l'épée meurtrière, et qui mangèrent les bœufs laboureurs. La Justice indignée contre les hommes de cette race, s'envola au ciel, où elle fixa son séjour, et on l'y voit encore toutes les nuits, proche du Bouvier éclatant.

Au-dessus de ses deux épaules, tourne avec le ciel, une étoile qui est à l'aile droite, on l'appelle l'avant-coureur de la vendange ; elle égale en grandeur et en éclat celle de la queue de la Grande Ourse, car elle brille bien vivement, ainsi que les étoiles voisines que l'on voit sans les chercher beaucoup, telle est la belle et grande étoile qui est devant les pieds, une autre sous les épaules, une autre plus bas aux reins, une autre sous les genoux, en arrière, et plusieurs autres petites et sans nom sont répandues çà et là de tous côtés. Les Gémeaux ont leurs têtes vers celle de la Grande Ourse, sous le milieu de laquelle est le Cancer, et sous ses deux pieds paraît le lion, où le soleil est au plus brûlant de sa course ; car les campagnes se dépouillent de leurs moissons, quand le soleil commence à parcourir le signe du Lion. Les vents étésiens se précipitent en grondant sur la vaste mer ; on ne peut plus naviguer avec la rame ; il faut de grands navires, que les pilotes aient à gouverner contre le vent.

Si vous voulez ensuite considérer le Cocher et ses étoiles, il faudra observer aussi sa Chèvre et ses Chevreaux, qui souvent ont vu les hommes battus par les tempêtes sur la sombre mer. Vous le trouverez tout entier, grand et accroupi, à gauche des Gémeaux, vis-à-vis de l'extrémité de la tête de l'Hélice. Sur son épaule gauche repose la chèvre sacrée, que la fable dit avoir nourri Jupiter de sa mamelle. Les poètes l'appellent chèvre scapulaire de Jupiter. C'est une grande étoile brillante ; mais les Chevreaux qui sont dans sa main paraissent avec moins d'éclat.

Près des pieds du Cocher, s'avancent les cornes du Taureau bien reconnaissable aux marques qui distinguent sa tête, qu'on ne peut mieux désigner que par les étoiles qui sont de chaque côté, et dont les noms sont bien connus ; car qui n'a pas ouï parler des Hyades répandues sur son front ? Une seule étoile fait la pointe de sa corne gauche, voisine du pied droit du Cocher. Ces deux signes vont ensemble dans le mouvement du ciel ; mais le Taureau étant plus bas que le Cocher, se couche toujours avant lui, quoiqu'il se lève en même temps.

N'omettons pas la famille de Céphée, fils d'Iasus. Leur nom est aussi parvenu au ciel, car ils étaient les proches de Jupiter. Céphée est placé derrière l'Ourse Cynosure, dans l'attitude d'un homme qu’étend les deux mains. La ligne tracée de l'extrémité de la queue à ses pieds, est égale à celle de l'intervalle des pieds, et en allant un peu au-delà de la ceinture, vous voyez la première circonvolution du Dragon.

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Devant Céphée tourne avec le ciel la malheureuse Cassiopée, qui paraît à peine dans une nuit éclairée par la lune, car les étoiles peu nombreuses dont elle est parsemée ne la font pas beaucoup apercevoir, celles de ses étoiles qui sont comme les deux moitiés d'une traverse qui tient une porte fermée en dedans, représentent ses bras étendus et élevés de chaque côté, comme si elle déplorait le sort de sa fille.

Là en effet tourne avec elle la triste Andromède, représentée sous sa mère. Vous n'aurez aucune peine à la distinguer la nuit, tant sa tête est brillante, ainsi que chacune de ses épaules, l'extrémité de ses pieds, et toute sa ceinture ; ses bras sont étendus, et des chaînes attachent encore, même dans le ciel, ses mains toujours écartées l'une de l'autre. Au-dessus de sa tête tourne le grand Cheval qui la touche presque de l'extrémité de son ventre, par une étoile qui leur est commune, et brille au sommet de la tête de l'une et au nombril de l'autre. Il en a trois autres belles et grandes au flanc et aux épaules, placées à des distances égales ; mais sa tête n'est pas aussi belle, non plus que son cou, quoique fort long ; et pourtant la dernière étoile de sa mâchoire est aussi éclatante que ces quatre premières, toute brillantes qu'elles sont. Il n'a pas ses quatre pieds, car ce cheval sacré est coupé par le milieu au nombril. On dit qu'au haut de l'Hélicon, il a fait sortir la fontaine d'Hippocrène, car auparavant cette montagne était sans eau. Le Cheval la frappa de son pied de devant, et ce coup en fit aussitôt jaillir une source que les bergers les premiers appelèrent Hippocrène ; elle sort d'un rocher, on la voit non loin des habitants de Thespie ; mais le Cheval est au ciel, où on le voit tourner avec lui. Là s'exécutent aussi les mouvements rapides du Bélier, qui parcourant de plus grands cercles, ne va pas moins vite que l'Ourse Cynosure. Il n'a pas d'étoile assez vive pour le faire apercevoir quand la lune luit ; mais vous pourrez le trouver en le cherchant près de la ceinture d'Andromède, car il n'en est pas éloigné. Il coupe la vaste étendue du ciel par le milieu, où circulent les extrémités des Serres et la ceinture d'Orion.

Une autre constellation proche d'Andromède, figurée en delta par ses trois étoiles, forme trois côtés, dont deux paraissent égaux, mais non le troisième. Elle est très aisée à trouver, car ses étoiles sont plus apparentes que bien d'autres. Celles du Bélier sont un peu plus australes, mais celles-là le précèdent.

Avant lui passent aussi, mais plus vers le sud, les Poissons dont l'un est toujours plus austral, le plus boréal après l'autre. Chacun part des liens qui, attachés à leurs queues, se réunissent en une seule grande et belle étoile qu'on appelle leur nœud.

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L'épaule gauche d'Andromède marque le Poisson boréal, car elle en est très voisine. Ses pieds désignent Persée, son époux, avec les épaules duquel ils marchent, mais il est plus boréal que les autres constellations du zodiaque, et sa main droite s'étend vers la chaise de sa belle-mère. Il avance les pieds comme s'il poursuivait quelqu'un dans les maux qu'il souffre de Jupiter son père.

Près de lui et sous son genou gauche, les Pléiades vont en groupe, et, dans le peu d'espace qu'elles occupent, elles sont peu apparentes, mais célèbres parmi les hommes, au nombre de sept, quoiqu'il ne s'en voie que six ; mais nous n'avons jamais ouï dire qu'il s'en soit perdu quelqu'une que nous ne connaissions plus : c'est donc une erreur. Ces sept étoiles sont appelées encore Alcyone, Mérope, Caeléno, Électre, Stérope, Taygète et Maïa. Elles sont petites et peu brillantes, mais elles passent le matin et le soir, quand, par l'ordre de Jupiter, elles montrent l'été et le commencement de l'hiver, et l'approche du labourage.

L'écaille de la Tortue est petite et auprès du berceau de Mercure. Il en a fait une lyre, et, en la transportant au ciel, il l'a placée devant la figure du malheureux qui, en étendant ses jambes, s'en approche par son genou gauche, ainsi que de l'Oiseau par le sommet de sa tête, entre laquelle et le genou de l'homme, elle est fixée. Cet oiseau paraît voler près d'elle dans le ciel, mais sans éclat, car ses ailes ont quatre petites étoiles assez sensibles pourtant, et ce vol tranquille se dirige vers l'opposé de la queue, en étendant l'aile droite jusqu'auprès de la main droite de Persée, et l'aile gauche jusqu'au sabot du Cheval dans son galop, les Poissons occupant les deux côtés. Près de la tête de ce Cheval, s'étend la main droite du Verseau, qui s'élève derrière le Capricorne. Mais celui-ci est plus avancé vers l'endroit où le soleil retourne sur ses pas.

Vous ne ferez pas, pendant ce mois, beaucoup de chemin en un jour sur la mer orageuse, car les jours sont alors les plus courts, et le jour ne se lèvera pas assez promptement pour l'homme effrayé pendant la nuit, quoiqu'il l'appelle à grands cris. Les vents dangereux du midi se précipitent, lorsque le soleil se lève avec le Capricorne ; alors le froid tombe du ciel avec plus de violence sur le nautonier. La mer cependant s'obscurcit tous les ans sous les navires, d'où souvent, pendant que nous sommes assis au milieu des flots, comme des plongeons enfoncés dans les eaux, nous tournons les yeux vers le rivage ; mais ils sont encore éloignés, et une simple planche nous sépare de la mort. Après avoir beaucoup souffert de la tourmente pendant le premier mois, quand le soleil échauffe l'arc et celui qui le tient, rentrez dans le port, pour ne plus rester exposés à ces maux pendant les nuits. Vous reconnaîtrez cette saison et ce mois au Scorpion, qui se lèvera à la fin de la nuit. Le Sagittaire bande son grand arc, en s'efforçant d'en approcher les deux extrémités vers le milieu. Mais le Scorpion le précédant par son lever, monte immédiatement après lui, alors que la tête de la Cynosure est à son point le plus élevé, à la fin de la nuit ; Orion tout entier se couche avant le jour, et Céphée ne se montre que depuis la main jusqu'aux reins.

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Plus loin est une autre flèche qui n'a pas été lancée par un arc. Le Cygne vole près d'elle, mais il est plus boréal. On a nommé Aigle un autre oiseau proche de lui et moins grand. Il est orageux en sortant de la mer, à la fin de la nuit.

Le Dauphin, de médiocre grandeur, est voisin du Capricorne ; il est obscur en son milieu, mais il est entouré de quatre étoiles brillantes, de deux qu'on lui ajoute, et de deux autres qui courent tout près de lui.

Ces étoiles sont répandues entre le pôle boréal et la route du soleil ; mais il en est plusieurs autres qui se lèvent entre elle et le pôle austral.

Orion va obliquement au-dessous de la section du Taureau. On ne manquera pas de l'apercevoir bientôt, en contemplant le ciel dans une nuit sereine, lorsqu'il passe au haut du ciel. Tel paraît aussi le Chien qui le garde, placé derrière son dos plus élevé. Il est fort varié, n'étant pas également éclatant sur tout son corps, car son ventre est obscur, mais l'extrémité de sa mâchoire remarquable à une étoile ardente que les hommes appellent Sirius. Quand il se lève avec le soleil, les arbres ne peuvent éviter la violence de ses feux, leurs feuilles se dessèchent, et il pénètre vivement au travers de leurs fibres, durcissant les uns, et dépouillant les autres de leur écorce, et nous éprouvons son ardeur même quand il se couche. Les autres étoiles marquant ses membres brillent autour de lui, mais d'une lumière plus faible.

Le Lièvre, sous les deux pieds d'Orion, est sans cesse poursuivi par le chien Sirius, qui se lève à sa suite comme pour courir après lui, en se levant quand le Lièvre se couche.

A la queue du grand Chien succède le vaisseau Argo, qui est tiré par la poupe, car sa marche n'est ordinaire, puisqu'il vogue en arrière, comme les navires dont les nautoniers tournent la poupe vers le port, quand on les remorque, et il touche bientôt la terre en rétrogradant ; c'est ainsi que le vaisseau Argo de Jason est remorqué par la poupe. Il est obscur et sans étoiles à l'endroit où le mât s'élève de la proue, mais il est apparent partout ailleurs, et son gouvernail s'approche des pieds postérieurs du Chien qui court devant lui.

La grande Baleine arrive ensuite pour dévorer Andromède quoique éloignée, car celle-ci est emportée obliquement au vent borée de Thrace, et le midi envoie contre elle ce monstre placé sous le Bélier et les Poissons, et au-dessus du fleuve étoilé. Ce fleuve est une partie de l'Eridan qui coule avec ravage sous les pieds des dieux, et s'étend jusqu'au pied gauche d'Orion ; les deux liens qui partent des queues des Poissons passent avec lui, réunis par un nœud derrière le dos de la Baleine, à laquelle ils se terminent par une étoile placée à sa première nageoire.

Des étoiles de médiocre grandeur et de peu d'éclat occupent l'intervalle du gouvernail et de la Baleine, et celles qui tombent sous les flancs du Lièvre sont sans nom, parce qu'elles ne présentent aucune ressemblance de membres, dont on puisse composer une figure. On ne les a pas distinguées toutes les unes des autres, car ne pouvant leur donner à chacune un nom particulier, tant elles sont nombreuses, égales la plupart en grandeur et en couleur, et toutes courant ensemble, on a imaginé de montrer les étoiles groupées dans un ordre tel, que celles qui sont voisines les unes des autres formassent des images propres à recevoir de certains noms. On voit communément, sans y faire attention, une étoile se lever, mais on remarque plus particulièrement celles qu'on a distinguées par des configurations. Voilà pourquoi les étoiles qui sont au-dessous du Lièvre poursuivi, étant obscures, passent sans qu'on les remarque, n'étant pas distinguées par des noms particuliers.

Au dessous du Capricorne, nage contre la Baleine, sous le vent du midi, le Poisson, distingué des premiers parce qu'il est seul, c'est pourquoi on l'appelle austral.

D'autres étoiles sous le Verseau, sont suspendues entre la Baleine céleste et ce Poisson, mais faibles et sans nom ; et auprès d'elles, à droite du Verseau brillant, comme un courant d'eau, roulent éparses çà et là de petites étoiles agréables à voir. Deux entre toutes paraissent plus fortes, ni trop proches, ni trop éloignées ; l'une belle et grande est sous les pieds du Verseau, l'autre sous la queue de la Baleine ; toutes ces étoiles font partie de cette eau. D'autres plus petites au-delà des pieds antérieurs du Sagittaire tournent avec la couronne sous l'ardent aiguillon du Scorpion monstrueux, est suspendu au midi un autel à brûler de l'encens ; il ne paraît s'élever vers les Ourses, que pendant très peu de temps, vis-à-vis d'Arcturus, mais loin au-dessus de lui cet autel se replonge plus vite le soir dans la mer. La nuit éternelle a donné dans cet autel aux hommes dont elle plaint le sort, un signe certain de la tempête sur mer. Alors sur le point de périr, ils travaillent à se tirer du danger. Arcturus leur apprend encore à la prévoir par d'autres signes : ne désirez pas de voir cet astre, seul au milieu des nuées qui cachent tous les autres ; mais qu'il soit plutôt couvert lui-même du nuage qui l'enveloppe ordinairement, quand le vent de borée commence à souffler en automne, car souvent cette obscurité favorable aux malheureux navigateurs, leur envoie ce vent pour chasser celui du midi. S'ils profitent d'une annonce si favorable, tout leur devient facile, et s'ils ont encore à travailler, ce n'est plus que légèrement. Mais si tout-à-coup la violence du vent jette le vaisseau en haute mer, et embrouille toutes les voiles, dès lors ils flottent au hasard ; ou bien après la chute du vent abattu enfin malgré sa force, par la pluie que Jupiter accorde à leurs prières, ils se revoient avec joie les uns les autres sur leur vaisseau, délivrés des maux qu'ils ont soufferts. Redoutez donc le vent du midi quand il accompagnera la vue de ce signe, tant que vous ne sentirez pas le vent du nord venant pour le chasser.

Mais si l'épaule du Centaure est au milieu du ciel à égales distances de la mer occidentale et de celle où il a commencé à se lever, et si elle n'est couverte que d'un léger nuage, et que la même obscurité se montre avec l'autel brûlant, alors sans vous inquiéter du vent du midi, prenez garde au vent d'est. Vous trouverez cet astre sous deux autres, l'un desquels qui est sous le Scorpion, ressemble à un homme, et l'autre qui est sa partie postérieure et la croupe d'un cheval, est sous les Serres. L'homme a l'air de tendre la main droite opposée à l'autel, et de l'autre il saisit une bête féroce à laquelle on n'a pas donné originairement d'autre nom.

Loin de lui tourne une autre constellation qu'on nomme l'Hydre, elle serpente au loin. Sa tête est sous le milieu du Cancer, sa sinuosité sous le corps du Lion, et sa queue au-dessus du Centaure, Une coupe est posée sur le milieu de son repli, et au haut est perchée une figure de Corbeau qui le mord. Sous les Gémeaux brille Procyon, le précurseur du grand chien. » (1)

1. Sources :
Texte grec : Bibliotheca Augustana. Φαινόμενα.
Traduction française : Philippe Remacle. L'antiquité grecque et latine. Les Phénomènes d'Aratus de Soles.

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