Le goût du froid d’hiver

Le goût du froid d’hiver
a plus d’un tour dans ses fontes.
il tient de l’odeur,
celle du bois qu’on brûle dans les cheminées,
celle de la fumée qu’on respire,
partout dans Mirepoix,
quand on descend, la nuit,
du dernier autobus.
Le goût du froid d’hiver
tient aussi de l’odeur du charbon
qu’on brûlait naguère dans les poêles
et qu’un homme noir, noir de suie,
qui faisait peur aux enfants,
venait verser par un soupirail
dans les caves des immeubles.
On retrouve bizarrement ce goût du froid d’hiver,
partout en Asie du Sud-Est,
quand on marche au bord des trottoirs
encombrés de braseros,
et qu’on hume…
et le parfum subtil des soupes
que mijote la cuisinière du restaurant de rue,
oh ! le parfum étoilée du phở !
et l’odeur ferreuse du charbon,
oh ! l’odeur ferreuse du charbon !
Le goût du froid d’hiver tient encore
du feuilleté de givre
qui craque sous le pied du passant,
au col remonté,
et qui découvre l’eau du ciel dans la flaque,
ou une herbe,
poussée entre deux pavés.
Le goût du froid d’hiver tient,
certains matins,
de la couleur incolore de l’air,
diaphane ou coton,
ni plume ni plomb,
qu’on perdrait son temps
à vouloir saisir,
à toucher du doigt
ou encore à peindre.
Le goût du froid d’hiver
a plus d’un tour dans ses fontes.
Magie des correspondances.
Les goûts,
les parfums, les couleurs et les sons,
comme dit l’autre,
se répondent.