A Pamiers, salle Espalioux – Ayuko Miyakawa et Sandrine Deumier font Signes

Les SigneS sont dans la ville, témoin cette « sucette », installée au bord du canal. Ils font l’objet de l’exposition actuellement proposée à Pamiers, salle Espalioux, par Ayuko Miyakawa et par Sandrine Deumier, à l’initiative de l’association Mille Tiroirs.
 
Emis par deux artistes issues d’horizons différents – la calligraphie d’un côté, le multimédia de l’autre -, mais semblablement engagées dans l’action auprès de publics nouveaux – passants de la rue Gabriel Péri 1Cf. La Dépêche : Pamiers. Des ateliers pour colorer la rue Gabriel-Péri ; video gamers et autres vidéophages, terriens, marins et ultra-marins 2Cf. Sandrine Deumier, Biographie., les signes scintillent ici dans le bougé du rapport que l’art entretient avec la manière, – les uns tracés au tube de colle, qui font sur le papier comme la bave transparente d’un chemin d’escargot, les autres tout en pixels et clics de souris, ou encore fondus dans l’indifférente matérialité d’une forme modélisée, et d’abord exhibés dans la valence pink du concept.

 

 

Du rose d’Ayuko Miyakawa au pink de Sandrine Deumier, la couleur déploie l’énigme de sa valence, entre sens et non-sens, célébration et dénonciation. L’énigme de la couleur, quand il s’agit du rose, s’articule ici par effet d’ironie objective, de façon ostensible en tout cas chez Sandrine Deumier, avec celle du Féminin.

 

 

Les enfants d’une école sont venus aujourd’hui avec leur maîtresse visiter l’exposition SigneS. J’eus été curieuse d’écouter ce qu’ils disaient. J’y ai par discrétion renoncé.

 

Prise par le mouvement dans lequel s’emporte d’une peinture à l’autre le geste calligraphique de Ayuko Miyakawa, je n’ai pas noté les titres de ces peintures. J’ai été frappée en revanche par le jeu de cache-cache que l’artiste entretient avec la tradition de l’ukiyo-e 3Ukiyo-e : image du monde flottant, ou éphémère ; genre de l’estampe japonaise, né au XVIIe siècle..

 

D’abord explicite, comme on peut voir sur les photos ci-dessus, la référence à l’ukiyo-e, s’abîme bientôt chez Ayuko Miyakawa dans les turbulences d’un geste qui explore désormais le secret de ses propres fantômes. Elle rejoint par là cependant, de façon qu’on n’attend pas, la part sombre de l’oeuvre d’Hokusai, celle des Cent histoires de fantômes (Hyaku monogatari).

 

Ci-dessus, de gauche à droite : Hokusai, Le fantôme Kohada Koheiji ; Hokusai, Le fantôme d’Oiwa.

 

Ci-dessus : Hokusai, La maison des assiettes.

 

Ci-dessus : Ayuko Miyakawa, détail.

 

Ci-dessus : Ayuko Miyakawa, détail.

 

Ci-dessus : Ayuko Miyakawa.

 

Ci-dessus : Ayuko Miyakawa.

De quoi, chez Ayuko Miyakawa, le jeu du rose et du noir, ou plus encore celui de la modernité et de la tradition, est-il le signe ? Signe de la redevance, de la conjuration, ou de la revanche du fantôme ? Signe de la visibilité à quoi prétend dans l’oeuvre de l’art la part de l’insigne ?

 

Nourri par le bruit du monde contemporain, l’insipide saturation de la galaxie Mac Luhan, le travail de Sandrine Deumier se réclame, quant à lui, de l’esthétique du sur-signe. Il emprunte ses figures et ses mots indifféremment au cinéma, à la BD, aux mangas, aux jeux vidéos, aux séries TV, aux reality shows, et cependant qu’il accuse la pauvreté de l’univers de communication dans lequel le message, c’est le médium, il la dénonce, et il en détourne ostensiblement les codes au profit d’une sorte de poésie critique, à la fois acerbe et secrètement généreuse sans doute. La pétition post-féministe va sans dire. Je n’insiste pas.

 

Ci-dessus : Sandrine Deumier, With Love.

 

Ci-dessus : Sandrine Deumier, With Love.

 

Ci-dessus, de gauche à droite : Jean-Claude Forest, Barbarella, 1962 ; Roger Vadim, Barbarella, 1968.

 

Ci-dessus : Sandrine Deumier, With Love.

 

Ci-dessus : Georges Wolinski, 50 ans de dessins à la BnF.

 

Ci-dessus : Sandrine Deumier, With Love.

 

Ci-dessus : Warren Ellis et Facundo Percio, Anna Mercury, 2008.

 

 

De quoi, chez Sandrine Deumier, le pink est-il le signe ? J’eus été curieuse, comme je le disais plus haut, de savoir ce que les petits enfants du siècle en pensaient. On peut voir et lire les vidéo-poèmes de Sandrine Deumier sur son site web.

 

Ci-dessus, de gauche à droite, détails roses : chez Ayuko Miyakawa ; chez Sandrine Deumier.

Le charme inattendu d’un bijou rose et noir… Il s’agit d’un mot de Baudelaire à propos du portrait de Lola de Valence par Manet. On repense à ce mot autrement après avoir vu les travaux de Ayuko Miyakawa et de Sandrine Deumier à l’exposition SigneS.

L’exposition SigneS dure jusqu’au 20 octobre 2012.
Salle Espalioux, rue Jules Amouroux à Pamiers
Mardi, mercredi vendredi, de 14h à 18h ; samedi, de 10h30 à 13h. Entrée libre.

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