Ci-dessus : « Et toi ? tu es capable de faire le grand écart ? »
J’ai découvert que les Québecquois disent électrolivre là où nous disons ebook, ou livre numérique. J’aime bien cette façon de nommer le livre, comme il va à l’ère de la technologie électronique. Car c’est bien du livre qu’il s’agit là, du livre toujours !
Qu’est-ce qu’un livre, sinon un « assemblage d’un assez grand nombre de feuilles portant des signes destinés à être lus » (Roland, éd. J. Bédier, circa 1100). On parle aujourd’hui de pages plutôt que de feuilles, mais on tourne les pages de l’électrolivre comme on tourne les pages des vieux livres, et grosso modo, dans le domaine du livre comme ailleurs, nihil novi sub sole, rien n’a changé sous le soleil.
A une exception près. Les pages de l’electrolivre ne comportent pas de numéros, ou si elles en comportent, ceux-ci ne servent à rien. Leur découpe en effet est mouvante, car elles doivent s’adapter aux dimensions variables des écrans des liseuses électroniques (en anglais, readers, ou e-readers), ainsi qu’au style et à la taille des polices qu’on peut faire varier à sa convenance.
On ne corne plus la page quand on quitte sa lecture, mais on quitte simplement sa liseuse, et lorsqu’on y revient, celle-ci s’ouvre directement à la page que l’on a précédemment quittée. Et si, au cours de sa lecture, l’on veut corner plusieurs pages, on les marque chaque fois d’un signet, de telle sorte qu’on peut y revenir à l’occasion de la lecture suivante.
On ne souligne plus les phrases ou les passages qu’on aime, mais on les surligne électroniquement, et l’on peut y revenir pareillement à l’occasion de la lecture suivante. Et comme chaque liseuse va de pair avec une application jumelle sur l’ordinateur, on synchronise, et l’on retrouve ainsi les phrases ou les passages qu’on aime, tout chauds sur son ordi préféré. On peut ensuite, au cas où l’on y tiendrait, imprimer ces phrases ou ces passages à partir de l’ordi en question. Je n’imprime jamais, quant à moi, car je suis partisan du zéro papier ?.
L’électrolivre doit son nom à la technologie du papier électronique (en anglais, e-paper) qui utilise la lumière ambiante pour afficher le texte sur l’écran de la liseuse. Il s’agit de la technologie électrophorétique ou de sa variante E Ink :
« Le composant primaire est une microcapsule qui contient des particules blanches chargées positivement et des particules noires chargées négativement. Lorsque, via un circuit imprimé semi-conducteur, on applique un champ électrique négatif, les particules blanches se placent sur une extrémité de la capsule et les noires sur l’autre. En plaçant des millions de ces capsules sur une surface et en les commandant par des champs électriques, on peut générer une image en 2 couleurs. Par simple adjonction d’une matrice de filtres on obtient une version couleur (4 096 couleurs). Le système peut avoir 4 champs électriques pour chaque microcapsule permettant d’avoir 4 niveaux de gris : 100 % blanc ; 75 % blanc et 25 % noir ; 50 % blanc, 50 % noir ; 25 % blanc, 75 % noir et 100 % noir. Ce système est bistable, une seule impulsion de polarisation suffit à définir si le pixel est « allumé » ou non. ((Wikipedia. Article Papier électronique.))
« Contrairement aux écrans rétro-éclairés des ordinateurs, l’encre électronique ne nécessite pas d’énergie pour laisser un texte affiché. La source d’énergie n’est ici utilisée que lors du chargement de pages afin de polariser les microparticules, ce qui confère à la liseuse une autonomie conséquente pour des affichages fixes prolongés. De plus, elle utilise la lumière ambiante de la même manière que le papier, pour un confort visuel optimal » ((Encre électronique.)).
Une seule charge de batterie dure jusqu’à six semaines, à raison d’une demi-heure de lecture par jour, avec la connexion sans fil désactivée et la luminosité réglée sur 10. Contrairement aux écrans réfléchissants des ordinateurs et des tablettes, l’écran des liseuses demeure sans reflets, même au soleil, et au bord de l’Hers par exemple. L’éclairage frontal intégré diffuse la lumière vers la surface de l’écran et non vers les yeux, ce qui permet de lire confortablement, même la nuit, sans recourir à aucune source de luminosité externe.
Ci-dessus : si la liseuse de Leibniz au Paradis m’était contée…
Le seul problème à l’heure actuelle, si toutefois l’on est adepte de l’électrolivre, c’est que les électrolivres vendus par les modernes éditeurs français sont trop chers, beaucoup trop chers, et affligés de DRM (en anglais, Digital Rights Management).
Il faut savoir qu’à la différence du livre, on ne devient pas propriétaire de l’électrolivre que l’on vient d’acheter, mais seulement titulaire d’un droit d’usage de ce dernier. Les DRM sont, dans ce cas de figure, des sortes de verrous numériques qui visent à encadrer, sinon à restreindre ce droit d’usage. Impossible de prêter à autrui un électrolivre assorti de DRM. Impossible de lire ce même électrolivre assorti de DRM sur une liseuse autre que celle qui supporte le format de fichier prescrit par la marque de cette dernière. Une liseuse Kindle lit les formats mobi, azw3, txt, docx, html et pdf. Une liseuse Sony lit les formats BBeB Book ou epub, txt, rtf et pdf. La liseuse Kobo lit les formats epub, mobi,txt, rtf, docx, html et pdf. La liseuse Pocket Book lit les formats epub, mobi, txt, djvu, rtf, docx, html et pdf.
Heureusement l’électrolecteur dispose d’une foule d’électrolivres libres de droits, car issus du fonds de littérature entré dans le domaine public. Il s’agit là des livres dont l’auteur est décédé depuis 70 ans, ou depuis 100 ans si l’auteur en question est mort pour la France ((Pour plus de détails sur la durée de protection de la propriété intellectuelle, cf. Légifrance.)). Les oeuvres de Guillaume Apollinaire sont entrées ainsi dans le domaine public le 29 septembre 2013. Le site InlibroVeritas publie une liste – non exhaustive, on s’en doute ; il y en a trop ! – des auteurs qui ressortissent désormais au domaine public.
De nombreux sites proposent au téléchargement une riche collection d’électrolivres gratuits, dont, entre autres Project Gutenberg, Ebooks libres et gratuits, et Gallica. Cliquez sur les liens qui suivent pour consulter la liste des électrolivres téléchargeables sur Project Gutenberg (formats epub, mobi, txt) , sur Ebooks libres et gratuits (formats epub, mobi, pdf) et autres sites sites partenaires, ou sur Gallica (format epub).
Ci-dessus, de gauche à droite : 1. Leibniz. Extrait des Principes de la nature et de la grâce (1714) ; 2. Apollinaire. « Tristesse d’une étoile » ((Blessé d’un éclat d’obus à la tempe droite le 17 mars 1916, Guillaume Apollinaire subit le 9 mai une trépanation. « Une étoile de sang le couronne à jamais. » Il meurt de la grippe espagnole, à l’âge de trente-huit ans, le 9 novembre 1918.)). Extrait des Calligrammes et Poèmes de la paix et de la guerre (1913-1916). Cliquez sur l’image pour l’agrandir.
L’électrolecteur peut aussi créer ses propres électrolibres lui-même. La démarche est simple, si l’on dispose sur son ordinateur d’un logiciel d’édition (Libre Office, Pages sous Mac, ou autres logiciels encore) qui comprend la fonction « Enregistrer au format epub ». A partir du texte source, qu’on ouvre dans l’un ou l’autre des programmes d’édition mentionnés ci-dessus, on définit le titre, le sous-titre, ainsi que les titres de chapitres afin de de pouvoir créer une table des matières ; on ajoute une image sur la page de titre afin de pouvoir créer une page de couverture ; et l’on exporte le tout au format epub ((Pour plus de renseignements, me contacter.)).
Ci-dessous, deux couvertures d’électrolivres fabriqués par mes soins :
Ci-dessous, deux tables des matières fabriquées par mes soins :
Ci-dessus : Ovide. Les Pontiques.
Ci-dessus : Christine Belcikowski. Du vif de l’herbe.
Créez vos propres électrolivres. C’est la liberté !
A lire aussi sur La dormeuse blogue 3 : Bιβλίον, volumen, bouquin, ebook – Qu’importe le flacon…
je ne manquerai pas de te contacter !
Bonjour,
Qui a dit que le français était devenu archaïque? pas un canadien en tout cas!
Merci pour ces explications.
Amités
Evelyne
merci Christine pour ce travail de fond, je peu ajouter de mon seul histoire que le piège de se publier en électrolivre consiste de ne pas avoir fait un écart assez longue entre écriture et publication, due au facilité et impatience. On lisant un électrolivre de 2012 je rougis et je m’on occupe avec le re-écriture – et ça peut être répéter jusqu’au fin de mes jours…