Il y a d’abord des mots,
des mots qui flottent
quelque part dans ma pensée,
comme des bourres de peuplier
sur la rivière,
comme des nuages blancs
dans le bleu du ciel.
Il y a d’abord des mots…
Je le dis ainsi par souci d’à peu près,
car il s’agit là plutôt de riens d’étant,
de riens sensibles pourtant
dans le flux et reflux de la pensée,
de riens « sensibles comme le bruit d’un coquillage au fond de la mer. »
Sensible comme le bruit d’un coquillage au fond de la mer…
Ωσπερ λέγομεν αίσθητον είναι το έν τώ βυθώ όστρακον… ((Philopon. Aristotelis Analytica priora commentaria, p. 169 1. 21. Edition M. Wallies. Preussische Akademie der Wissenschaften. Berlin, 1905.))
J’aime cette phrase de Philon d’Alexandrie (vers -20 – vers 45) ((Philon d’Alexandrie, en grec Φίλων ὁ Ἀλεξανδρεύς, en hébreu ידידיה הכהן (Yedidia Hacohen), est un philosophe juif hellénisé, contemporain des débuts de l’ère chrétienne.)),
que Philopon ((Jean Philopon, en grec Ἰωάννης ὁ Φιλόπονος, en arabe Yaḥyā al-Naḥwī, est un grammairien, philosophe et théologien chrétien de langue grecque, né sans doute à Alexandrie vers 490-495, mort après 568. Plusieurs de ses ouvrages ont été conservés, soit en grec, soit dans des traductions syriaques ou arabes.)), dit Jean le Grammairien,
rapporte dans ses commentaires d’Aristote.
Elle dit pour moi le bruit de fond
dont toute poésie se fait messagère
et dont elle prolonge depuis toujours,
à la fois proches et lointains,
les harmoniques sans commencement ni fin.