Guillaume Villeneuve, de Mirepoix, l’un des Vainqueurs de la Bastille

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Ci-dessus : La prise de la Bastille le 14 juillet 1789.

Il m’a plu de découvrir qu’un fils de Mirepoix a fait partie des Vainqueurs de la Bastille.

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Ci-dessus : 8 décembre 1760, acte de baptême de Guillaume Villeneuve à Mirepoix.

Baptisé le 8 décembre 1760, Guillaume Villeneuve est le descendant d’une famille de marchands, bien représentée dans les registres de Mirepoix. En 1791, demoiselle Jeanne Marie Mesplié, veuve de feu Antoine Villeneuve, marchand, tient maison et boutique n° 103 de la section A (n° 56 du moulon 3 ancien style) du moulon 3. Ce numéro est encore visible au bout du Grand Couvert, côté est, juste avant le coin de la rue Vigarozy. Antoine Villeneuve, autre fils de demoiselle Mesplié, tient maison et boutique au n° 96 de la section A (n° 74 du moulon 3 ancien style), aujourd’hui cours du Colonel Petitpied, à l’angle de la rue Jacques Fournier. Jeanne Marie Mesplié et Antoine Villeneuve viennent d’acheter ensemble, au titre des biens nationaux, l’ancien couvent des Trinitaires.

Guillaume Villeneuve, Vainqueur de la Bastille, livre un témoignage des plus intéressants concernant la prise de cette fameuse prison, car il rapporte l’événement de façon crûe, sans omettre les moments triviaux qui ont précédé l’heure de gloire et que l’histoire, devenue légendaire, a oubliés. Les « criminels ont forcé leurs cachots et égorgé leurs gardiens » les premiers, de telle sorte qu’avant de prendre d’assaut la Bastille, le peuple a dû tuer d’abord les « scélérats qui s’en évadaient ! L’ironie de l’histoire est terrible ici !

J’emprunte le témoignage de Guillaume Villeneuve à Charles Louis Chassin et Léon Hennet dans Les volontaires nationaux pendant la Révolution. Historique militaire et états de services du 19e bataillon de Paris, dit du Pont-Neuf, au 27e (bataillon de la Réunion), édition L. Cerf, Paris, 1899-1906.

VILLENEUVE (Guillaume), de Mirepoix, 32 ans.
Capitaine en premier, 16 septembre 1792 ; passé dans les Chasseurs de Cassel en avril 1793 ; retiré pour infirmités lors de la rentrée en France des malades et blessés 5e la garnison de Mayence, août 1793 ; chef du bureau de placement et réquisition à l’Agence de la Fabrication des Armes en août 1794 ; admis capitaine aux Invalides, 24 octobre 1795. Pensionné comme Vainqueur de la Bastille, 30 septembre 1833. Bien que n’étant pas chevalier de l’ordre, Villeneuve sollicita en 1832 la décoration d’officier de la Légion d’honneur pour services rendus à la ville de Paris dans la matinée du 13 juillet 1789 :

Je logeais alors proche le Palais de Justice, et comme dans l’après-midi je me rendais à l’Assemblée} à Sainl-Pierre-des-Arcis, aujourd’hui le Prado, pour l’organisation du district, un grand tumulte se manifesta au Châtelet, où le peuple fuyait de toutes parts et dans toutes les directions, à cause des criminels qui forçaient les cachots et égorgeaient leurs gardiens ; je me jetai aussitôt vers ce danger, suivi de trois gardes françaises et de quelques bourgeois, à qui mon dévouement inspira de la confiance.

En entrant au Châtelet, nous vîmes sept de ces scélérats dans la cour, armés de barreaux de fer ; nous nous précipitâmes sur les quatre premiers, qui en un clin d’oeil tombèrent sons nos coups, deux des autres furent assommés par les bourgeois, et pendant que les gardes françaises s’emparaient des guichets, le septième fut tué par un enfant d’un coup de pistolet qu’il avait appuyé sur mon épaule, mais, cette brusque explosion faite à mon oreille m’ayant fait perdre de vue la barre déjà lancée, je fus frappé à la poitrine, renversé et foulé aux pieds ; heureusement que je fus promptement reconnu et reporté sur les marches de Sainl-Pierre, où l’assemblée, quoique je fusse encore évanoui, me nomma capitaine commandant.

Le lendemain 14, les femmes du quartier s’établirent au corps de garde pour envoyer les hommes aux Invalides pour prendre des fusils ; nous en primes, en effet, ainsi qu’une pièce de canon dont l’affût vermoulu s’effondra à vingt pas de la grille. Je laissai une garde au canon, et à peine fûmes-nous de retour au poste que nos femmes nous servirent à manger dans la rue, et, sans nous donner aucun repos, elles nous envoyèrent au siège de la bastille. Je pris part à l’action el je fus sur place nommé lieutenant des Vainqueurs de la Bastille qui, quelques jours après, s’établirent à l’avancée, au corps de garde même des Invalides de la garnison. Je restai dans cette compagnie, tant à la Bastille qu’à Montmartre et à l’Ecole Militaire, environ deux ans, jusqu’à mon départ pour l’armée comme capitaine en premier, malgré les graves infirmités dont j’étais déjà affligé. Maintenant, enfin, il me sera permis peut-être d’offrir à la ville de Paris un moyen d’acquitter envers moi une dette qui ne m’a valu pendant longtemps que de superbes dédains, des tribulations, des vexations et des pertes de place et d’argent, et elle sollicitera la croix d’officier de la Légion d’honneur qui paiera d’un seul coup le capital et les intérêts.

A Paris, ce 1er août 1832.

VILLENEUVE.

Je certifie les faits ci-contre. FOSSARD.

Je puis et je dois certifier l’exposé de M. le capitaine Villeneuve, d’autant plus que je suis l’enfant dont il est question. LEBARON, un des Vainqueurs de la Bastille.

Je certifie les faits ci-contre avec d’autant plus de raison qu’à celle époque j’étais logé à côté de M. Villeneuve, que je participai à sa nomination et montai le soir même ma première garde sous ses ordres. Melano LALEINE, l’un des Combattants et Vainqueurs de la Bastille.

Je certifierai les faits ci-contre et de tout mon coeur, car je suis l’un des bourgeois dont il est question et que tout m’est bien présent à la mémoire. A Paris, le 19 août 1832. RAGON, âgé de 71 ans, ex-capitaine dans la garde nationale.

Je soussigné certifie qu’étant logé rue de la Calandre, vis-à-vïs le Palais de Justice, au mois de juillet 1789, j’ai monté la garde sous le commandement de M. Villeneuve, nommé commandant du poste établi dans une boutique, à côté du passage de Saint-Barthélemi, aujourd’hui le Prado ; que cette garde a été ma première et que la consigne était de ne pas laisser enlever la pièce de canon sans affût qui était sur le pavé, vis-à-vis la grille du Palais. Paris, le 20 aoùl 1832. ARNOULT, l’un des secrétaires aux Archives du royaume.

Je certifie les faits relatés concernant les hauts faits des journées du 14 juillet 89. Je certifie, en outre, qu’à différentes occasions, nous nous sommes trouvés dans les 12 et 13 de juillet pour maintenir les soldats de la Basoche à la Bastille ; nous nous sommes empressés pour trouver et transporter des fusils pour faire le siège. Je certifie tout ce qui est ci-dessus sincère et véritable. Ce 20 aoùl 1832. PAULIN, lieutenant aux Invalides.

Ce fait était dans le temps bien connu dans la compagnie des Vainqueurs de la Bastille, et je le certifie de bon coeur. Paris, le 4 septembre 1832. Le docteur SOUBERBIELLE. 1http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k5533285r/f467.image">Les volontaires nationaux pendant la Révolution. Historique militaire et états de services du 19e bataillon de Paris, dit du Pont-Neuf, au 27e (bataillon de la Réunion)> / par Ch.-L. Chassin et L. Hennet, édition L. Cerf, Paris, 1899-1906.

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