L’histoire de la famille Sage est indissociable de celle de Laroque d’Olmes. La famille Sage a donné en effet à la commune, depuis la Révolution, une longue suite de maires, d’instituteurs, de juges de paix. Elle s’est illustrée ensuite dans le domaine de l’industrie textile. Dite « maison Sage », la demeure qui fut autrefois celle de la famille éponyme constitue aujourd’hui un pôle important de la mémoire locale. Les propriétaires actuels de cette maison l’ouvrent régulièrement au public désireux de la visiter. Ils y organisent ou y accueillent des expositions relatives au patrimoine industriel du pays d’Olmes. C’est en vertu de cette généreuse politique d’ouverture que, le dimanche 19 juin, j’ai pu visiter la maison Sage à mon tour. J’y ai admiré tout particulièrement l’élégance sans ostentation qui fit, à la fin du XIXe siècle, le style d’une grande famille de Laroque d’Olmes.
Il en va de la maison Sage, me disais-je, comme au Charmettes, la demeure où Jean-Jacques Rousseau a vécu en Savoie, auprès de Madame de Warens. L’impression heureuse naît d’abord du charme suranné des anciens papiers peints.
Les beaux parquets, les encadrements de cheminée, les miroirs, font ensuite l’essentiel du luxe de la maison Sage. Sobres et de bon aloi, ils font valoir la fluidité d’un espace composé d’une suite de grands volumes qui courent en enfilade parallèlement à un grand corridor au centre duquel démarre, éclairée par un haut puits de jour, ourlée par une plinthe comme on n’en fait plus, la volée de l’escalier en direction des étages.
A l’étage, l’aménagement d’une chambre perpétue, dans un style très féminin, le souvenir de l’âge romantique.
Au fond du couloir, toujours à l’étage, une fenêtre donne sur le jardin, planté ici d’un labyrinthe de buis.
La maison abrite aujourd’hui une exposition dédiée au jais. Voyez d’abord ci-dessus, pour mémoire, un morceau de jais à l’état sauvage, trouvé par hasard dans la forêt.
Voici maintenant, divers morceaux de jayet, ou jais, extraits respectivement d’un gisement audois et d’un gisement ariégeois ; puis diverses plaques de boutons, perles et autres colifichets obtenus après façonnage et polissage du jais. Issues de l’entreprise Morel, jadis propriétaire d’une usine de façonnage à Sainte-Colombe, ces plaques faisaient le contenu de la « marmotte », i. e. celui du panier de l’ancienne colporteuse de jais.
L’exposition comporte également un riche assortiment de cartes et de vues aériennes, relatives aux régions du piémont pyrénéen qui ont abrité, avant épuisement, des gisements de jais. Renonçant à obtenir une photo lisible des cartes sous plastique, je me suis fait plaisir : j’ai photographié ici l’effet de reflet.
Marc Meurisse, actuel propriétaire de la maison, géologue, propose aux visiteurs intéressés, outre ce bel ensemble de cartes et de vues aériennes, une étude, d’environ une heure, consacrée à l’histoire et à la géographie de la formation du jais. La formation du jais résulte, dit Marc Meurisse, de la sédimentation et de la compression des diverses matières végétales apportées au pied des Pyrénées dans la mer ancienne par les fleuves des premiers âges du monde. Elle s’est opérée plus spécialement au front des anciens deltas, là où, repoussées par le flot de la mer entrante, les matières végétales charriées par les fleuves se sont amassées pendant des millénaires, en bancs jour après jour recommencés.
Voici enfin le schéma du fameux moulin à jayet. Animé par un « tournail », ce moulin pouvait occuper jusqu’à six ouvriers/ouvrières. Il comportait une arrivée d’eau à destination des meules et un circuit de récupération de l’eau via une rigole qui circulait au pied des meules.
La maison Sage abrite par ailleurs nombre de documents relatifs aux anciens moulins à farine ou à huile, ainsi qu’aux « caquières », ou tanneries à l’ancienne. J’y ai beaucoup appris sur les méthodes de ces dernières, en particulier sur l’usage du redoul, dite « herbe des tanneurs », ou corroyère.
Il y aura d’autres ouvertures de la maison Sage. Surveillez les dates !
Un reportage très complet et comme toujours remarquablement écrit .La Dormeuse n’a pas oublié d’ajouter un petit clin d’oeil photographique : après avoir vu les cartes géologiques des jais elle nous présente une carte -espace immatérielle du lait !
Très belle visite, point d’orgue à la communication de Bruno Evans qui clôturait le colloque d’histoire à Foix.
( Depuis que nous avons découvert le redoul et ses usages, je me rends compte que cette plante tapisse littéralement les talus qui longent tous les chemins des environs ! )
Magnifique synthèse, magnifiques photos, comme toujours !