La dormeuse blogue

Choses vues, choses lues, choses rêvées…

Hommage à Haendel – Orgue en Pays d’Olmes

Dédié à Georg Friedrich Haendel (1685-1759), grand concert vendredi dernier, en l’église du Saint Sacrement, dite aussi Notre Dame du Mercadal (XIVe siècle), tout là-haut sur le promontoire du Castella, à Laroque d’Olmes. Passée la porte neuve, ouverte sur le bleu du crépuscule, on se trouve directement sous le buffet du grand orgue. Il s’agit d’un orgue historique dont la création remonte aux années 1710, qui a été inauguré par Couperin lui-même. Conçu par Louis Alexandre Clicquot pour l’une des chapelles du château de Versailles, il y demeure, préservé de toute modification, jusqu’en 1871, date à laquelle Aristide Cavaille-Coll le transforme en orgue romantique. En 1933, dans le cadre de la restauration générale du château, l’orgue est démonté et confié au facteur franco-espagnol Victor Gonzalez à fin de réfection dans le style d’Alexandre Clicquot. Il est racheté en 1995 par la commune de Laroque d’Olmes. Il a hélas perdu au cours de ses tribulations le magnifique buffet en bois doré, orné de fleurs de lys, qui l’habillait au temps de Versailles 1.     

Avant le concert, la nef baigne dans une lumière d’or. Le rétable baroque dont la trace figure sur le mur a été déposé à fin de restauration. Le marbre rouge de l’autel ponctue d’une note profonde l’hyacinthe des parois, ornées de loin en loin par des statues polychromes.

Le concert va commencer. Les lumières s’éteignent progressivement. Seul luit sur le mur, au premier plan, un reliquaire. Au fond de la nef, l’orgue s’anime.

A l’orgue, Christiane Van Gorp, concertiste ; anciennement titulaire de l’église Saint Willibrord ainsi que de l’église Saint Louis de Mortsel d’Anvers, professeur d’histoire de la musique à l’Université Populaire Flamande ; aujourd’hui habituée de l’orgue de l’église Saint Volusien de Foix

Installé dans le choeur, devant le maître-autel, un grand écran permet de suivre l’admirable jeu de mains de l’organiste ainsi que, de temps à autre, le mouvement du pédalier.

Puis une voix naît dans l’ombre, au pied du maître-autel, simple et pure. Elle chante le O Salutaris, l’hymne à la vénération du Saint Sacrement, de Haendel. Un peu plus tard, sur l’écran, la voix prend visage. Muriel Batbie-Castell chante de façon bouleversante le "Lascia ch’io pianga" de Rinaldo, opéra composé en 1711 par Haendel. L’expressivité de l’artiste, d’un coup d’aile, porte l’émotion a son comble. 

La voix est soyeuse ; l’articulation naturelle, limpide ; le phrasé aérien comme un chant d’oiseau. Semé d’ornements, les airs de Haendel se parent d’un éclat diapré. Riches harmonies, tout-puissants accords de l’orgue font à cet éclat une sorte d’écrin. Les inflexions de la chanteuse sont d’une féminité exquise. Tant de grâce chez le grand Haendel ! Je le redécouvre. 

Les aria tirés de Radamisto (1720), Siroe re di Persia (1728), L’Allegro, il Penseroso, ed il Moderato (1740) m’ont enchantée.

Formée au conservatoire de Toulouse, puis élève de Jordi Savall, Muriel Batbie-Castell est à la fois spécialiste de musique ancienne et baroque, et professeur d’occitan. Elle est également la fondatrice de l’ensemble Avinens, dédié aux Cants de Trobadors.

Alternant les pièces pour orgue et chant, et orgue seul, Christiane Van Gorp révèle en virtuose  l’étendue des timbres et des couleurs de l’orgue. Elle libère un jeu saisissant d’énergie frémissante dans la Suite n° 5, "The Harmonious Blacksmith" (1720), l’Allegro du Concerto opus 4 n° 4 en fa majeur, les "Feux d’artifice royaux" de la Suite pour orchestre (1749), et l’Alléluia du Messie (1741).

A la fin du concert, je n’ai pas réussi à photographier Christiane Van Gorp, furtivement apparue pendant les ovations, tout blonde, au balcon de l’orgue.

Tandis que nous rappelions les deux artistes, Muriel Batbie-Castell est redescendue du balcon, et elle a chanté une seconde fois pour nous le "Lascia ch’io pianga" de RinaldoLascia ch’io pianga mia cruda sorte,  E che sospiri la liberta ! E che sospiri, e che sospiri la liberta ! Lascia ch’io pianga mia cruda sorte, E che sospiri la liberta !

Le E che sospiri la liberta ! donne le frisson. 

Déja, dans l’émotion générale, Jean-François Valette, préfet de l’Ariège, félicitait Muriel Batbie-Castell, et les enfants de l’artiste embrassaient leur maman.

L’église de Laroque d’Olmes accueillera le dimanche 13 décembre 2009 Bernard Soustrot et Jean Dekyndt pour un concert de Noël dédié à l’orgue et à la trompette.

Pour en savoir plus :

Laroque d’Olmes, église du Saint Sacrement : Histariège, Laroque d’Olmes
Association des amis de l’orgue Victor Gonzalez
Christiane Van Gorp : AriegeNewsFoix – Renaissance du grand orgue de Saint Volusien
Muriel Batbie-Castell
La dormeuse blogue : Musiques de Noël à l’église de Laroque d’Olmes
La dormeuse blogue : A Laroque d’Olmes

Notes:

  1. Cf. Association des amis de l’orgue Victor Gonzalez/Historique ↩︎

Cette entrée a été publiée .
dans: Ariège, art, églises.

1 commentaire au sujet de « Hommage à Haendel – Orgue en Pays d’Olmes »

  1. Abbé Hervé SAVOURNIN

    Merci Chères Amies,

    pour ce remarquable article, vous parlez si bien du concert et de l’église.
    Christine Bouin,la Titulaire m’a fait part de cette information…
    Nous attendons, avec une certaine impatience maintenant le prochain concert ainsi que l’inauguration de l’orgue de La Bastide sur l’Hers.
    Bien à Vous.
    abbé H.Savournin.
    Curé de Laroque

  2. Continuum

    Je conseille à tous ceux qui aiment l’art de Muriel Batbie-Castell de visionner ce très joli reportage de France 3 Sud à son sujet :

    http://www.kewego.fr/video/iLyROoafYlnx.html