Auguste Labouisse-Rochefort et la Société philotechnique de Castelnaudary. 6. Une figure oubliée. De 1805 à 1808

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Jean Baptiste Hilaire (1751-1828), Jardin du Roy, « agrandi par Buffon », 1794, BnF, département des Estampes et de la photographie, RESERVE FOL-VE-53.

Le 25 juillet 1805, Auguste de Labouisse composait un poème dans lequel il disait adieu à Paris, « où tout abonde » en « féeries », au « délicieux séjour qu'on nomme TIVOLI », au « vieux Louvre », aux « superbes Tuileries », au « beau Champ-de-Mars », à l'Hôtel des Invalides, à l'École militaire, à l'Odéon, au Vauxhall, aux théâtres, au Panthéon, à l'Élysée, au Musée, aux « jardins agrandis par Buffon ».

Mais adieu aussi à à Paris « où tout abonde en misère, en débauche », « Ô ville trop féconde ! / Où l'or tient lieu de tout, où les mœurs ne sont rien, / Où les vertus ne sont qu'un sujet d'entretien / Toujours infructueux pour les gens du beau monde ! »

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Claude Louis Desrais ou Desray (1746-1816), dessinateur, Claude François Fortier (1775-1835), graveur, Mode du jour, ou Le sérail en boutique, marchandes d'amour au Palais-Royal, 1800, Musée Carnavalet.

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Anonyme, Le Café des Aveugles au Palais Royal ca 1800. Cf. Louis Marie Prudhomme, Voyage descriptif et philosophique de l'ancien et du nouveau Paris, t. 2, « Miroir fidèle qui indique aux étrangers et même aux Parisiens ce qu'ils doivent connaître… », Paris, chez l'auteur, 1814, pp. 89-91 : « Il y a dans ce café un grand orchestre, composé d’aveugles. Ce café n’ouvre qu’à cinq heures. C’est le rendez-vous de toutes les filles du jardin et de celles du perron : les habituées y ont tous les jours leur demi-tasse gratis. Il est divisé en vingt petits caveaux : on y voit de vieux et de jeunes admirateurs des grâces. Les jeunes déesses viennent boire le vin du marché ; les vieilles restent pour épier le moment où il se présente quelque godiche (c'est le mot de reconnaissance). On respire un air si fétide et si épais dans ce café, que lorsqu’on en sort, même au plus fort de l’été, on est saisi par le froid. »

« Adieu, trop immense cité,
Où souvent le vice est cité,
Sans qu'on le flétrisse ou le fronde ;
Où la perte du temps est la félicité ;
Où la candeur et l'innocence
Se cachent à tous les regards ;
Où l'on voit rougir la décence
Devant les chefs-d'œuvre des arts ! » 1

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Titien, Jupiter et Antiope, ou La Vénus du Pardo, 1525-1550, Musée du Louvre. Cf. Zola, L'Assommoir : « Boche et Bibi-la-Grillade ricanaient, en se montrant du coin de l’œil les femmes nues ; les cuisses de l’Antiope surtout leur causèrent un saisissement. »

Baudelaire, dans les « Tableaux parisiens » de ses Fleurs du Mal, et Zola dans L'Assommoir,certes de façon plus noire et plus crue que leur précécesseur, se souviendront des vers d'Auguste de Labouisse et en relèveront l'esprit de contemnation ou de grande pitié.

Las désormais de « la trop immense cité », dans laquelle, pendant un an, il s'est trouvé « transplanté », Auguste de Labouisse se languit à présent de retourner auprès de sa famille, en son petit village. Il sait dans le même temps, et il l'endure, qu'après avoir partagé un temps les lumières du Tout-Paris des Lettres et des Arts, même s'il a cru pouvoir s'y faire un nom et accéder au statut d'écrivain publié, il retourne à « l'obscurité », et il se targue de pouvoir s'y camper à l'avenir dans la posture du « sage ». Il est âgé alors de 27 ans.

« Adieu : je vais revoir un modeste ermitage,
Et recouvrer la liberté,
Qui ne fut jamais le partage
Du mortel, qu'en ces lieux le sort a transplanté.
Je vais trouver la paix, l'obscurité,
Fidèles compagnes du sage,
Le tendre amour, la chaste volupté :
Je vais goûter dans ma retraite
Les charmes de l'étude, un loisir enchanteur,
Admirer la nature, et bénir son auteur.
[...]
Adieu, Paris ; le temps vole, je pars ! » 2

Finalement, quel fruit matériel Auguste de Labouisse a-t-il retiré de son séjour à Paris ? Auprès des ministères, concernant la perte des biens achetés à Saint-Domingue par Michel Muzard, son beau-père, il n'a rien obtenu. S'il s'est rendu à diverses séances de l'Académie-Française et a côtoyé ou personnellement rencontré nombre d'académiciens et autres écrivains célèbres, il n'a été que rarement ou évasivement lu par eux. Certes, en mars 1805, il a publié deux poèmes, tirés de ses Amours, À Éléonore, recueil encore inédit, dans le Magasin Encyclopédique 3, dont A. L. Millin [Aubin Louis Millin de Grandmaison, dit Éleuthérophile [homme épris de sa liberté] Millin (1769-1818)] est le rédacteur en chef, et lui le collaborateur, ou le nègre. Mais voilà qui ne faisait pas au bénéfice d'Auguste de Labouisse une bien grande fortune littéraire.

Aux yeux d'Auguste de Labouisse, le prestige et l'autorité de A. L. Millin avaient en effet de quoi éblouir ...

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1er janvier 1805. Premier numéro du Magasin encyclopédique, ou Journal des sciences, des lettres et des arts, publié sous la direction de A. L. Millin de 1805 à 1816 et poursuivi en 1817 et 1818 sous le titre d’Annales encyclopédiques.

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1er janvier 1805. Le Magasin encyclopédique, Préface, p. V.

Auguste de Labouisse s'était initialement imaginé que l'entrée au Magasin encyclopédique lui serait flatteuse et qu'elle le ferait entrer sans délai dans le club très fermé des « hommes les plus distingués » ... En mars 1805 en effet, deux poèmes tirés de son recueil intitulé Les Amours, À Éléonore, encore inédit, se voyaient publiés dans le Magasin encyclopédique ...

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Magasin encyclopédique, 1er mars 1805. Épître à madame Verdier d'Uzès 5, par madame Éléonore de L..., et La Parure. À Éléonore, par Auguste de La Bouïsse, poèmes tirés du recueil intitulé Les Amours, À Éléonore, encore inédit.

Après mars 1805 toutefois, date de la publication des deux poèmes tirés des Amours, À Éléonore, plus rien, nul écho : le nom d'Auguste de Labouisse n'est plus apparu dans aucun volume de l'année en cours, même si celui-ci s'était appliqué à fournir à A. L. Millin nombre de fiches de lecture relatives à d'autres publications. D'où la poussée d'aigreur qui lui échappe alors à propos de son employeur :

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Jacques Marie Noël Frémy, Portrait d'Aubin Louis Millin de Grandmaison, ca 1817, naturaliste, érudit féru d'archéologie grecque, membre de nombreuses sociétés savantes, président de la Bibliothèque nationale de France (1799-1800), conservateur du Cabinet des médailles (1799-1818). Musée Champollion de Vif, Isère. Photographie Julien Peytard.

« Quelqu'un me demandait des détails particuliers sur M. A. L. Millin, savant médailliste que j'ai l'honneur de voir souvent, et avec lequel j'ai des relations, à cause du Magasin encyclopédique qu'il rédige et auquel je travaille. — Embarrassé de toutes les questions dont on m'assaillait, je répondis : - Il est jeune, il est riche, il est célibataire, il loge à la bibliothèque auprès de ses médailles chéries ; voilà tout ce que je sais de lui. » 4

Si Auguste de Labouisse, au printemps 1805, faisait montre de quelque agacement quand on l'interrogeait sur M. A. L. Millin, c'est qu'à la différence dudit M. Millin, il n'était, lui, ni riche, ni célibataire, mais marié et chargé de famille, et qu'il cherchait à se frayer dans la carrière des lettres ou de l'édition un avenir plus profitable que celui de simple collaborateur de M. Millin. Après son retour à Saverdun, il semble au demeurant avoir cessé de contribuer à la publication du Magasin encyclopédique, puisqu'on ne retrouve plus nulle part son nom dans les sommaires des numéros qui vont de 1806 à 1816.

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De gauche à droite : Autoportrait du chevalier de Boufflers jeune, lieu de conservation inconnu, U.S.A. ; portrait du chevalier de Boufflers âgé, frontispice de la seconde édition des Œuvres complètes du chevalier de Boufflers, Paris, Briand, 1817.

En décembre 1805, Auguste de Labouisse, qui a aidé en juin de la même année à l'établissement d'une édition des Œuvres complètes du chevalier de Boufflers, et qui, jugeant cet établissement incomplet, continue à y travailler, reçoit à Saverdun une lettre de ce dernier, qui semble augurer de la publication précipitée desdites Œuvres chez le libraire-imprimeur Guillaume :

« J'ai lu et relu, Monsieur, les dernières observations que vous avez bien voulu m'envoyer, au sujet de ce que vous appelez mes Œuvres, avec autant de reconnaissance que de plaisir, et je vous en renouvelle ici tous mes remerciments. Mais vous avez pu remarquer, dans le peu de temps que nous avons passé ensemble, que c'est de très bonne foi, que je n'attache aucun prix à ce que j'ai fait, et que j'ai même une répugnance invincible à m'en occuper. Je vous prierai donc de vouloir bien imiter là-dessus ma tranquillité (d'autant plus que vous avez un bien meilleur emploi à faire de vos loisirs), et de vouloir bien renvoyer à M. Guillaume le manuscrit en question, qu'il est empressé de recevoir, ainsi que moi, et pour l'impression duquel nous profiterons des soins que vous avez bien voulu y donner. » 6

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Anonyme, Portrait de Françoise Éléonore, marquise de Boufflers (1750-1827).

Après les remerciements de M. de Boufflers, Auguste de Labouisse reçoit également ceux de la charmante Éléonore de Boufflers. « Pendant que M. de Boufflers accélérait de tous ses vœux l'arrivée des manuscrits, ils étaient en route. Une main amie, qui lui est bien chère, s'est hâtée de m'en accuser réception, et de me remercier de mon travail, de ma préface, de mes réflexions et de l'ordre que j'ai bien voulu y mettre. » 7

On devine à la hâte de ses amis commanditaires que ceux-ci souhaitent publier au plus vite l'ouvrage prévu, et donc mettre fin, même non terminé, au travail d'Auguste de Labouisse. M. de Boufflers se trouve désormais trop âgé, paraît-il, pour souffrir d'avoir à attendre plus longtemps la publication de ses Œuvres, complètes ou pas, peu importe. Il mourra toutefois dix ans plus tard seulement. Auguste de Labouisse, quant à lui, se voit dans l'histoire poliment signifier son congé. L'histoire en question a forcément pour lui des conséquences financières, même si l'on n'en dit mot dans ce monde policé. Il se trouve en outre que l'édition à l'établissement de laquelle Auguste de Labouisse s'était dévoué, ne paraîtra pas.

« Cette édition préparée, arrangée, annoncée, n'eut pas lieu par des raisons que j'ignore. Il serait trop long de raconter comment furent perdus, ou comment disparurent alors plusieurs des manuscrits que j'avais envoyés et dont je n'avais pas gardé de copie. — Aujourd'hui M. de Boufflers n'existe plus, ce qui ne fait qu'augmenter mes regrets » 8, observe Auguste de Labouisse dans une note ajoutée à ses Mémoires en 1846.

Quoi qu'il en soit du caractère décevant de ces deux expériences, collaboration au Magasin encyclopédique et tentative d'établissement d'une édition complète des Œuvres du chevalier de Boufflers, Auguste de Labouisse n'a pas pu séjourner une année durant à Paris sans brûler de participer au renouveau des académies, sociétés savantes et organes de presse soucieux de promouvoir les Sciences, les Lettres et les Arts, au bénéfice de l'instruction publique. Il n'a pas pu séjourner non plus une année durant à Paris sans s'abandonner à une bibliophilie qui ne demandait chez lui qu'à devenir galopante, dès sa prime jeunesse déjà. Désir de création de sociétés savantes et passion bibliophilique seront cause des heurs et malheurs de sa carrière ultérieure.

En attendant l'avenir qui sied aux « hommes les plus distingués », Auguste de Labouisse retrouve à Saverdun, dans les bras de son Éléonore, le bonheur qui est, dit-il, au bord de l'Ariège, celui d'Ulysse rentré à Ithaque. Ce retour ne va pas toutefois sans inspirer passagèrement aux époux des sentiments mêlés.

Éléonore poète a écrit pendant l'absence de son époux, échangé certains de ses écrits avec ceux d'autres femmes poètes, dont la comtesse de Beaufort d'Hautpoul 9 et Suzanne Verdier d'Uzès 10, et elle a commencé à développer ainsi avec ses correspondantes une sorte de sororité littéraire.

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Portrait de Mme la comtesse de Hautpoul, dessiné d'après nature par Julien Léopold Boilly (1796-1874), lithographié par Thierry Frères, in Alfred de Montferrand, Biographie des femmes auteurs contemporaines françaises, Paris, Armand-Aubrée, 1836.

Madame d'Hautpoul a fait hommage à Éléonore de Labouisse d'un exemplaire de son Zilia, roman pastoral publié pour la première fois en 1789 à Toulouse, qu'elle lui envoie en juin 1805, assorti de ces vers flatteurs :

« Si, dans ces champêtres tableaux,
Ma Zilia n'est pas plus belle,
C'est qu'il manquait à mes pinceaux
De vous avoir pour leur modèle. »

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Zilia. Roman pastoral. En cinq chants par Madame de B*** [de Beaufort], Londres, de l'imprimerie de Baylis, 1797, p. 3.

Éléonore de Labouisse lui rend grâce de cet envoi, dans le même ton :

       « J'ai lu vos champêtres TABLEAUX :
De quoi vous plaignez-vous ? peut-elle être PLUS BELLE,
         La ZILIA que choisit vos PINCEAUX ;
         Et quel besoin avez-vous de MODÈLE,
Vous, dont l'heureux talent et la touche fidèle
         Servent d'exemple à nos jeunes Saphos ? »

Puis elle évoque de façon voilée son propre sort, qui est celui de la « bergère » en proie aux « longs ennuis » et aux « peines de cœur », nourris par les « regrets douloureux d'une pénible absence ». Elle formule in fine cette observation discrètement nostalgique :

« Ah ! qu'on doit admirer ce roman pastoral
Où d'aimables bergers, dans une douce ivresse,
Passent, pour embellir les jours de leur jeunesse,
Des troubles de l'amour au bonheur conjugal. 11

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De gauche à droite : Portrait de Suzanne Verdier d'Uzès, lithographie de Pierre Roch Vigneron, British Museum, London ; Marie Anne Henriette de Payan de l’Estang, ca 1780, miniature anonyme, collection de M. Charles Lapierre (famille de Bourdic).

Éléonore de Labouisse, dans un moment de morosité sans doute, a écrit aussi à Suzanne Verdier d'Uzès pour lui dire qu'elle l'envie d'avoir pu vivre jusqu'en 1777 aux côtés d'un époux, négociant, qui la laissait libre de cultiver à sa guise ses dons pour la poésie, puis, après son veuvage, d'avoir pu accéder au titre de Maître à l'académie des Jeux floraux, ainsi qu'entrer aux Arcades de Rome, à l’Académie du Gard et à l’Athénée du Vaucluse. « Nous sommes une foule de musettes, madame Verdier seule est une muse », disait Marie Anne Henriette de Payan de l’Estang 12, marquise d'Antremont, devenue sur le tard Henriette Bourdic Viot, poète elle aussi. Éléonore de Labouisse, elle, à la pensée du retour de son époux, s'inquiète de se voir bientôt reconduire au statut de prisonnière d'amour 13 et de muse domestique, affligée de ces « travaux ennuyeux et faciles » dont Verlaine dira qu'ils sont « œuvre de choix qui veut beaucoup d'amour » :

« Combien à tes talents, Verdier, je porte envie !
Tu peux t'enorgueillir d'être un aimable auteur,
Sans avoir affligé ta vie
Par ces travaux ingrats qui troublent le bonheur.
[...].
Célèbre malgré toi, tu jouis de toi-même,
Sans nul besoin de vivre en l'avenir :
Qu'il est heureux, en chantant ce qu'on aime,
De se faire un long souvenir ! » 14

Quant à Auguste de Labouisse, avant même d'être rentré à Saverdun, il s'inquiète d'avoir à vieillir près des siens sans avoir été rien d'autre qu'un « modeste poète » :

« Près d'eux je vieillirai : l'avenir m'oubliera ;
Mais des fleurs d'Apollon j'aurai paré ma tête ;
J'aurai fait des heureux, même quand la tempête
De flots de sang nous entoura :
Et, quand la mort de sa faux meurtrière
Aura terminé ma carrière,
Sur ma tombe l'on gravera
Ces mots, qu'avec respect ADOLPHE un jour lira :
Ici repose un modeste poète ;
Il fit un peu de bien du fond de sa retraite.
Ses parents l'ont aimé, l'indigent le pleura. » 15

À partir de la fin août 1805, date du retour d'Auguste de Labouisse dans sa maison de Saverdun, la vie commune retourne à l'ordre ancien des choses. Éléonore, afin de célébrer les retrouvailles avec son époux, pare son corsage de guirlandes de fleurs artificielles. Celui-ci lui déclare qu'il la préfère dans le simple appareil de sa beauté naturelle :

« QUEL est donc ton projet, et qui veux-tu séduire ?
Toi, pour nous captiver, avoir recours à l'art !
Ne te suffit-il pas du plus simple regard
Pour soumettre nos cœurs à ton aimable empire ?
Crois-moi, renonce à ces prestiges vains !
Que sont ces fleurs, filles de l'imposture,
         Près des roses, qu'à pleines mains
Sur tes attraits effeuilla la nature ? » 16

Éléonore, dans le même temps, rédige son « Adieu aux Muses », beau morceau de poésie, un peu désabusé, mais résolu :

« AIMABLES sœurs, recevez mes adieux !
Ainsi le veut le plus jeune des dieux :
Il faut quitter les rives du Permesse.
Je l'ai revu, j'ai revu mon époux ;
Il ne vit que pour moi : que les soins les plus doux
Soient le juste retour de sa vive tendresse !

Chastes objets de mes premiers désirs,
Vous fîtes mes premiers plaisirs,
Vous fûtes ma première ivresse ;
Mais de mes vers je sens trop la faiblesse,
Pour me livrer à de pareils loisirs.
J'abandonne aujourd'hui de vaines bagatelles ;
Il n'appartient qu'aux Verdiers, qu'aux Beauforts
D'écrire en se jouant des chansons immortelles :
Moi, j'y perdrais mon temps et mes efforts.

Muses, vous le savez : mes rapides journées,
À d'autres devoirs destinées,
Ne me permettent plus ces joyeux passe-temps... » 17

Auguste de Labouisse toutefois, magnanime, amoureux, tente de dissuader Éléonore de renoncer à la poésie, ou plutôt, comme il dit, de renoncer à son « heureux délire » :

« Du Pinde 18, où tu régnais avec tes nobles sœurs,
Crois-tu pouvoir exiler ta jeunesse ?
De l'hymen goûtons les douceurs,
Sans exclure un plaisir qu'approuve la sagesse.
Les Verdier, les Beaufort envieraient tes doux chants ;
Cède toujours à ton heureux délire ;
Et mêle aux soins les plus touchants
Les tendres accords de ta lyre. » 19

Mais l'époux magnanime tient son épouse occupée tout au long du jour par la lecture à haute voix de ses textes à lui. D'abord la lugubre élégie d'Amaryllis et Daphnis :

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Arnold Böcklin (1827-1901), La complainte du berger, ou Daphnis et Amaryllis, 1866, Schack Collection, Munich, Allemagne.

« C'est ainsi qu'en nos champs, d'une voix attendrie,
Le cœur serré, les yeux gonflés de pleurs,
Auprès d'une épouse chérie,
D'Amaryllis redisant les douleurs,
Sur son tombeau je répandais des fleurs.

Tu m'écoutais, jeune et sensible amie,
Quand je plaignais le sort de ces amants !
Qu'il est cruel, au printemps de sa vie,
De la perdre dans les tourments !

Ils naissaient à l'amour, enivrés d'espérance ;
Mais l'amour a fait place au plus affreux trépas.
Ah ! si la mort t'enlevait de mes bras,
Bien ne pourrait adoucir ma souffrance,
Et, comme Amaryllis, je n'y survivrais pas. » 20

Puis une traduction de Tibulle, Gallus et Catulle :

« Le Parny 21 des Romains, celui dont les beaux vers
Attendrirent le cœur de la fière Délie,
Et ce Deguerle 22 ancien qui célébra Lydie,
Et ce folâtre amant de la jeune Lesbie,
Qui revit de nos jours dans l'aimable Boufflers,
À ces rares beautés ont tous dû l'avantage
Que leurs brûlants écrits sont encore admirés :
Mais, s'ils eussent vécu tous les trois dans notre âge,
Seule, tu les aurais tous les trois inspirés. » 23

La référence à Parny et à Deguerle éclaire ici d'un jour « brûlant », comme dit des écrits ci-dessus, le genre de littérature latine qu'Auguste de Labouisse se plaît à traduire, et à lire ensuite à Éléonore. Il s'agit de poésie érotique, dans la mesure où l'érotisme couve là sous le manteau d'une langue toute classique et d'une mythologie galante qui ne passe jamais dans ses mots les bornes de la décence. On notera toutefois qu'en 1805 déjà, les champions du romantisme naissant tiennent pour « vieille friperie », ce genre emprunté des Grecs et des Romains, pâle reflet, rayon décoloré du flambeau mourant de leur littérature ». Mais il se trouve encore des critiques pour défendre la poésie de Deguerle, et cette défense vaut en l'occurrence pour celle d'Auguste de Labouisse aussi :

« M. De Guerle [...] est classique, classique de la vieille roche, classique dans toute l'étendue du terme. La plupart des pièces qui composent ses œuvres diverses sont imitées des poètes érotiques de Rome et de la Grèce. C'est encore Sapho, Anacréon, Tibulle, Properce, Ovide et Catulle. Son style, élégant et pur, participe à la fois de la manière de Delille et de celle de Parny ; mais sa versification, toujours facile et harmonieuse, n'offre nulle part ces inversions extraordinaires, ces césures ad libitum, ces enjambements gigantesques, enfin, cette nouvelle facture dont les romantiques veulent bien faire honneur à André Chénier ; mais que ses prétendus disciples ont tellement dénaturée, qu'ils peuvent à juste titre réclamer un brevet de perfectionnement.

N'en doutons point : M. De Guerle n'obtiendra d'eux qu'un sourire de mépris ; il est surtout un genre de reproche qu'ils ne manqueront pas de lui adresser, c'est l'emploi fréquent de cette vieille mythologie désormais exclue, par arrêt en forme, du domaine de la poésie. Qu'y faire ? Suffirait-il, pour justifier notre auteur, de faire observer à ses censeurs, qu'à l'époque où il écrivait les dieux de la fable n'avaient pas encore abdiqué ; que le nouveau code poétique qu'ils viennent de promulguer ne doit pas avoir d'effet rétroactif ; que si l'on voulait ainsi faire le procès à tous les écrivains mythologues, il faudrait bannir de nos bibliothèques la plupart des poètes dont s'honore à si juste titre le Parnasse français ? » 24

Éléonore de Labouisse poète, en tout cas, même si elle use moins des références érudites à l'antique, semble avoir admiré la posture délibérément classique, ou néo-classique, qui est celle d'Auguste de Labouisse dans ses élégies. Elle fait montre au demeurant d'une patience d'écoute qui, à supposer que son mari le lui eût demandé, laisse peu de place à la lecture de ses textes à elle. D'autant qu'elle « veut » encore, dit son époux, qu'il lui lise et relise « les premiers chants de leurs pures amours » :

« Aux traits divers de ma peinture,
Un gracieux sourire embellit ta figure ;
Mes yeux fixent tes yeux, ma main presse ta main ;
Un long et doux baiser interrompt la lecture
De la VEILLE et du LENDEMAIN.
L'Amour nous guette : une ardente étincelle
Du feu qui guida mes pinceaux,
Chère épouse, te rend aussi tendre que belle ;
Et, pour me faire oublier tous mes maux,
Je suis récompensé de mes anciens tableaux
Entre les bras de mon joli modèle. » 25

« L'ardente étincelle du feu » semble avoir été propice au JUSTE qui rêvait de PÉCHER SEPT FOIS PAR JOUR... »

Le 9 mai 1806, Éléonore de Labouisse met au monde à Saverdun une petite Hortense de Labouisse 26. Le jour même, Auguste de Labouisse dédie un poème à Éléonore :

« Non, tu n'as pas trompé les désirs de mon cœur !
Tu n'as pas de l'hymen abusé l'espérance !
Je te devais un fils, gage de mon bonheur ;
Je voulais une fille : en me donnant HORTENSE,
Tu combles de mes vœux le vœu le plus flatteur. »

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Portrait d'Hortense de Labouisse, peint par Mme Éléonore de Labouisse, in Les Amours, À Éléonore, recueil d'élégies, par M. Labouïsse, Paris, P. Didot l'Aîné, troisième édition, 1818, p. 205.

À Hortense, Auguste de Labouisse souhaite de savoir charmer son futur époux, tout comme sa mère à su le charmer, lui, son père :

« Comme ta mère, ô mon Hortense,
Ta mère, à qui je dus les plaisirs les plus doux !
Un jour, au jeune et tendre époux
Dont tu charmeras l'existence,
Tu porteras cette aimable innocence,
Cette candeur, cette simplicité,
Qui valent mieux que l'opulence,
Et LA PUDEUR, PLUS BELLE ENCOR QUE LA BEAUTÉ. »

À Hortense, Auguste de Labouisse souhaite aussi de savoir plus tard taquiner les pinceaux et les Muses afin de pouvoir, comme sa mère, occuper ses « rapides moments » et en tirer de « sages délassements ». Et il invite Éléonore à dire bientôt à leur nouvelle-née que « la seule sagesse, ineffable trésor d'une aimable jeunesse, est sans regrets », et que l'on « n'obtient une heureuse vieillesse que dans le sentier des vertus... »

Mais retenu in fine par la crainte de s'être laissé entraîner là « par sa muse » dans le rôle du barbon, Auguste de Labouisse réserve à « son » Éléonore un dernier mot d'hommage :

« Mais où m'égare une muse indiscrète ?
À des leçons pourquoi m'abandonner,
Et quels conseils pourrais-je te donner ?
Qu'elle t'imite, elle sera parfaite. » 27

Le 30 mai, Auguste de Labouisse adresse un autre poème à son ami M. de Kérivalant 28, afin de lui faire part de son bonheur, qui le déborde :

« Des jours heureux que je dois au destin,
Écoute, ami, la peinture fidèle.
Comme Parny, Léonard 29, et Chapelle 30,
Voluptueux, sans être libertin,
En me jouant, je chante mon ivresse.
Tous mes plaisirs sont fils de la tendresse,
Et mon bonheur a surpassé mes vœux,
Depuis qu'hymen, me livrant ma maîtresse,
Du plus doux myrte a couronné mes feux.

De peu de biens mon âme est satisfaite ;
Et que faut-il quand on veut être heureux ?
Quelques amis sensibles, généreux ;
Un peu d'aisance, une aimable retraite ;
De rejetons un cortège nombreux ;
Pour nos repas, qu'on tire de ma cave
Une bouteille ou de Chypre ou de Grave ;
Qu'après souper, quand l'hiver suit son cours,
Au coin du feu, pour charmer ma famille,
Je remémore une histoire gentille
De ce bon temps, où de gais troubadours,
En parcourant la fertile Provence,
Allaient chantant la vierge, les amours,
Et les tournois et les jeux et la danse.

D'un sort pareil je suis assez content ;
Et, quand viendra l'heure où je dois m'éteindre,
J'attends la mort, toujours ferme et constant,
Sans l'appeler, et surtout sans la craindre. » 31

Auguste de Labouisse est âgé alors de 28 ans. On se souviendra, lorsqu'il parle de « l'heure où il doit s'éteindre », qu'il n'avait que 5 ans à la mort de son père. En attendant la mort, il se dit « assez content », sans qu'on sache s'il s'agit là d'un « assez« absolu, ou d'un « assez » relatif, auquel cas, d'un « assez » relatif à sa situation actuelle, caractérisée par le « peu de biens » mais « un peu d'aisance », et par la suspension ou l'abandon du projet littéraire par la voie duquel, un an plus tôt, lui, Auguste de Labouisse, natif de Saverdun monté à Paris, rêvait d'atteindre au statut des « hommes illustres ». Quoi qu'il en soit, le poète épris de son Éléonore lui enjoint, l'adjure de cesser de craindre que son art à elle ne soit « impuissant », il l'encourage à croire, non point à sa plume, mais à ses pinceaux et couleurs, et il l'invite à peindre « sur la toile fidèle » les riants tableaux leur bonheur présent 32. Un jour, Éléonore a peint le portrait de Mme de Labouisse, mère de son époux :

« Des mères, cette femme à jamais le modèle,
Veuve bien jeune encor, belle comme le jour,
Aux plaisirs maternels sacrifiant l'amour,
A vécu pour son fils, et son fils vit pour elle. » 33 

Dans le même temps, geste pionnier pour l'époque, Auguste de Labouisse fait vacciner la petite Hortense contre la variole. 34

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Constant Joseph Desbordes (1761–1828), Le médecin Jean Louis Alibert (1768-1837) procédant à une vaccination anti-variolique, ca 1820, Musée de la Chartreuse, Douai.

De temps à autre, le bonheur des époux s'ombre toutefois d'un nuage d'inquiétude ou de fierté blessée. À Éléonore, qui « appréhende de lui paraître vieille trop tôt », Auguste de Labouisse décline ce quatrain, tendre certes, mais point si consolant :

« AIMABLE Éléonore, eh ! que t'importe l'âge ?
Jamais rien à mes yeux pourrait-il t'enlaidir ?
L'esprit partage-t-il les rides du visage ?
Et les vertus du cœur peuvent-elles vieillir ? » 35

Auguste de Labouisse, lui, même s'il le dénie, souffre probablement quelquefois du regret des voyages dont il avait rêvé au temps où il lisait Gil Blas de Santillane 36. On le sait par un poème de M. de Kérivalant adressé à M. de Labouisse « sur ses voyages en vers et en prose » :

Ah ! pour notre plaisir et pour votre bonheur
Voyagez bien souvent, mais AUX RIVES PROCHAINES !
Renoncez aux courses lointaines :
N'étes-vous pas voisin du Pinde et de Paphos ?
C'est là qu'au sein de vos riches domaines,
Moissonnant des lauriers et des myrtes nouveaux,
Et la gloire et l'amour, pour vous exempts de peines,
Ne vous laisseront plus un moment de repos. » 37

En juillet 1806, non sans un brin de palinodie, Auguste de Labouisse répond à M. de Kérivalant sur le mode suivant, qui révèle l'envie de « monter au rang de ses rivaux » dont le poète des Amours se trouve toujours travaillé :

« OUI, comme a dit le chantre de René [Chateaubriand] ;
Heureux qui n'a point vu les ÉTRANGERS RIVAGES,
Qui n'a point déserté pour de tristes VOYAGES
De son rustique toit l'asile fortuné.
Le bonheur lui sourit au sein de sa famille. »

« Où peut-on être mieux qu'au sein de sa famille ? », chante-t-on alors à la Grande Armée. Cet air, signé Jean François Marmontel et André Grétry, deviendra une sorte d'hymne national sous la première, puis la seconde Restauration.

Après avoir déclaré à M. de Kérivalant, « Je suivrai tes conseils, ingénieux Tibulle », Auguste de Labouisse revient, comme on voit, à la pulsion de jalousie littéraire qu'il continue, malgré lui, de nourrir :

« Heureux si je pouvais, imitant tes travaux,
Après avoir osé me montrer ton émule,
Monter au rang de tes rivaux ! » 38

Mais Auguste souffre alors surtout d'avoir appris qu'il passe aux yeux de ses connaissances parisiennes pour n'être qu'un « poète de l'hymen » et qu'il fait par là l'objet de jugements dédaigneux, voire tendant à le ridiculiser. Dans un poème intitulé « Muse », il s'insurge contre ce qui constitue d'après lui l'injustice de la réputation dont on l'affuble, et, plus généralement, contre l'immoralité du « goût moderne » :

Muse capricieuse, il faut donc que j'expie
Ces innocents couplets, ces faibles impromptus,
Ces vers qui célébraient les talents, les vertus
De la femme adorée à qui l'hymen me lie.
Votre style paraît ridicule et bourgeois ;
Vous vantez toujours LA CONSTANCE !

Usant ensuite d'une longue prosopopée, Auguste de Labouisse emprunte ici la voix de ceux qui le critiquent :

Muse, abjurez cet antique travers ;
On ne fait pas ainsi fortune auprès des belles.
[...]
Chantez gaiment des conquêtes nouvelles ;
Et, contre les maris fidèles,
Écrivez de piquants libelles,
Ou publiez de petits vers.

Si vous adoptez ces maximes,
Lorsque Didot 39 imprimera vos rimes,
Avec transport on vous applaudira.
Devenez papillon, tout vous prospèrera.
Ce pauvre Hymen ! voyez comme on le fronde !
C'est un bizarre, un insensé ;
Sur lui maint sarcasme est lancé
Des rives de la Seine aux bords de la Gironde.
Et moi, d'un sot abus follement entiché,
J'irais m'exposer dans le monde
À rougir de ce vieux péché !
Quittons, quittons notre champêtre asile ;
Faisons pleurer l'Amour et l'Amitié ;
Jusqu'à présent mon sort faisait pitié ;
Nos plaisirs valent-ils les plaisirs de la ville ?
Habitons-la : je veux être envié.
Bientôt ISMÈNE, ADÉLAÏDE et LAURE
Me combleront des plus douces faveurs,
Et j'oublierai la belle ÉLÉONORE,
Pour plaire au goût moderne et copier nos mœurs... »

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Louis Léopold Boilly (1761–1845), Point de Convention [un Incroyable propose une passe à une Merveilleuse qui porte une robe transparente], ca 1797, source inconnue, domaine public.

Suite à quoi, revenant à sa propre parole, Auguste de Labouisse persiste et signe dans la défense du goût classique, qui est aussi celui de la tradition morale, i.e. celui d'un bonheur qu'on dit à tort « COMMUN et MONOTONE » :

Ma femme, tu seras mon unique maîtresse ;
En dépit des mauvais plaisants
Je ne saurais aimer que toi, que nos enfants :
Vous faites mon bonheur, vous êtes ma richesse ;
Et les traits des jaloux sont des traits impuissants.
[...]
Ô fortuné loisir, dont j'aime le tableau,
Et que persifle en vain la raillerie !
Auprès d'une épouse chérie
Puisse toujours un destin aussi beau
S'écouler, comme le ruisseau
Parmi les fleurs de la prairie ! » 40

Heureusement, l'arrivée d'une lettre-poème de Nicolas Deguerle 41 vient alors conforter les certitudes littéraires d'Auguste de Labouisse et le reconduire ainsi à une meilleure estime de son œuvre propre.

Ce poème de Nicolas Deguerle répond à celui qu'Auguste de Labouisse lui a spontanément adressé, il y a peu, pour lui dire l'admiration qu'il voue à son œuvre poétique, mais aussi pour lui faire part de la déception qu'il a éprouvée à la lecture de sa dernière publication.

Dans son poème initial, Auguste de Labouisse se plaignait de ce que, renonçant à la poésie amoureuse, celle « des jeux de la tendresse / et des douces erreurs qui charment la jeunesse », M. Deguerle ait choisi de ne plus chanter désormais, sur le mode de la poésie épique, que « l'horreur des combats, / Pyrrhus et ses exploits célèbres dans la Grèce, / et Pâris moissonné par un honteux trépas ».

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Buste de Pyrrhus, trouvé dans la Villa des Papyrus à Herculaneum, conservé au Museo Archeologico Nazionale de Naples.

Et le même Auguste de Labouisse, dans ce même poème, pressait le nouveau poète épique de revenir à sa veine antérieure, qui était celle de la poésie légère.

« Non, revenez à ces rimes légères
Où vous vantiez les grâces de THAÏS,
À ces peintures bocagères,
À tous ces jolis riens au Parnasse applaudis,
Et répétés par toutes nos bergères.
Vos poèmes pompeux vaudront-ils donc jamais
Ces vers charmants, ces faciles couplets
Qui vous ont aplani les routes de la gloire... ?
Il est plus d'une place au temple de Mémoire ;
Pour y monter vainqueur, il est plus d'un sentier :
Le myrte, ainsi que le laurier,
Ceint plus d'un front célèbre ennobli par l'histoire.
Anacréon 42 vit encor de nos jours :
Anacréon ne sut qu'aimer et boire,
Et ne chanta que les Amours. » 43

Après lui avoir adressé cette injonction audacieuse, voire risquée, Auguste de Labouisse reçoit de M. Deguerle, toujours sous forme de poème, une réponse des plus aimables, quoique non dénuée d'une discrète ironie, réponse dans laquelle ledit M. Deguerle argue de son âge qui avance pour confirmer son renoncement irrévocable aux « amusements de l'âge d'or » et à la « plume des Amours ». Par suite, M. Deguerle invite M. de Labouisse à lui succéder dans la carrière et à continuer d'user de la « plume des Amours », d'où, en somme, à relever à son tour l'héritage du vieil, et cependant toujours jeune Anacréon...

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Eugène Delacroix (1798–1863), Anacréon et une jeune fille, s.d., Musée Eugène Delacroix, Paris.

« C'est à vous, aimable rimeur
D'ingénieuses bagatelles,
C'est à vous à chanter les belles
Dans l'âge riant du bonheur.
Un luth gracieux et sonore
De votre éloge a retenti ;
Et la nouvelle Éléonore
Aime en vous un nouveau Parny. » 44

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Antoine Watteau (1684–1721), Le Mezzetin, 1717-1719, Metropolitan Museum of Art, New York.

La malice est ici dans les « bagatelles », dont Nicolas Deguerle concède qu'elles sont chez Auguste de Labouisse « ingénieuses ». Mais le même Auguste de Labouisse ne s'était-il pas risqué à parler des « jolis riens » ou des « faciles couplets » de M. Deguerle, et même à dire M. Degerle « pompeux » dans le style épique ?

Quoi qu'il en soit de l'orgueil ou de la susceptibilité de l'un et de l'autre, sachant le goût d'Auguste de Labouisse pour les Poésies érotiques du chevalier de Parny, Nicolas Deguerle ne pouvait mieux porter assistance à un poète alors ébranlé par les sarcasmes de la critique et doutant par suite de son génie propre, qu'en le qualifiant de « nouveau Parny ».

Dans le même temps, « l'ardente étincelle du feu », a été une fois encore propice au JUSTE qui rêvait de PÉCHER SEPT FOIS PAR JOUR... »

Le 25 octobre 1807, Éléonore de Labouisse met au monde une petite Isaure de Labouisse. Isaure... don des Muses... nouvel avatar de la mythique Clémence Isaure, restauratrice des Jeux floraux de Toulouse au XVe siècle... augure d'un nouvel avenir de la poésie...

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25 octobre 1807. Naissance d'Isaure de Labouisse. AD09. Saverdun. Naissances. An XI-1815. Document 1NUM/4E3818. Vue 271.

Auguste de Labouisse redouble, ou plutôt retriple d'amour pour son « aimable » Éléonore, et, rendant ainsi au mot aimable sa valence première, il le dit sur le ton prophétique de la sibylle au visage latin qui annonce l'éternel retour du souffle de l'amour et des parterres de roses de la déesse Flore.

TROIS fois te voilà mère, aimable Éléonore !
Trois fois mon cœur a tressailli d'amour ;
Et trois fois j'ai béni le bonheur de ce jour,
Qui te rend bien plus chère et bien plus belle encore.
Ainsi que ce rosier, dont s'enorgueillit Flore,
Voit naître de sa tige un parterre de fleurs,
Ainsi de ton beau sein les pudiques douleurs,
Chère épouse, ont produit ADOLPHE, HORTENSE, ISAURE.

Pressé toujours de la même émotion augurale, Auguste de Labouisse voue son nouvel enfant et les autres à la félicité que garantit la vertu, plutôt qu'à la renommée, douteux effet de quelque beauté vénusienne ou de quelque autre don, source d'aventures de fortune. Et il songe sans doute à lui-même quand il frappe ce mot : « Moins de renom, plus de félicité ».

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Portrait d'Isaure de Labouisse, peint par Mme Éléonore de Labouisse, in Les Amours, À Éléonore, recueil d'élégies, par M. Labouïsse, Paris, P. Didot l'Aîné, troisième édition, 1818, p. 227.

« Dieu ! quelle émotion, ô mon Éléonore,
Et quels transports pour ton heureux époux
Quand il serre en tes bras, qu'il voit sur tes genoux
Ce nouveau rejeton de l'objet qu'il adore !
Je ne désire point que, semblable à Vénus,
Isaure, en tous les lieux, voie adorer ses charmes ;
Trop souvent la beauté cause bien des alarmes ;
Et j'aime bien mieux des vertus.
C'est le seul vœu qui soit digne d'un père :
Qu'ai-je besoin que son nom soit cité ?
Moins de renom, plus de félicité ;
Tel est l'avenir que j'espère
Pour ma triple paternité. »

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Nature morte à la musette, École française du XVIIIe siècle, source inconnue, image empruntée au site Facebook Iconographie de la musette.

Et Auguste de Labouisse chante encore son bonheur « sur son humble musette », et celle-ci sonne de façon si tendre, qu'elle précipite l'approche de la nostalgie :

Amour, hymen, charmes de ma retraite,
De vos plaisirs enivrez un poète
Dont le destin doit faire des jaloux ;
Et, renouvelant une fête,
Qui pour mon cœur a des attraits si doux,
Fortuné père, heureux époux,
Je redirai sur mon humble musette :
Jours de bonheur, que sitôt on regrette,
Jours de bonheur, soyez moins prompts pour nous ! » 45

Et les amours continuent de brûler haut entre Auguste de Labouisse et « son » Éléonore. Le 1er janvier 1808, tellement reconnaissant du plaisir et du bonheur qu'Éléonore lui donne, il lui adresse en guise de vœux, le manuscrit de ses SOUVENIRS — celui qu'il publiera plus tard sous le titre de Souvenirs politiques et littéraires — et, gardé jusqu'alors sous le boisseau, car relatif à des aventures plus anciennes — l'ensemble de ses poésies érotiques :

« Quand, de Chaulieu 46 suivant les traces,
Un écrivain dans ses vers ingénus
Ose tout peindre, et l'Amour et Vénus ;
Pour éviter de fatales disgrâces,
Il doit offrir ces joyeux orémus
À la plus aimable des Grâces. » 47

Et, les amours continuant de brûler haut entre Auguste de Labouisse et « son » Éléonore, M. de Labouisse adresse à son ami M. de Kérivalant un poème dans lequel il lui confirme que, nonobstant les sarcasmes, il entend continuer à suivre ses « penchants », et en conséquence à poursuivre son œuvre de défense et d'illustration de l'amour, ou plutôt de l'Éros conjugal.

« Je ne veux rien changer à mes penchants :
Qu'on blâme en vers malins ma conjugale ivresse ;
Éléonore seule a toute ma tendresse,
Et seule Éléonore inspirera mes chants. » 48

Mais l'éclat d'une telle déclaration recouvre le malheur d'une solitude dont Auguste de Labouisse laisse entendre qu'il en souffre plus qu'il ne peut le dire au sein même d'un bonheur éclatant. Cette solitude lui vient de ce qu'un reste de regret de quelque gloire littéraire, à laquelle peut-être il eût dû, ou pu atteindre, rend, au moins dans le secret de l'intime, son âme intranquille. Peut-on, doit-on se satisfaire de « cultiver en secret les filles de Mémoire » [les Muses] et de demeurer ainsi aux yeux du monde, un écrivain, un poète ignoré ? Dans les quelques vers qui suivent, Auguste de Labouisse tente de dire, sous le manteau de l'antiphrase, la part d'amertume déniée que recèle son bonheur.

« Trop heureux le mortel qui sait borner ses vœux.
[...]
Son cœur n'est occupé que de chastes amours,
Son corps est toujours sain ; et son âme, tranquille.
Jamais de noirs chagrins il ne fut dévoré :
Que son nom s'éteigne sans gloire ;
Satisfait de vivre ignoré,
Il cultive en secret les filles de Mémoire :
Deux mots, et c'est assez, composent son histoire
Il vécut juste, et fut pleuré. » 49

Le malaise dont Auguste de Labouisse semble se défendre ici, se manifeste, de façon qu'on remarque, à chacune des naissances de ses enfants. Il délégue initialement à Adolphe, son fils nouveau-né, le soin de lire un jour, « avec respect », les mots qui seront gravés plus tard sur sa tombe : « Ici repose un modeste poète ». Puis, comme on voit après la naissance d'Hortense, puis celle d'Isaure, comptant seulement que les mots gravés sur sa tombe parleront d'eux-mêmes — mais à qui ? — il ne délégue plus à personne le soin de les lire. Outre quelques rares vrais amis ou quelques pairs célèbres, mais vieux — M. de Kérivalant et M. Deguerle, entre autres —, il n'a que son épouse qui le lise. D'où l'empressement qu'il met à lui offrir ou à lui présenter ses manuscrits, y compris les érotiques plus anciens, qu'il sait Éléonore capable de lire sans en être jalouse. Il lui délégue ainsi le soin d'être, en son temps et à son échelle, le témoin et la mémoire d'une trajectoire littéraire qui n'en finit pas, depuis ses débuts, de viser son orient.

C'est dans ce souci de juste reconnaissance qu'il présentait ses Mémoires à Éléonore, le 1er janvier 1808 :

« Oui, c'est à toi que ton époux adresse
Ce recueil, confident de tous mes SOUVENIRS.
Je marie en mes jeux, par un fol assemblage,
L'anecdote naïve au mordant persiflage,
Sans épargner les bonzes, les fakirs,
Les préjugés qu'enfante un sot usage,
Ni les auteurs, ni même les vizirs.
Protège d'un souris ce léger badinage ;
La gloire d'un pareil suffrage
Doit suffire à mes SOUVENIRS. »

C'est dans ce même souci de reconnaissance qu'il présente aussi à Éléonore, en août 1808, ses premiers poèmes érotiques :

« Aux premiers jours du printemps de mon âge,
Dans ses essais, ma muse trop volage
Errait capricieuse, imitant les zéphyrs
Qui vont de fleur en fleur prodiguer leur hommage ;
Le temps, l'amour, l'hymen, ont su la rendre sage,
Et me donner d'aimables SOUVENIRS.
[...]
Et, sans prétendre excuser ma faiblesse,
Contre les froids censeurs de mes jeunes loisirs,
Je me prépare, aux jours de ma vieillesse,
La ressource des SOUVENIRS. » 50

Le mot SOUVENIRS revient sous la plume d'Auguste de Labouisse en 1808 de façon obsédante. Une ombre dont nul autre que lui, semble-t-il, ne peut pressentir la portée, lève à l'horizon de son paradis.

« Quel chagrin près de toi pourrait me tourmenter ? » écrit pourtant Auguste de Labouisse à l'intention d'Éléonore.

« Lorsqu'en mes bras te conduisit ta mère,
Des plaisirs la troupe légère
Suivit tes pas, pour ne plus nous quitter.
Sur nos devoirs bien doux, l'amour et l'innocence
Viennent répandre leurs attraits,
Et sur ton sein je m'enivre à longs traits
D'une céleste jouissance.
J'y goûte mieux le retour des saisons,
Et les plaisirs que chacune nous donne ;
De plus brillantes fleurs le printemps se couronne ;
Je recueille en été de plus riches moissons,
Des fruits plus vermeils en automne :
Et, quand le sombre hiver vient attrister nos champs,
Assis à tes côtés près d'un feu qui pétille,
Sur notre naissante famille
Quel plaisir de tourner nos entretiens touchants !
ADOLPHE si léger, HORTENSE si gentille,
ISAURE, dernier fruit de nos pures amours,
Vous êtes seuls l'objet de nos discours ;
Nous partageons les plaisirs de votre âge ;
Nous deux avec vous trois nous devenons enfants.
Ah ! poursuivez votre heureux badinage !
Jouez, riez, chantez, objets intéressants,
Vous, en qui votre mère a peint sa belle image,
De quel doux avenir vos aimables penchants
Nous offrent le riant présage !
Héritez de nos goûts et de nos sentiments ;
Croissez, développez votre active jeunesse ;
Par vos petits ébats vous charmez nos beaux jours ;
Et l'aspect ravissant de vos tendres amours
Viendra charmer plus tard notre heureuse vieillesse. » 51

« Nous deux avec vous trois nous devenons enfants... »

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Tombeau d'Isaure de Labouisse, Chasselet del., Adam sculp. In Les Amours, À Éléonore, recueil d'élégies, par M. Labouïsse, p. 237.

Le 24 juillet 1808, la petite Isaure de Labouisse meurt à l'âge de 9 mois. Tel que peint par Éléonore de Labouisse, le portrait d'Isaure fillette que l'on voit reproduit ci-dessus, n'aura donc été qu'un portrait rêvé.

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24 juillet 1808. Décès d'Isaure de Labouisse. AD09. Saverdun. Décès. An XI-1815. Document 1NUM/4E3835. Vue 156.

La peine d'Auguste et d'Éléonore de Labouisse est terrible. « Et tout ce qu'on aimait n'est plus qu'ombre et poussière... »

« ISAURE, objet chéri, bel ange de lumière,
Par un arrêt divin où se perd ma raison,
ISAURE, tu n'es plus ; je reste solitaire.
[...]
Près de ces lugubres cyprès,
Où trouver aujourd'hui ces flatteuses chimères,
Ces espérances mensongères
Qui m'abusaient d'un sourire imposteur ?
De cet avenir séducteur
Que reste-t-il à mon âme isolée ?
De tristes souvenirs, un sombre mausolée,
Où d'un père attendri doit veiller la douleur.
ISAURE, pour toujours de nos yeux exilée,
Emporte pour toujours ma joie et mon bonheur. » 52

À une épître de M. Jacques Antoine Carbonell, professeur de Belles-Lettres au pensionnat de Perpignan, père lui-même d'une fillette depuis 1805, et ignorant du deuil de son ami, le félicite pour ses poèmes et l'encourage à persévérer dans sa voie personnelle, Auguste de Labouisse, après l'avoir remercié de ses mots d'amitié et lui avoir fait part de la mort d'Isaure, répond qu'il a pris une décision radicale.

« Ah! conservez-moi bien cette indulgence aimable !
Les muses n'ont qu'un temps, l'amitié plaît toujours.
Six lustres m'ont, hélas ! rendu trop raisonnable,
Et je renonce au luth des Troubadours.
[...]
J'abandonne les vers. » 53

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Arnold_Böcklin, Quell in einer Felsschlucht [Source dans une gorge rocheuse], 1881, Getty Center, Los Angeles, USA.

« J'abandonne les vers ». Auguste de Labouisse le confirme à l'intention de ses Amis lecteurs dans l'Épilogue qui marque la fin son livre des Amours. Il prie ces Amis de respecter sa douleur et de se souvenir qu'il n'a été rien d'autre qu'un modeste poète, indigne somme toute que quiconque se souvienne de son nom.

« Dans nos promenades champêtres,
Amis, si pendant mes beaux jours,
Sous l'ombrage épais de ces hêtres,
Ma muse a chanté les AMOURS,
Je suis loin de prétendre au grand nom de poète.
Pour quelques petits airs, dont ma tendre musette
Sur les bords de l'Ariège a charmé vos loisirs,
Qu'un orgueilleux laurier ne pare point ma tête ;
Je ne songeai qu'à peindre mes plaisirs.
Hélas ! ces plaisirs vains n'étaient qu'un doux mensonge,
Qu'un prélude de ma douleur.
Ah ! comment chanter le bonheur,
Lorsque, s'enfuyant comme un songe,
Il laisse un trait mortel dans le fond de mon cœur ?
ISAURE, tu n'es plus ; et l'on m'offre des roses
Pour prix de mes vers amoureux !
Changez, dignes amis, un dessein généreux :
Éloignez de mon front ces fleurs fraiches écloses ;
Un cyprès convient seul à qui n'est plus heureux. » 54

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Arnold Böcklin, L"île des morts, détail de la première version, 1880, Kunstmuseum, Bâle.

À suivre... Auguste Labouisse-Rochefort et la Société philotechnique de Castelnaudary. 7. Une figure oubliée. De 1808 à 1821


  1. Les Amours, À Éléonore, recueil d'élégies, par M. Labouïsse, « À Éléonore. Mes adieux à Paris», pp. 193-194.↩︎

  2. Ibidem, p. 194.↩︎

  3. M. de Labouisse-Rochefort, Trente ans de ma vie (1795-1826) ou Mémoires politiques et littéraires, tome V, p. 290, 291, 340, 347.↩︎

  4. Ibidem, p. 347.↩︎

  5. Suzanne Verdier, née Suzanne Allut (Montpellier, 1745-1813, Uzès), poète, peintre, musicienne, publiée à partir de 1775 dans l'Almanach des Muses et dans les recueils de l'Académie des Jeux floraux. Rendue célèbre après sa mort par la publication de sa Description de la Fontaine de Vaucluse et de ses Géorgiques du Midi. Cf. Wikipedia : Suzanne Verdier.↩︎

  6. Ibid., p. 507.↩︎

  7. Ibid., p. 508.↩︎

  8. Ibid., p. 508-509.↩︎

  9. Anne Marie Gaultier de Montgeroult de Coutances (1763-1834), femme de lettres, éditrice ; fille de René Guillaume de Montgeroult de Coutances, trésorier général de la maison du roi, et d’Anne Élisabeth Marsollier des Vivetières ; nièce de Benoît Joseph Marsollier des Vivetières, dit le chevalier du Grand-Nez, auteur dramatique et librettiste d’opéras-comiques ; mariée en premières noces (1781) à Joseph Jean Marie Michel de Brandouin de Beaufort, puis en secondes noces (1796) à Charles Marie Benjamin d'Hautpoul. Cf. Wikipedia : Anne Marie de Beayfort d'Hautpoul.↩︎

  10. Cf. supra, note 5.↩︎

  11. Mme la comtesse d'Hautpoul à Éléonore de Labouisse, puis Éléonore de Labouisse à Mme la comtesse d'Hautpoul, in Les Amours, À Éléonore, recueil d'élégies, par M. Labouïsse, p. 191-192.↩︎

  12. Cf. Wikipedia : Henriette Bourdic Viot.↩︎

  13. Cf. Les Amours, À Éléonore, recueil d'élégies, par M. Labouïsse, p. 126 :
    À ÉLÉONORE.
    On lit dans un très beau discours :
    SEPT FOIS PAR JOUR PÈCHE LE JUSTE.
    Qu'il serait heureux ton Auguste
    D'être ce juste tous les jours !↩︎

  14. Ibidem, « Éléonore, À Madame Verdier d'Uzès », p. 110.↩︎

  15. Ibid., « Les Regrets. À Éléonore », p. 187.↩︎

  16. Ibid., « Impromptu. À Éléonore choisissant des guirlandes de fleurs artificielles », p. 196.↩︎

  17. Ibid., « Adieu aux Muses. Par Éléonore », p. 197. Dans la Grèce antique, le Permesse, cours d'eau de Béotie qui prend sa source sur les flancs du mont Hélicon, est un dieu-fleuve au bord duquel les Muses viennent se promener et se baigner.↩︎

  18. Le Pinde est une montagne de la Thessalie, située entre la Grèce et l'Albanie, consacrée à Apollon et aux muses dans la littérature de l'Antiquité grecque.↩︎

  19. Les Amours, À Éléonore, recueil d'élégies, par M. Labouïsse, « Réponse impromptu. À Éléonore », p. 198.↩︎

  20. Ibidem, « Amarillys et Daphis », pp. 199-203.↩︎

  21. À propos de Parny, cf. Christine Belcikowski, Auguste Labouisse-Rochefort et la Société philotechnique de Castelnaudary. 5. Une figure oubliée. De 1802 à 1805.↩︎

  22. Jean Nicolas Marie Deguerle, ou de Guerle (1766-1824), homme de lettres, professeur de Belles-Lettres et d'éloquence, auteur de traductions d'auteurs latins et de pièces diverses en prose et en vers dont la plus connue est l'Éloge des perruques, parue en 1799 sous le pseudonyme du docteur Akerlio. Deguerle se trouve ici dit « ancien » parce qu'il est le beau-père du latiniste Charles Héguin de Guerle (1793-1881), homme de lettres, professeur et latiniste lui aussi, éditeur de certaines œuvres de son beau-père.↩︎

  23. Les Amours, À Éléonore, recueil d'élégies, par M. Labouïsse, « À Éléonore. En lui présentant une traduction de Tibulle, Gallus et Catulle », p. 203.↩︎

  24. Oeuvres diverses de J.N.M. De Guerle, Préface de l'Éditeur, Paris, Delangle Frères, 1829, p. V.↩︎

  25. Les Amours, À Éléonore, recueil d'élégies, par M. Labouïsse, « La lecture. À Éléonore », p. 204.↩︎

  26. 9 mai 1806. Naissance d'Hortense de Labouisse. AD09. Saverdun. Naissances AN XI-1815. Vue 204.↩︎

  27. Les Amours, À Éléonore, recueil d'élégies, par M. Labouïsse, « La naissance d'Hortenses. À Éléonore », pp. 205-206.↩︎

  28. Nicolas le Deist de Kérivalant (1750-1815), conseiller à la Chambre des comptes de Bretagne avant la Révolution, littérateur, poète et fabuliste, fondateur de la Société académique de Nantes. Auguste de Labouisse l'a connu à Paris, dans la mouvance de A. L. Millin et du Magasin encyclopédique. À la demande expresse d'Éléonore de Labouisse, qui lui écrivait de Saverdun, il s'est chargé d'annoncer « par degrés » à Auguste de Labouisse la fatale nouvelle que l'une de ses tantes, qu'il aimait beaucoup et qu'il savait malade, venait de mourir à Montréal. Source : publiée et mise en vente sur le site CD Galerie, lettre autographe de M. de Kérivalant à Mme de Labouisse.↩︎

  29. Claude Joseph Antoine François Léonard Dusillet, dit Léonard Dusillet (1769-1857), poète, ami de Charles Nodier, journaliste, historien, membre de nombreuses académies de province, maire de Dole, particulièrement engagé dans le domaine de l'action culturelle.↩︎

  30. Claude Emmanuel Lhuillier, dit Chapelle (1626–1686), membre d'un « gay trio » formé par lui-même, Savinien de Cyrano, dit de Bergerac, et Charles Coypeau d’Assoucy, dit d'Assoucy, auteur de poésies et proses galantes, dont, entre autres, avec François Le Coigneux de Bachaumont, un Voyage en Provence et en Languedoc (1656). Épitaphe de Chapelle : « Ci-gît qu'on aima comme quatre, / Qui n'eut ni force ni vertu, / Et qui fut soldat sans se battre, / Et poète sans être battu. »↩︎

  31. Les Amours, À Éléonore, recueil d'élégies, par M. Labouïsse, « À M. de Kérivalant ». Poème inspiré de Martial, livre X, Epigramme 47 : « - À JULIUS MARTIAL. Voici, mon cher Martial, les éléments de la vie heureuse : une fortune acquise sans peine et par héritage ; un champ qui rapporte ; un foyer qui toujours brûle ; point de procès ; peu d'affaires ; la tranquillité de l'esprit ; un corps suffisamment vigoureux ; une bonne santé ; une simplicité bien entendue ; des amis qui soient nos égaux ; des relations agréables ; une table sans faste ; des nuits sans ivresse et libres d'inquiétude ; un lit où il y ait place pour la joie et pour la pudeur ; un sommeil qui abrège les ténèbres ; se contenter d'être ce que l'on est, et ne rien désirer de plus ; attendre son dernier jour sans crainte comme sans impatience. »↩︎

  32. Ibidem, « Le tableau. À Éléonore », p. 209. ↩︎

  33. Ibid., « Vers placés sous le portrait de ma mère, peint par Éléonore », p. 225.↩︎

  34. Ibid., « La vaccine ».Cf. Alexandre Soumet (1786-1845), La découverte de la vaccine, poème couronné par la seconde Classe de l’Institut le 5 Avril 1815.↩︎

  35. Ibid., « À Éléonore qui apprehendait de me paraître trop tôt vieille », p. 212.↩︎

  36. Cf. Christine Belcikowski, Auguste Labouisse-Rochefort et la Société philotechnique de Castelnaudary. 3. Une figure oubliée. De 1796 à 1802.↩︎

  37. Les Amours, À Éléonore, recueil d'élégies, par M. Labouïsse, « À M. Auguste de Labouisse sur ses voyages en vers et en prose », p. 214.↩︎

  38. Ibidem, « Réponse à M. de Kérivalant », pp. 215-216. M. de Kérivalant avait commencé à traduire en vers les Élégies de Tibulle ; mais il a renoncé à cette entreprise, quand il a su qu'un autre traducteur l'avait entreprise et menée à bien avant lui.↩︎

  39. Didot : nom d'une dynastie d’imprimeurs, éditeurs et typographes dont l'activité a commencé au début du XVIIIe siècle et s'est poursuivie jusqu'à la fin du XXe siècle.↩︎

  40. Les Amours, À Éléonore, recueil d'élégies, par M. Labouïsse, « Muse », pp. 221-225 passim.↩︎

  41. Cf. supra note 22.↩︎

  42. Anacréon (550-464 av. J.-C.) est un poète grec, originaire des côtes de l'Asie mineure. Réputé inspiré par Dionysos, il s'est consacré à la poésie amoureuse et à la poésie de banquet, et ses vers restent particulièrement appréciés pour leur légèreté et leur charme.↩︎

  43. Les Amours, À Éléonore, recueil d'élégies, par M. Labouïsse, « À M. Deguerle. À propos de plusieurs fragments épiques, publiés sous son nom dans quelques journaux », pp. 217-218.↩︎

  44. Ibidem, « Réponse à M. de Labouisse par M. Deguerle », pp. 219-220.↩︎

  45. Ibid., « La naissance d'Isaure », pp. 227-228.↩︎

  46. Fils d'un maître des comptes de Rouen, l'abbé Guillaume Amfrye de Chaulieu (1639-1720) jouit précocément de la faveur de Louis Joseph de Bourbon, duc de Vendôme, qui lui fait obtenir le bénéfice de l'abbaye d'Aumale. Il devient le compagnon de libertinage et le conseiller du duc Louis Joseph et de son frère, Philippe de Vendôme, grand prieur des chevaliers de Malte en France, notoirement homme à femmes par ailleurs. Plus tard, il fait partie de l'entourage de la duchesse du Maine à Sceaux, et il reçoit des mains de la duchesse la médaille de l'ordre drôlatique de la Mouche à miel. Maître des vers de société, il excelle aussi dans la poésie libertine et laisse dans le genre anacréontique de belles évocations du château de Beauregard et de Fontenay-en-Vexin, qui ont été ses lieux de naissance et de villégiature.↩︎

  47. Ibid., « À Éléonore. Envoi de mes poésies érotiques ».↩︎

  48. Ibid., « Réponse à une épître de M. de Kérivalant », pp. 229-230.↩︎

  49. Ibid., « La solitude », pp. 231-232.↩︎

  50. Ibid., « À Éléonore, en lui présentant le manuscrit de mes SOUVENIRS », pp. 233-234.↩︎

  51. Ibid., « À Éléonore. Imitation de la matinée d'automne de Gessner », pp. 235-236.↩︎

  52. Ibid., « À Éléonore. La tombe d'Isaure », pp. 237-238.↩︎

  53. Ibid., « À Éléonore. Réponse à une épître de J. A. Carbonell. ↩︎

  54. Ibid., « Épilogue », p. 240.↩︎

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