Maison obscure…
maison de nœuds, de nerfs,
de sang et d’os,
abritée du soleil.
C’est la tienne.
Les arbres ont trop poussé.
Les violettes grouillent, grasses,
sous l’ombrage,
et un buis, tout petit, s’y attarde,
ignoré jusqu’ici des chenilles.
Maison obscure…
maison de dols, de deuils,
d'alarmes,
hantée de mauvais rêves.
C’est la tienne.
Les armoires débordent de secrets mal vécus,
vieilles noix qu’on écrase en marchant,
comme des vesses de loup,
dont ne sort, sous le pied, qu’une poudre fumeuse.
Il n’y a plus de loups derrière les armoires,
quand on est vieux,
crois-tu.
Garde-toi bien quand même...
Ils sont toujours là…
solubles dans l’air…
patients…
sûrs de leurs fins...
sûrs de leur droit…
— Quel droit ?
La vie va sans droit…
En 1787, après avoir loué l'emplacement au baron Charles Jean Goury de Champgrand, lieutenant-colonel de dragons, homme de lettres, ami du duc d'Orléans, Luc Charles Joseph Corazza, noble d'origine gênoise, ouvre sous les arcades 7 à 12 du Palais-Royal le café du même nom. À partir de 1789, le café Corazza draine parmi sa clientèle bon nombre de Jacobins, qui se plaisent à venir y déguster, après les séances de l'Assemblée ou de leur club des Amis de la Constitution, des glaces au marasquin. Pierre Jean Berthold de Proli [cf. infra], ami du baron de Champgrand, occupe un somptueux appartement au-dessus du café Corazza. Au sous-sol se trouve une salle de bal, surnommée alors le Pince-Cul.
Le 22 février 1790, après une carrière d'auteur dramatique resté jusqu'alors médiocrement apprécié, Fabre d'Églantine fait jouer à la Comédie-Française Philinte de Molière, ou La suite du Misanthrope, comédie en cinq actes et en vers qui lui vaut son premier et seul vrai grand succès. Jean Jacques Rousseau regrettait que, dans son Misanthrope, Molière n'ait pas imprimé « un tel changement à son plan que Philinte entrât comme acteur nécessaire dans le nœud de la pièce, en sorte qu’on pût mettre les actions de Philinte et d’Alceste dans une apparente opposition avec leurs principes » (1). Fabre d'Églantine, lui, a opéré ce changement dans son Philinte et composé de la sorte une pièce conçue pour faire écho aux aspirations révolutionnaires du public de 1790. Il est à cette date membre du club des Cordeliers, ami de Georges Jacques Danton, de Guillaume Marie Anne Brune, le futur maréchal, et du journaliste Louis Marie Stanislas Fréron, lui aussi futur député à la Convention.
Fabre d'Églantine, Le Philinte de Molière, ou La suite du Misanthrope, comédie en cinq actes et en vers, représentée au Théâtre François, le 22 février 1790, Paris, chez Prault, imprimeur du Roi, 1791.
En janvier 1793, Jean Marie Girey-Dupré (1769-21 novembre 1793, guillotiné), ex-sous-bibliothécaire à la Bibliothèque royale, Girondin déclaré, directeur éditorial du Patriote français, le journal de Jacques Pierre Brissot, puis fondateur du journal La légende dorée, publie dans La Chronique de Paris un Noël qui vise certains Conventionnels et qui, après les massacres de Septembre et l'élection des députés à la Convention, dans un climat politique délétère, marqué par l'intensification de la lutte entre les Girondins et les Jacobins, fait florès. Jean Marie Girey-Dupré sera guillotiné le 21 novembre 1793, avec Gabriel Nicolas François de Boisguion, un ami Girondin. Cf. Christine Belcikowski, À propos du carnet de Robespierre, III.3.1. Jean Marie Girey-Dupré et Gabriel Nicolas François de Boisguion.