De gauche à droite : Robespierre à la tribune de la Convention ; Proudhon à la tribune de l'Assemblée nationale le 11 juillet 1848.
I. Pierre Joseph Prouhon
Figure du socialisme libertaire, précurseur de l'anarchisme, Pierre Joseph Proudhon (1809-1865), originaire du Doubs comme son ami Gustave Courbet, est fils d'un tonnelier et d'une cuisinière. D'abord placé comme bouvier, il poursuit ensuite une scolarité brillante au Collège royal de Besançon. Mais contraint d'abandonner ses études avant le baccalauréat en raison de la situation financière difficile de son père, il devient ouvrier typographe, puis correcteur. En 1838, après avoir fondé une imprimerie qui fait rapidement faillite, il obtient le baccalauréat, se présente au concours de l'Académie des sciences, belles-lettres et arts de Besançon, et obtient une bourse qui lui permet de s'installer à Paris, de suivre des cours à l'Université et de fréquenter assidument les grandes bibliothèques. Fort de l'étendue de ses lectures et de son expérience, il publie en 1841 son Qu'est-ce que la propriété ?, qui fait immédiatement scandale. En 1843, il quitte Paris pour exercer à Lyon un emploi dans une grande maison de transports fluviaux. Dans le même, à Paris où il remonte souvent, il fait la connaissance de Michel Bakounine, d'Alexandre Herzen, et aussi de Karl Marx, avec qui il ne s'entendra pas.
De gauche à droite : Mikhaïl Aleksandrovitch Bakounine ou Michel Bakounine (Priamoukhino, Russie, 1814-1876, Berne, Suisse) ; Alexandre Ivanovitch Herzen ou Alexandre Herzen (Moscou, 1812-1870, Paris) et son fils en 1840 ; Karl Marx (Trèves, Allemagne, 1818-1883, Londres,).
En 1847, réinstallé à Paris, Proudhon fonde Le Représentant du peuple, sous-titré Journal quotidien des travailleurs. Réforme économique. Banque d'échange. En 1848, il participe au soulèvement du mois de février, il est élu député à l'Assemblée constituante en avril, et il vote contre la Constitution en novembre, « parce que c'est une Constitution ». Condamné en mars 1849 pour « excitation à la haine et au mépris du gouvernement de la République, attaque contre la Constitution, attaque contre le droit et l'autorité que le Président de la République tient de la Constitution et excitation à la haine et au mépris des citoyens les uns contre les autres », il est incarcéré à Sainte-Pélagie le 5 juin 1849, et il n'en ressortira que le 4 juin 1852. C'est à Sainte-Pélagie qu'il écrit Idée générale de la Révolution au XIXe siècle, Choix d'études sur la pratique révolutionnaire et industrielle, ouvrage publié en 1851.
Cour intérieure de la prison Sainte-Pélagie, photographiée avant 1895 par Nadar.
À partir de 1852, Proudon se déchaîne contre Napoléon III, contre la Bourse, et contre l'Église. Menacé à nouveau de prison en 1858, il doit s'exiler en Belgique et y demeure jusqu'en 1862. En 1863, il participe à Londres à la création de la Première Internationale. Il meurt le 19 janvier 1865 à Paris, après avoir publié plus de soixante livres.
De gauche à droite : Danton à la tribune de la Convention ; Robespierre à la tribune de la Convention ; Hugo député de la deuxième République en 1848.
Dans « Réponse à un acte d'accusation », long poème recueilli dans les Contemplations (I, VII) en 1856, Victor Hugo, bouillant fauteur de la bataille d'Hernani au théâtre en 1830 déjà, poursuit la même bataille contre ceux qui lui « crient raca » (1), grammairiens et autres sectateurs « du bon goût et l’ancien vers françois », au motif qu'il aurait en poésie « saccagé le fond tout autant que la forme », et que, « démagogue horrible et débordé », il aurait « dévasté le vieil ABCD » ! Oui, oui, en 1837, Victor Hugo a osé publier dans Les Voix intérieures un poème vulgairement intitulé « La Vache » ! et il y use même, quelle horreur ! du mot « ventre » ou encore du mot « pis » ! — Et pourquoi pas ? leur rétorque en substance le député de la République née de la révolution de 1848, puis, depuis Guernesey où il a dû s'exiler, le pourfendeur de « Napoléon le petit ».
Initialement monarchiste, Victor Hugo s'affirme ensuite ardent républicain. Il se veut ainsi, après Danton et après Robespierre, porte-parole des libertés qui, quoique encore bafouées, sont a priori celles du peuple, donc celles de l'écrivain aussi : « J’ai dit aux mots : Soyez république ! soyez / La fourmilière immense, et travaillez ! croyez, / Aimez, vivez ! ». « Qui délivre le mot, délivre la pensée. » (2)
Victorien Sardou (1831-1908), élu à l'Académie française en 1877, est l'auteur heureux d'une centaine de pièces, comédies de caractère, drames bourgeois, et drames historiques, dont Thermidor en 1891 et Robespierre en 1899.
Anatole France en 1905, par Auguste Leroux (1871–1954).
François Anatole Thibault, alias Anatole France (1844-)1924), élu à l'académie française en 1896, prix Nobel de littérature pour l’ensemble de son œuvre en 1921, est fils d'un libraire spécialisée dans les ouvrages et documents sur la Révolution française. De la riche connaissance de cette période qu'il a développée depuis son enfance, il tire en 1912 la matière des Dieux ont soif, roman consacré aux heures sombres de la Terreur à Paris. Les événements sont vus par les yeux d'Évariste Gamelin (1), jeune peintre, un peu simple, engagé dans la Révolution au côté des Jacobins, admirateur de Marat, puis de Robespierre.
En août 1793, Évariste Gamelin est nommé juré au Tribunal révolutionnaire. Le 11 vendémiaire an II (2 octobre 1793), au club des Jacobins, il se trouve captivé par le discours de Robespierre qui prononce « d’une voix claire un discours éloquent contre les ennemis de la République ». Une semaine plus tard, le 19 vendémiaire an II (10 octobre 1793), la Convention promulgue par décret que « le Gouvernement provisoire de la France est révolutionnaire jusqu'à la Paix ». Ici commence, sous le couvert d'un décret qui dit le plus en disant le moins, le régime d'exception, que l'on qualifiera plus tard de régime de la Terreur.
Le 31 octobre 1793, Jacques Pierre Brissot et 20 autres Girondins sont guillotinés.
Le 24 mars 1794, Jacques René Hébert et 17 autres Exagérés sont guillotinés.
Le 5 avril 1794, Georges Danton et 14 autres Indulgents sont guillotinés.
Entre temps, Évariste Gamelin a appris de « la sagesse de Robespierre » ce que sont « les crimes et les infamies de l’athéisme », et il a commencé à voir Dieu dans les juges du Tribunal révolutionnaire, ou encore le Diable dans le vieux Maurice Brotteaux, ci-devant noble sous le nom de M. des Ilettes, selon qui « la peine de mort est légitime, à la condition qu’on ne l’exerce ni par vertu ni par justice, mais par nécessité ou pour en tirer quelque profit ».
Le 11 thermidor, après avoir rejoint Robespierre à l'Hôtel de ville dans la nuit du 8 au 9 thermidor, Évariste Gamelin est guillotiné à son tour. « Nous nous trompions, c’est vaincre et mourir qu’il fallait dire. Nous disions : Vaincre ou mourir. La patrie maudissait ses sauveurs. Qu’elle nous maudisse et qu’elle soit sauvée ! »
Venu d’ailleurs, du corps, de l’âme, des confins
du rêve éveillé,
le printemps te souvient d’avoir été
vivant, vivante,
vivants !
ce pluriel te soulève
et dans sa main ailée mûrit déjà
le souffle jaune de l’été
qui vient, viendra
le temps va vite
dès l’instant qu’il s’entr’ouvre
la pensée te vient de façon pulsatile
que tu n’es pas maître, pas maître,
dans ta propre maison
il fait froid ce matin
où se tiennent invisibles les anges veilleurs ?