Clytemnestre, la rouge

Cachée dans l’ombre rouge
d’une tenture à longs plis,
Clytemnestre hésite à frapper.
L’homme ronfle.
Dieu, que sa barbe est rousse,
son nez fort, son corps gras !
Âcre, chaude,
une fumée lui monte aux narines.
La marmite déborde dans la cheminée !
Egisthe va se plaindre encore,
βλόψ ! comme à son habitude !
Le règne des hommes est ingrat,
surtout celui des amants verts et beaux.
βλόψ ! comme un caillou dans l’eau.
Cachée dans l’ombre rouge,
Clytemnestre s’embrase maintenant
d’un feu plus rouge encore.
On m’a tué un jour ma douce Iphigénie,
ὀᾶ, ma petite Iphi, ma tourterelle !
C’est ta faute à toi,
l’homme qui dort,
et qui ronfle !
Un homme qui dort, dit l’autre que j’ai lu dans une vie antérieure,
tient en cercle autour de lui,
le fil des heures, l’ordre des années et des mondes.
Eh bien ! ὄφ !
je coupe le fil !
Essuyant ensuite son couteau
au lin de sa tunique,
elle voit tomber sous elle
une étoile de sang.
Φεῦ, mes menstrues ! ((Sens des interjections grecques : βλόψ (blops), bruit d’un caillou qui tombe dans l’eau ; ὀᾶ (oah), hélas ; ὄφ (oph), cri de douleur ou de crainte ; φεῦ (pheou), oh !))