A Mirepoix, en 1749. Le sacristain Calvet rend compte des funérailles de Paul Louis de Lévis, seigneur et marquis de Léran

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Le sacristain Calvet rend compte de ces funérailles dans le registre paroissial de la cathédrale Saint Maurice 1Cf. Archives départementales de l’Ariège. Document 1NUM5/5MI664. Vues 82 et 83 / 597..

« Pour mémoire.

Le 29 avril 1749 est décédé M. le Marquis de Léran, brigadier des armées du roy, dans son château de Léran. Dès après sa mort, on le revêtit de son ancien uniforme, on lui mit sa perruque et son chapeau, ses bas soulevés et tirés, et son épée, et on le laissa exposé sur un fauteuil tout le lendemain, trentième du dit mois.

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Ci-dessus : à Léran, enregistrement du décès de Paul Louis de Lévis.

Le premier may, jour suivant, M. le Curé de Léran, assisté de M. le Curé de Laroque, firent enlever son corps avec les prières accoutumées. Ensuite on mit le cadavre dans un cercueil, et le cercueil sur un brancart (sic), et ces deux Messieurs, assistés et suivis d’un très grand nombre de domestiques et de basseaux (sic) du feu Marquis accompagnèrent le dit cadavre jusqu’à nostre croix de la mission.

Après avoir été béni sur la route de Léran à Mirepoix par Messieurs les Curés de Saint-Quentin et de La Bastidette et par le Vicaire de Mazerolles qui reçurent chacun 12 livres pour leur absoute, nous, soussigné, assisté du corps du chapitre des Cordeliers et des deux confréries des Pénitents et de Mrs les Consuls et de toute la ville, avons fait l’enlèvement du dit corps à la dite croix de la mission.

Et de là, Messieurs Tournier, Rabinel, Rouvairollis et Cairol,, officiers portant le drap mortuaire qu’on conserve au château de Lagarde, nous l’avons conduit en grande solennité par la grande promenade dite du Levant à la porte des Pénitents blancs, et ainsi jusque dans le choeur de nostre église, précédés de vingt-quatre pauvres couverts d’une cane (sic) de drap chacun et portant un cierge d’une livre.

Nous avons ensuite célébré une messe solennelle pendant laquelle Messieurs les gens du feu Marquis, couverts du deuil, et accompagnés par Messieurs les Consuls de Mirepoix, nous avons fait l’offrande qui nous a valu soixante francs.

Les Etrangers qui ont assisté à la dite messe et service ont convenu que le chapitre de Mirepoix avons rendu tout qui était dû au feu Marquis et à sa maison, que la messe avait été célébrée et chantée avec une très grande solennité. Après la messe, en la route nous sommes partis pour aller accompagner le corps dans l’Eglise des Cordeliers où nous l’avons déposé dans le choeur de la dite Eglise.

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Ci-dessus : vus depuis la rive gauche de l’Hers, le château de Mirepoix, dit château de Terride, et, au pied de ce dernier, le couvent et l’église des Cordeliers. La maison de Lévis a eu là sa nécropole jusqu’à la Révolution. Les restes des Lévis ont été ensuite dispersés.
A noter qu’en 1749, on passait l’Hers sur un pont de bois ou en barque. Le pont de pierre que l’on voit figuré sur la gravure ci-dessus sera construit dans les années 1780 et achevé en 1789 seulement.

Et après l’absoute nous nous sommes retirés, et sommes sortis par la porte du sanctuaire par le cloître et porte du dit couvent, et sommes revenus dans notre Eglise en procession.

Enfin l’agent du feu Marquis est venu dans notre maison pour nous remercier et nous a remis 48 livres pour la cire qui devra nous rester et qu’il avons (sic) fait porter aux Cordeliers pour la dispence (sic) d’en acheter de nouvelles pour l’enterrement.

Fait à Mirepoix le jour et an que dessus. Clavel sacristain. »

Gaston Pierre Charles de Lévis Lomagne est en 1749 seigneur de Mirepoix. Il descend en ligne directe de Gui Ier de Lévis († 1233), compagnon de Simon de Montfort. Paul Louis de Lévis était, avant son décès, seigneur de Léran. Il descendait, quant à lui, de Gaston VII de Léran († 1559) et de Gabrielle de Foix. C’est cette branche germaine que l’on honore lors des funérailles de 1749. Gaston Pierre Charles de Lévis Lomagne, qui n’aura pas de postérité, fera d’ailleurs de François Gaston de Lévis, marquis de Léran, petit-fils de Paul Louis de Lévis, son sucesseur à la tête de la seigneurie de Mirepoix.

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Ci-dessus : conservé à la mairie de Mirepoix, portrait de Gaston Pierre Charles de Lévis Lomagne, seigneur de Mirepoix.

Georges Martin, dans son Histoire et généalogie de la maison de Lévis, consacre à Paul Louis de Lévis la notice suivante :

« Fils de Gaston VIII de Lévis et de Jeanne de Juge, Paul Louis de Lévis, seigneur et marquis de Léran, seigneur de Carla, Pradelles, Péreilhe, Peyrat, Limbrassac, baron de La Bastide, etc. naquit en 1664. Il fut brigadier des armées du roi le 1er février 1719 ; lieutenant-colonel du régiment Royal-Dauphin, avec brevet de colonel, puis de Royal étranger, cavalerie. Le 13 juillet 1722, il dénombra ses fiefs nobles devant les trésoriers de France. En 1738, il acheta le fief de Queille. Il fut fait chevalier de l’ordre de Saint Louis le 6 avril 1749. Il testa le 4 mai 1748 et mourut au château de Léran le 29 avril 1749. Il fut inhumé à Mirepoix. Il épousa à Paris, par contrat du 11 mars 1703, Marie Marguerite Thérèse Camelle de Lévis, fille de Gaston Jean Baptiste de Lévis, marquis de Mirepoix, et de Madeleine du Puy du Fou. Celle-ci mourut à Toulouse, le 8 novembre 1755, où elle fut inhumée.

Né le 2 août 1712 à Léran, Henri Gaston de Lévis, l’un des fils de Paul Louis de Lévis et de Marguerite de Lévis, sera vicaire général de l’archevêché de Bordeaux, puis évêque de Pamiers de 1741 à 1787. Prélat fastueux, il fit de son château de Longpré, situé près de Varilhes, la plus belle des résidences épiscopales. » 2Georges Martin, Histoire et généalogie de la maison de Lévis, p. 98, Imprimerie Sud Offset, 42150 La Ricamarie, 2007.

Sensible à la solennité des funérailles que l’on réserve dans la seigneurie de Mirepoix au seigneur de Léran, le sacristain Clavel ne laisse pas pour autant de ménager l’approche comptable. L’homme est, en raison de sa charge, un professionnel des obsèques et des obituaires. On sait qe le clergé tire alors de l’accompagnement des défunts une part importante de ses revenus. Le souci de la gestion comptable renvoie aux réaltés d’un ordre qui a ses nécessités propres, et aussi ses pouvoirs, que la Révolution bientôt lui retirera.

A lire aussi :
En 1618 – Un corps passe…
En 1618 – Un corps passe… (2)
En 1618 – Un corps passe… (3)

References

1 Cf. Archives départementales de l’Ariège. Document 1NUM5/5MI664. Vues 82 et 83 / 597.
2 Georges Martin, Histoire et généalogie de la maison de Lévis, p. 98, Imprimerie Sud Offset, 42150 La Ricamarie, 2007.

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