Je découvre le site dédié aux sculptures du XIIIe siècle par le Musée de Cluny. Photos, descriptions, analyses, tout est désormais accessible online. Une merveille ! L'Internet prouve ici, de façon éclatante, sa fonction de passeur culturel.
Empruntée à la page Vue d'ensemble des oeuvres, l'image reproduite ci-contre est celle d'une gargouille, sculptée en forme de femme allaitante. Une gargouille semblable "se trouve aujourd’hui à Paris sur le troisième contrefort sud de Saint-Martin-des-Champs".
La féminité radieuse d'une telle gargouille tranche sur le grotesque trop souvent caricatural des gargouilles revisitées, comme à Mirepoix, par Viollet-Le-Duc et les siens.
Étiquette : art
Fête de fin de saison chez Colette
Le Rameau musical de Dun fêtait hier soir la fin de sa saison 2009-2010. Une saison de travail pour l'atelier chant. Une saison de concerts pour les chanteurs : Les Issards, Saint-Félix de Tournegat, La Bastide de Lordat, La Bastide de Bousignac, Sainte-Colombe, Vals, Rieucros… De beaux, de très beaux concerts de musique sacrée, dans le cadre de petites églises, propices au partage de l'écoute, au bonheur d'être ensemble, au sentiment de la vie unanime. Il y a une grâce toute particulière à chanter ainsi, dans la simple proximité de nous autres, mortels, et des anges, me disait hier soir une chanteuse amie.
La fête était hier soir chez Colette, Colette Autissier,qui anime l'atelier chant du Rameau musical de Dun, guide le travail des chanteurs, et renouant ainsi avec l'ancienne tradition des maîtres de chapelle, assure la direction des concerts. Tout le monde peut s'inscrire au Rameau musical de Dun. Il n'est pas nécessaire, comme on dit, "d'avoir de la voix". Colette aide quiconque le lui demande, à placer sa voix, à l'écouter, à la reconnaître, à l'apprivoiser. "La voix part des talons. Il faut avant tout se planter solidement sur la terre", dit-elle.
Bien plantée sur le seuil de sa maison, Colette nous attendait hier soir pour une séance festive, consacrée d'abord à la vidéo du récent concert de Rieucros, puis au verre de l'amitié avant les vacances.
Le visionnage de la vidéo du concert de Rieucros – "instructif…", susurre Colette – suscite tout à tour des applaudissements et des fous rires lorsque la caméra fixe des détails amusants ou que la sono trahit quelques discrets ratés de la note ou un moment de dérapage du jeu concertant.
"Ce qui est capital, c'est de sourire", observe quelqu'un derrière moi.
"C'était un beau concert, dit Colette. Mais il faut encore travailler".
Les facéties des messieurs du groupe des basses, lorsqu'ils viennent sur le devant de la scène présenter le morceau suivant, déclenchent l'hilarité générale. On ne se doute pas que Jean, le potier de Rieucros, est un pince-sans-rire digne de Buster Keaton. Il m'a dit ensuite que "quand même, il retenait un peu sa nature…" Les concerts de la prochaine saison promettent quelques fusées réjouissantes.
Un moment de frisson dans un Motet à la Sainte Vierge de Nicolas Bernier, chef-d'oeuvre d'ornementation, périlleux à interpréter.
Un beau duo des deux instrumentistes dans la transcription pour clavier et accordéon d'un canon pour orgue de Pachelbel. Le son de l'accordéon classique est d'une profondeur merveilleuse.
J'ai retenu cette image de Colette qui chantait, au début de la soirée. On y voit la vitalité, l'enthousiasme, la générosité, la bonne humeur, la fantaisie, le goût de rire… Tout Colette.
On voit la aussi comment Colette prêche d'exemple :
"Il faut l'ouvrir ! Là maintenant, booo… respirez un coup, – ho ! Vous en reprenez un coup comme une carpe".
Je raconte toute l'histoire dans Le Rameau musical de Dun – Une répétition chez Colette.
Et maintenant, place à la fête sous les étoiles, au jardin.
Ris et souris, doux frou-frou de la nuit. Les étoiles, au ciel, luisaient comme des clous d'or.
Bonnes vacances au Rameau musical de Dun ! A bientôt !
A lire aussi :
Quand le Rameau musical de Dun chante à la Bastide de Bousignac
Le Rameau musical de Dun chante aux Issards
Le Rameau musical de Dun – Une répétition chez Colette
Quand le Rameau musical de Dun chante à Vira
A l’église de Bensa, le Rameau musical de Dun
A Béziers, en flânant, du Jardin des Poètes aux 9 écluses de Fonséranes
Ci-dessus : Vue de l'écluse octuple dans les années 1900.
Source : canaldumidi.com : Ecluses de Fonserranes
Lors de ma récente escapade à Béziers [1]Cf. La dormeuse blogue : A Béziers, en flânant, des allées Riquet à la cathédrale Saint Nazaire, outre que j'ai assisté à une superbe représentation du Théâtre Dromesko [2]Cf. La dormeuse blogue : Le Théâtre Dromesko dans sa Grande Baraque, je n'ai pas manqué d'aller admirer à Fonséranes [3]L'orthographe du toponyme Fonséranes demeure soumise à diverses variations. Si aujourd'hui l'on écrit plutôt Fonséranes, les graphies anciennes … Continue reading les 9 écluses, ou l'écluse octuple, chef d'oeuvre de "nostre Riquet" comme disent les Mirapiciens [4]Pierre Pol Riquet a vécu et travaillé une dizaine d'années à Mirepoix., – dont je suis, même d'adoption.
La petite difficulté a été de déterminer le chemin qui mène aux 9 écluses. Les passants presque toujours n'en savent rien, et le dépliant fourni par l'office de tourisme ne situe pas le site des 9 écluses de façon précise. A l'office de tourisme même, la personne que nous avons consultée à l'accueil, nous a dit que c'était bien trop loin pour que nous envisagions d'y aller à pied !
– Trop loin comment ? Deux heures ? Quatre heures ?
La personne ne savait pas. Elle nous a indiqué vaguement la direction de Fonserranes.
Pariant que les 9 écluses ne se trouvaient sans doute pas si loin qu'on nous le disait, nous avons pensé qu'il suffisait de descendre vers l'Orb. Ensuite, nous verrions…
Au coeur du Jardin des Poètes, parc imaginé par Eugène Bülher, également créateur du Parc de la Tête d'Or à Lyon, deux vues du Titan, oeuvre spectaculaire, due au grand sculpteur Jean Antoine Injalbert.
Quelques figures de poètes : Victor Hugo par Injalbert ; Emile Barthe, félibre, par J.G. Roustan ; épouse ou fille d'Emile Barthe.
Logés à l'Hôtel des Poètes, au bord des allées Riquet, nous traversons le beau Jardin des Poètes, dont la pente incline rapidement vers l'Orb, et, après avoir dévalé une petite rue dominée par une belle maison de style orientaliste, puis traversé un boulevard bordé d'immeubles en chantier, nous arrivons au quai de l'Orb. Là, après avoir franchi sous la voie du chemin de fer un tunnel sombre, puis longé sous les platanes la gracieuse villa Saint-Félix…
Nous voici à l'écluse de Béziers, au bord du Canal du Midi.
Nous empruntons le chemin de halage, et, toujours cheminant au bord de l'eau verte, nous partons en direction des 9 écluses de Fonséranes.
Le parcours commence, ô surprise, par le franchissement du fleuve Orb via le Canal devenu pont. Le canal en effet passe par-dessus le fleuve, ou le fleuve par-dessous le canal ! On éprouve une impression très curieuse à cheminer ainsi à la fois au bord de l'eau et au-dessus de l'eau.
On voit sur la photo-ci contre les piles du pont-canal et alentour les rides de l'Orb.
Bien que Vauban eût formé dès 1684 l'idée d'un pont-canal, l'édification de ce pont date de 1857 [5]Cf. Canal du Midi – Béziers. Le canal, initialement, traversait l'Orb, fleuve irrégulier, mal navigable. Il est ensuite surélevé par une digue, censée maintenir le tirant d'eau nécessaire à la navigation. Mais l'effet de la digue se révèle insuffisant en raison du sable qui s'accumule alors dans le lit de l'Orb. Confiée en 1854 à l'ingénieur Jean Magues, la réalisation du pont-canal nécessite trois ans de travaux fort coûteux.
Depuis le pont-canal, on voit le Pont Neuf et, plus loin, plus haut, reconnaissables à leur air de forteresse, la cathédrale Saint Nazaire et l'évêché de Béziers [6]Cf. La dormeuse blogue : A Béziers, en flânant, des allées Riquet à la cathédrale Saint Nazaire.
Nous marchons maintenant au bord du Canal qui s'écoule ici entre deux grandes haies de cyprès. La présence de ces arbres de tradition millénaire, le ciel céruléen, le calme des eaux, tout inspire ici le sentiment du temps immobile, de telle sorte qu'on ne sait plus si l'on marche dans un paysage du XXIe ou du XVIIe siècle, voire au bord d'une via de l'antiquité romaine.
Une heure environ après avoir quitté l'hôtel des Poètes, nous arrivons au site dit "des 9 écluses". Plutôt que de "9 écluses", il s'agit en fait d'une écluse octuple, i. e. composée de 8 bassins successifs et de 9 vannes, nécessaires aux navires pour franchir une dénivelée de 25 mètres. Nous nous trouvons ici en face du bassin inférieur.
25 mètres plus haut, nous voici parvenus en face de la vanne supérieure. Celle-ci se trouve coiffée d'un petit pont en forme de dos d'âne qui permet de gagner l'autre rive de l'écluse.
Voici l'écluse octuple, vue du haut des 25 mètres de dénivellation qu'elle ménage. Elle forme ainsi, de bassin en bassin, un escalier d'eau. La découpe ovoïde des bassins ajoute à la spectaculaire harmonie de l'ensemble. Lorsque demain matin les vannes, une à une, s'ouvriront, l'eau descendra majestueusement vers la ville, qui apparaît en gloire au loin, dans une perspective légèrement oblique. Pierre Pol Riquet a construit ici le plus beau des hommages à sa ville natale.
Sur l'autre rive de l'écluse, une étrange machinerie, installée en 1984, aujourd'hui hors service, témoigne de la courte période d'utilisation d'une pente d'eau. Equipé d'un bac rempli d'eau, le dispositif permettait de transporter les navires 25 mètres plus bas via un engin monté sur pneus. Le transport des marchandises cesse toutefois sur le Canal à partir de 1985. L'usage de la pente d'eau est en conséquence abandonné.
Nous repartons vers Béziers, toujours au bord du Canal.
Je reconnais, à la vue de la double issue de ce bassin, la forme en "fer à cheval" déjà aménagée par Riquet dans le bassin expérimental de son château de Bonrepos [7]Cf. La dormeuse blogue : Pierre Pol Riquet et les siens au château de Bonrepos afin de faciliter la conduction des eaux.
Le Canal, au soleil couchant, se pare d'ombres longues dans lequelles passent des flotilles de canards.
Précédés par d'autres ombres, nous revoici sur le pont-canal.
Avec son air de forteresse, ses tours, son clocher, son campanile, la cathédrale Saint Nazaire figure aux yeux du promeneur un repère visible de toutes parts. Elle figure également, en dialogue avec le Canal, la beauté des oeuvres humaines, telle que l'histoire les rassemble si superbement à Béziers.
Pour en savoir plus sur le Canal du Midi, voir l'excellent site : Canal du Midi – Canal Royal du Languedoc
Pour une autre promenade dans Béziers, in. La dormeuse blogue : A Béziers, en flânant, des allées Riquet à la cathédrale Saint Nazaire
Notes[+]
↑1 | Cf. La dormeuse blogue : A Béziers, en flânant, des allées Riquet à la cathédrale Saint Nazaire |
↑2 | Cf. La dormeuse blogue : Le Théâtre Dromesko dans sa Grande Baraque |
↑3 | L'orthographe du toponyme Fonséranes demeure soumise à diverses variations. Si aujourd'hui l'on écrit plutôt Fonséranes, les graphies anciennes subsistent, telles que Fonserranes, ou Foncéranes. |
↑4 | Pierre Pol Riquet a vécu et travaillé une dizaine d'années à Mirepoix. |
↑5 | Cf. Canal du Midi – Béziers |
↑6 | Cf. La dormeuse blogue : A Béziers, en flânant, des allées Riquet à la cathédrale Saint Nazaire |
↑7 | Cf. La dormeuse blogue : Pierre Pol Riquet et les siens au château de Bonrepos |