Après le concert Haendel du 5 juin à Laroque d’Olmes, autre concert, autre scène, le 6 juin. Rodolphe Burger se produisait hier soir à l’Estive, scène nationale de Foix et de l’Ariège. Au programme, des titres de No Sport, son dernier album, publié en 2008, et un florilège de titres plus anciens. Point de décor. La scène est noire, remplie de matos électronique. Ambiance studio, proche sans doute du quotidien de Rodolphe Burger, i. e. de la ferme-studio que celui-ci habite à Sainte-Marie-aux-Mines. Point de préambule. Le chanteur entre, s’assied dans la lumière bleue, se saisit d’une guitare électrique ; comme un wasserfall qui s’échevèle il égrène des sons, et il il chante, ou plutôt il parle, en français ou en anglais, il parle sur un rythme impair, sa voix est basse, chaude, il parle sur le ton de la confidence, une hache tombe sur la confidence, quelle confidence ? il ne parle pas pour dire quelque chose à propos de quelque chose, il use de sa voix comme d’un instrument, et le quelque chose de quelque chose, c’est le chatoiement de la chair qui s’électrise, qui rutile dans la voix
On dit que Rodolphe Burger a enseigné la philosophie. Quelle importance ? Point ici de philosophèmes, mais une voix, une gueule, et un grand corps, moulé dans le jean de l’homme à la peau de serpent, un grand corps qui déploie lorsqu’il bouge de façon oblique, suspendue comme par l’effet d’une ruse, l’animalité du vivant.
Derrière lui, un bassiste et un batteur surgissent de l’ombre. Ils entrent peu à peu dans dans le champ de force. Les lumières changent, en même temps que les sons des guitares et de la batterie pleuvent, croulent, traversés parfois d’accalmies, de mélismes étranges, piqués de notes d’Orient. Autant de paysages instables, versatiles, autant d’îles, de plages, semées de mots cailloux, un nid, I’m a passenger, and I ride and I ride, samuel hall, cheval jungle...
L’énergie ruisselle. Des corps se lèvent, deux rangées entières dansent au pied du chanteur.
C’est le moment que je préfère, – quand le son dissipe les formes, quand le rythme s’emporte dans la lumière.
Dehors, la nuit était tombée sur l’Estive. Le château flamboyait sur le ciel noir.
1 commentaires au sujet de « Rodolphe Burger chante à l’Estive »
pandatomic
Ah oui, un personnage intéressant ce R. Burger.
Un hobo du rock’n’roll à la mélancolie souvent littéraire, une élégance de guingois…