Oh ! la voix des dieux
qui grésille dans les fils électriques,
oh ! la rumeur des rêves
qui planent sur les corps endormis,
oh ! le silence radio des insectes volants
qui meurent sur les lampadaires,
comme ailleurs celui des gens qui meurent sur les saisons !
Au hasard des oiseaux de nuit,
des chauves-souris,
nous, les égarés, cheminons, comme les autres,
sur la route obscure
qui vit un jour le philosophe
— c’était au IIIe siècle av. J.-C. sur la route de Mégare —
tomber dans un puits.
τοὕ μηδέν εἵυαι δυνατόν, ὃ οὔτ᾽ ἒστιν ἀληθἑϛ οὔτ᾽ ἒσται.
Rien n'est possible que ce qui est arrivé ou qui sera (1),
dit Épictète, qui rapporte ici la parole
du grand Diodore CRONOS (2).
-----
1. Épictète. Entretiens. Livre II, 19, 1, lignes 10-11 (p. 79). Traduction de la page 79 : même ouvrage, p. 78. Texte établi et traduit par Joseph Souilhé. Édition Les Belles-Lettres. Paris. 1969.
2. Diodore Cronos († ca 284 av. J.-C.), philosophe grec de l'école mégarique. Spécialement connu pour son κυριεύων λόγος (argument dominateur), qui porte sur le possible ou l'impossible des futurs contingents.
« Fin de l'année 1657, en laquelle y a eu de baptisés huictante-sept, à ce comprins quatorze qui sont du faux coing, autremant appelés bastards ». Signé Davelha prêtre et vicaire. AD11. Carcassonne. Paroisse Saint Michel. Baptêmes. 1646-1658. Document 100NUM/AC69/GG30. Vue 148.
En numismatique, le mot « coing » [aujourd'hui coin] désigne la pièce d'acier trempé, gravée en creux, qui sert à frapper les pièces de monnaie et les médailles ; et le mot « faux coing », la pièce d'acier, faite à l'imitation du coin officiel, dont les faux-monnayeurs se servent pour frapper de la fausse monnaie.
De façon sexuellement très suggestive, Maître Davelha oppose ici la procréation ou la frappe des enfants légitimes, i.e. conçus dans le cadre du mariage, à la procréation des enfants bâtards, dont il assimile la frappe à celle de la fausse monnaie.
17 septembre 1669. Décès d'Antoine Espinasse. AD31. Avignonet-Lauragais. Baptêmes, mariages, sépultures. 1600-1674. Document 2 E IM 8900. Vue 128.
« Anthoine Espinasse le mesme jour environ les 10 heures de nuit, qui se déroba du lict où sa fame estoit, et se jetta dans la grande fontaine. Le lendemain ensepveli au mesme endroit que dessus. »
Faute d'autres éléments d'information, on se trouve confronté là au mystère d'une destinée dont on ne saura jamais rien. Telle que formulée, la rédaction de l'acte de décès semble absurde, mais elle donne à envisager des abîmes de solitude.
20 septembre 1669. Décès de M. de Castel. AD31. Avignonet-Lauragais. Baptêmes, mariages, sépultures. 1600-1674. Document 2 E IM 8900. Vue 128.
« M. de Castel, payeur des offices du Canal royal, obiit au logis de la Croix blanche le 20me septembre 1669. Ensepveli mesme jour. Il mourut environ six après minuit. »
Il pourrait s’agir ici du « Jean Castel, dont le nom se trouve mentionné aux Archives départementales de l'Aude dans la série C, répertoire numérique des sous-séries 1 C à 73 C. Diocèse civil de Carcassonne.
13 C 85-101. Comptes de recettes et de dépenses rendus par les syndics du diocèse, et pièces à l'appui. 1596-1764. Nº 90. Jean Castel : 1650-1652 et 1658-1659.
13 C 102-134. Comptes des receveurs des tailles et pièces à l'appui. 1574-178. Nº 117. Jean Castel, receveur ancien : 1636, 1639, 1642, 1648, 1654, 1663, 1666, 1669.
Ici, point d'absurde de la destinée. Le « receveur ancien », devenu « payeur des offices du Canal royal », est mort à la tâche à Avignonet. Le tronçon de Toulouse à Naurouze, sur lequel on construit alors l'écluse d'Encassan, sise sur le territoire de la communauté d'Avignonet, n'a été commencé qu'en 1667 et définitivement mis en service qu'à la fin de 1673. Le logis de la Croix d'or n'est sans doute pas pas la maison éclusière d'Encassan, dont on ne connaît pas la date exacte d'édification, mais plutôt l'auberge d'Avignonet dans laquelle M. de Castel s'est arrêté au cours d'un déplacement relatif à aux premiers travaux d'aménagement de ladite écluse d'Encassan.
Ci-dessus : vue de la maison éclusière d'Encassan aujourd'hui.
Au bord du chemin, une modeste pensée. « Pourquoi une pensée, un mot, une fleur, font-ils que vous vous arrêtez et que vous relevez la tête vers le triangle céleste ? » questionne Alfred de Musset, en 1836, dans La Confession d'un enfant du siècle(1).
Cherchez dans l'image la cathédrale, le château, et la tour de la maison seigneuriale.
Ci-dessus : vues de la cathédrale, de l'ancien château de Mirepoix et de la maison seigneuriale, par temps variable, depuis les hauteurs du Bastié.
-----
1. Alfred de Musset. La Confession d'un enfant du siècle. Première partie. Chapitre 1, p. 58. Édition F. Bonnaire. Paris. 1836.